L?interdiction des antennes paraboliques est pr?sent?e comme une n?cessit? urbanistique et une pr?paration de l?av?nement de la TNT, oubliant que ?la parabole? est depuis longtemps dans les m?urs sociales et politiques, son apparition ayant co?ncid? avec la fin du rideau de fer du r?gime du parti unique. Aucune ?ch?ance n?est donn?e, mais il suffirait qu?un d?cret soit sign? pour voir nos villes changer en moins d?une semaine. Et ? moins que cette interdiction ne soit frapp?e par le rejet social, comme c?est le cas pour l?interdiction des p?tards, il y a fort ? parier que les habitudes cathodiques des m?nages puissent rapidement sombrer dans la contre-r?volution qui s?annonce. L?argument avanc? par le ministre des Postes et des nouvelles technologies (bien que ce ne soit pas de son domaine de comp?tences), reposant sur l?image hideuse des paraboles sur les fa?ades des immeubles, tient la route et le ph?nom?ne n?cessite d??tre affront? et r?solu. Et son coll?gue du gouvernement, le ministre de l?Habitat et de l?Urbanisme parle plut?t de changer les cahiers des charges des constructions et d?int?grer de mani?re obligatoire des r?seaux de r?ception satellitaire qui permettent d??viter les installations de fortune bricol?es par les foyers, au b?n?fice d?installations collectives. Mais il n?est pas question que d?esth?tique. Il s?agit aussi de supprimer la r?ception satellitaire et de lui substituer la t?l?vision num?rique terrestre (TNT) qui repr?sente la technologie de pointe du moment, ? m?me de pr?cipiter la fin de la r?ception hertzienne, comme cela sera bient?t le cas en Europe. Mais ces antennes paraboliques ne sont pas que des objets en m?tal et en plastique; elles ont un contenu et ce dernier n?est pas sans importance ni sans impact sur la soci?t?. Leur explosion a co?ncid? avec la fin du r?gime du parti unique et l?av?nement du pluralisme de la presse ?crite et dans la production audiovisuelle priv?e. Elles sont donc assimil?es ? des acquis de l?ouverture pluraliste du d?but des ann?es 1990, une sorte de libert? individuelle et de d?mocratisation de l?acc?s aux m?dias ?trangers. Si l?on devait paraphraser un sociologue, interdire les ?paraboles? dans le pays le plus ?parabolis?? du monde et punir les contrevenants, cela reviendrait ? consid?rer chaque t?l?spectateur comme ?un harrag virtuel?. Mais l? n?est pas encore le d?bat. La TNT, bien que de qualit? non d?mentie et signe d?une avanc?e technologique ind?niable, n?offrira jamais, ? cause de son choix limit?, la diversit? de plus de deux mille cha?nes accessibles gr?ce ? un terminal standard et une parabole de moins d?un m?tre de diam?tre. Il se trouve qu?? ce choix multiple de cha?nes arabes, occidentales, slaves, asiatiques ou am?ricaines, dont une grande partie est superflue et n?est jamais regard?e, les Alg?riens se sont bien habitu?. Une habitude d?montr?e par le passage rapide de l?antenne collective ? celle individuelle puis par la multiplication des petites antennes dans un m?me foyer. L?usage n?est en fait pas le m?me pour tous. Une partie du public regarde les informations en alternant Al Jazeera et Al Arabya, d?autres t?l?spectateurs apprennent l?anglais sur la BBC ou la CNN, certains s??vadent sur des cha?nes de promotions touristiques, les feuilletons turcs ou syriens, sans compter les matchs de football des comp?titions europ?ennes et internationales, les programmes pour enfants, la musique ? laquelle les jeunes veulent tout le temps ?tre ?branch?s?, les cha?nes culinaires et, naturellement, les cha?nes religieuses. Cette diversit? des usages si diff?rents de la parabole, sur laquelle il est impossible de s??taler en un article de presse, est telle qu?elle ne saurait ?tre contenue dans un seul bouquet de dix cha?nes de la TNT, dans laquelle on retrouvera forc?ment l?ENTV et ses clones satellitaires, ni encore dans un bouquet Canal+ vendu par Internet, alors qu?une cat?gorie du public alg?rien a fini par tourner le dos aux cha?nes occidentales d?Hotbird et se retrouve dans celles re?ues ? partir de Nilesat. Economiquement parlant, acheter une parabole et son r?cepteur, un terminal, peut co?ter au maximum 10.000 dinars, mais cela repr?sentera une d?pense unique. En revanche, s?abonner ? un bouquer, sur TNT ou sur Internet, revient ? payer une redevance mensuelle, alors que les m?nages ont le budget suffisamment alourdi par de multiples d?penses que le pouvoir d?achat moyen est loin de pouvoir d?passer. Quant aux commerces vivant de la vente des ?quipements de r?ception satellitaire, il va de soi que cela va se r?percuter n?gativement sur leur activit?, s?rieusement r?duite par la fin du piratage des bouquets de Canal satellite puis de TPS et l?on parle d?j? d?une sensible r?duction des importations, certains op?rateurs redoutant d??tre surpris par une nouvelle loi qui leur laisserait sur les bras des conteneurs entiers sans preneurs. Selon les statistiques officielles, on en d?nombre plus de 20 millions en Alg?rie, mais ce chiffre peut ?tre r?duit ? la baisse si ce d?compte ne s?est bas? que sur le volume des importations et n?a pas tenu compte de l?usure d?une partie de ce volume. Cela laisse tout de m?me voir ? quel point le ph?nom?ne est important et il n?est pas certain que la suppression de l?antenne parabolique, sans contrepartie en diversit?, soit pour ainsi dire une mesure populaire. Les Alg?riens pr?ts ? se s?parer de leur parabole? Poser pareille question, c?est d?j? y r?pondre?