Les chalutiers de Béni-Saf sont rentrés au port les cales gorgées de poisson, en cette fin de semaine et, du coup, la sardine est descendue jusqu'à 20 dinars le kilo sur les marché. «Ce qui pour les uns apparaît comme une pêche miraculeuse, laisse les autres pour le moins circonspects dans la mesure où le poisson ramené atteignait à peine la taille marchande pour la grillade», dira un vieux pêcheur, pour lequel il faudra patienter encore un bon mois avant de crier victoire. Car il ne faut pas oublier que depuis deux années environ, la sardine de par sa rareté jusqu'alors inexpliquée, avait atteint des prix inouïs, qui la faisaient varier entre 150 et 300Da le kilo, à tel point que les consommateurs se demandaient si les professionnels de la pêche n'avaient pas décidé de l'ennoblir et lui faire rejoindre la catégorie des poissons les plus huppés. Pire, certains pessimistes prédisaient même sa fin le long de nos côtes. «Ce poisson est certes migrateur, reprendra notre vieux pêcheur, mais cette fois son voyage aura trop duré…» Du coup, l'espoir revient chez les couches défavorisées, qui jusqu'à présent ne pouvaient que lorgner les quelques cageots de poissons blancs (rougets, merlans…) ou bleus (sardines, anchois…), aussitôt débarqués, aussitôt enlevés parce que vendus d'avance aux restaurateurs. «L'abondance revient, promet un responsable qui ajoute prudemment: «…pour peu que les professionnels de la mer respectent les zones de pêche, à commencer par la fameuse limite des 3 milles nautiques, en deçà de laquelle viennent se reproduire les espèces en cette période de l'année, avant d'atteindre la taille et la maturité requises, pour prendre le large où elles pourront être pêchées en toute légalité». De leur côté, certaines associations qui se sont émues de la disparition de la sardine de nos côtes, parlent déjà de renouer avec la traditionnelle fête de la sardine qui faisait le charme de la période estivale et dont la ville de Sidi Boucif s'enorgueillissait, plus d'un siècle durant, avant de la geler au cours de ces deux dernières années. En attendant ce jour béni, la population de Béni-Saf se régale de boulettes de sardine fraîchement pêchée. «C'est, assure notre vieux gourmet, le meilleur procédé pour cuisiner ce poisson qui arrive juste à maturité, tout en nourrissant l'espoir en notre cœur de passer à de bien bonnes grillades au cours des jours à venir».