Il y a six ans nous quittait ? jamais notre ami Che?kh M?qalech. ?La r?deuse, ?il torve sentinelle des caveaux de glace? a surpris l?authentique enfant du plat pays, chez lui, ? la cit? Sorecor, par une nuit froide du 14 d?cembre 2002, entour? des membres de sa famille et de quelques proches compagnons des m?morables ?ganas? de Bario Alto et de Sidi Djillali. Des mois durant, il n?a pas cess? de lutter contre une m?chante maladie pour tenter de se mettre d?aplomb et ?tre au rendez-vous de l?ann?e de l?Alg?rie en France qu?il appelait de tous ses v?ux. Rien n?y fit. Les vents contraires du destin en ont d?cid? autrement pour l?artiste des pauvres. Comme d?habitude, tout au long d?une trajectoire faite d?occasions manqu?es et d?amours toujours contrari?es. De son vrai nom, Bouchrit Abdelkader, Che?kh M?qalech est n? en 1931 ? Ouled Ali, une localit? excentr?e de la commune de Makedra, o? il a pass? sa premi?re enfance avant de ?descendre? ? Sidi Bel-Abb?s en compagnie de toute sa famille qui venait d??tre d?poss?d?e d?une parcelle de culture de six hectares par arr?t? de la municipalit? coloniale de l??poque. Il vivra ce dur ?pisode comme une v?ritable d?chirure, un arrachement ? la terre matricielle qui lui inspirera un grand nombre de ses chansons futures, entre autres ?Ouallah yal m?dina ma n?houad lik...? Les Bouchrit vont se fixer d?abord ? Bario Alto, vieille citadelle de la rive gauche de la M?kerra, o? le petit gavroche commen?a, sous la direction de Che?kh Breik El Gourari, par plaquer ses premi?res notes de musique sur un banjo de fortune rafistol? ? l?aide d?un phare usager et de menus accessoires r?cup?r?s d?un camion de transport de troupes am?ricaines. Les ann?es 50/60 vont marquer ses vrais d?buts artistiques avec un r?pertoire tr?s vari? de plus de 56 chansons et de compositions instrumentales dont certaines seront reprises, avec une ?gale r?ussite, par de jeunes interpr?tes de la ville, comme Cheb Slimane Bouden et surtout son neveu Cheb Mimoun, r?cemment de retour ? Sidi Bel-Abb?s apr?s un long s?jour en Belgique. Apr?s une premi?re p?riode d?activit? en solo, durant laquelle il sera souvent appel? ? chanter dans les mariages des familles pauvres et les traditionnelles ?taguesrate? des ?ternels laiss?s-pour-compte de la p?riph?rie urbaine, il se d?cida ? int?grer des troupes de vari?t?s musicales mieux structur?es, notamment celles d??El Amal? de Ghaouti Amir et d??El Afrah? du regrett? Ahmed Benaricha. En plus de son r?cital de chansons qu?il assure en alternance avec un autre ma?tre du genre, en l?occurrence Kadri D?ziri, p?re de la mythique Zina de Ra?na ra?, Che?kh M?qalech se fera remarquer ?galement sur les tr?teaux, en interm?de des spectacles, avec des monologues hilarants o? s?entrem?lent le trivial et le tragique des situations. L?exp?rience du travail en groupe, avec un orchestre tir? aux quatre ?pingles, finit par le refroidir totalement pour se r?soudre, une seconde fois, ? tenter l?aventure en solo avec l?aide de ses fid?les ?Gnadiz? de Sidi Djillali pour les percussions et l?accompagnement instrumental. Quelques mois avant sa mort, en pr?vision de sa participation ? un programme de spectacles en France, la ?guemna? des anciens donne, ? Khayi M?qalech, la force de revenir au bord du lac de Sidi M?hamed Benali et chanter quelques uns de ses meilleurs textes de ra? hard arrach?s aux derniers contreforts de la m?moire: ?Khalouni nebki a?la rayi, Ya mali mali mal wach issaberni, Ya taleb ardja n?salek, Labnat labnat libiya, Sem?ouli ya khwani...? Notre confr?re de la cha?ne 3, Hamid Kechad et une jeune cam?raman ?migr?e qui filmait la sc?ne pour le compte du commissariat de l?ann?e de l?Alg?rie en France tombent sous le charme du ma?tre du ra? bel-abb?sien, habill?, pour la circonstance, d?un magnifique costume blanc qui lui donnait l?air d?un chanteur d?barqu?, l?, par hasard, de la lointaine Louisiane. 13 d?cembre 2008. Retour avec des amis sur le lieu de tournage de ces derni?res images... Le majestueux peuplier des ann?es de braise a c?d? la place ? des tas de b?timents qui se rapprochent, de jour en jour, du lac de Sidi M?hamed Benali... Mais, la pin?de des grandes ?rekza ra?? languit toujours de l?absence de ?l?homme ? la guitare s?che et ? la caisse de r?tameur en bandouli?re en train de faire des mamours ? une m?canique insensible...? Abb?s, le po?te ?corch? vif, gardien du dernier ?carr? de Grenache? de notre ancien plateau solaire, conna?t la suite de mon histoire.