Prendre d'abord le dirigeant d'une entreprise étatique aux caisses bourrées de fric. Le genre de responsable qui n'a pas grand-chose à faire pour que l'entreprise qu'il dirige marche et fasse de grosses entrées d'argent. Elle vend de l'eau, par exemple… La seule chose qui pourrait justement empêcher que les choses tournent bien au sein de cette entreprise, c'est que le responsable se prenne au sérieux et veuille se mêler… de gestion ! L'erreur à ne surtout pas commettre ! Il est donc sain, pour l'entreprise comme pour la Société en général, pour la bonne marche du service public qu'elle assure, afin qu'il reste correctement distribué, que son gestionnaire, lorsque l'envie le prend de s'adonner à la gestion, qu'il puisse occuper ses journées à faire autre chose. Ecrire, par exemple… N'importe quoi, n'importe comment, pourvu qu'il écrive ! Prendre ensuite une Association de bienfaiteurs, agitateurs pluriels à leurs heures perdues, qui sont nombreuses, engagés en politique juste ce qu'il faut pour dorer le blason de ‘Sidi', actifs en Culture un chouia qui permette à ‘Sidi', de temps à autre, entre deux visites marathons et trois réunion interminables, de venir, au milieu de gens qui font semblant, récompenser dûment ceux qui jouent le jeu. Notre écrivain responsable, par exemple… Trouver pour la circonstance un imprimeur, en faire accessoirement un éditeur, juste pour l'occasion. Avec les incontournables de l'Association des bienfaiteurs réunis, leur bénédiction absolutrice, notre cher imprimeur a obtenu de l'entreprise que dirige notre écrivain responsable un gros, un très gros contrat d'impression. Pour remercier et montrer combien notre imprimeur n'est point ingrat, une ‘Larme glacée' est aussitôt coulée en une rame de papier. Voire deux, allez, soyons fous ! A la gloire de celui qui est devenu, l'espace d'un après-midi, le symbole de la réussite culturelle d'une ville, ‘source vive' de toute une région. Notre écrivain responsable, hommage lui est rendu par ‘Sidi' est toute sa suite. Prendre enfin un écrit. Sorti des entrailles de notre cher écrivain responsable, l'affaire est entendue. Pétri par ses mains, cela ne se discute pas. Les mauvaises langues des aigris, des jaloux, peuvent déceler des coquilles, innombrables, se plaindre de ne rien comprendre à cet écrit. Peu importe ! Le livre, vanté par la radio, la presse écrite et même la télévision (accourue pour la circonstance), récompensé par ‘Sidi' qui a reconnu en son auteur un talent certain, est destiné à être récompensé, pas à être lu ! Allons ! Pourquoi se soucier alors de son contenu ? De l'eau, de l'entreprise qui la vend, du dirigeant qui veille à son écoulement, jaillit toute forme d'envie…