A Paris, un Noir ou un Maghrébin a plus de chance de se faire contrôler par la police qu'un Blanc. Cela se disait tout bas, mais cette semaine une étude vient de le dire tout haut et d'en apporter la preuve. Publiée dans le quotidien français Libération, cette étude parle de «contrôle au faciès», de «délit de sale gueule», et de «profilage racial» qui sont devenus une réalité en France. Et à grande échelle. «Une étude menée par deux chercheurs du CNRS, et rendue publique ce mardi, vient apporter la démonstration scientifique de cet état de fait jusqu'alors ressenti mais non quantifié», écrit Libération. Selon cette étude, «un Noir a six fois plus de chance d'être contrôlé par la police qu'un Blanc, un Arabe (ou perçu comme tel) 7,8 fois plus». Les chercheurs, Fabien Jobard et René Levy, dont l'étude a été financée par une fondation américaine, l'Open Society Institute (créée par le milliardaire Georges Soros), se sont concentrés sur les opérations de police menées entre octobre 2007 et mai 2008 dans deux espaces parisiens: à la gare du Nord et à Châtelet-les-halles. L'observation s'est faite en deux temps. Première phase, des observateurs placés aux points d'accès de chacun des sites ont passé au crible les passants, en recensant plusieurs critères: âge, sexe, origine, vêtements, gros sac ou non (dans la perspective du plan Vigipirate). Une fois définie cette «population de référence», les observateurs ont suivi les policiers pour scruter 525 contrôles, en relevant les mêmes critères. Résultat: plus que sur les comportements des gens, les policiers se fondent sur l'apparence. La couleur de peau («Blanc», «Noir», «Arabe») mais aussi les vêtements, un jeune sous une capuche, habillé hip hop ou tecktonik a plus de chance d'être contrôlé puisque appartenant souvent à une minorité visible. «En visant certaines personnes à cause de ce qu'elles sont (ou ayant l'air d'être) et non à cause de ce qu'elles ont fait ou font, les policiers perpétuent des stéréotypes sociaux et raciaux», constatent les auteurs. Les observateurs ont également interrogé plusieurs personnes contrôlées pour savoir si elles avaient perçu du racisme dans l'intervention. Seules 3% d'entre elles ont déclaré avoir perçu un traitement raciste ou insultant. 76% ont émis un jugement neutre sur l'attitude des fonctionnaires, 6% ont considéré que les policiers s'étaient comportés de manière respectueuse. L'Open society institute, qui a conduit plusieurs études dans différents pays sur cette question, émet des recommandations. Parmi elles, l'enregistrement par les patrouilles, à l'aide d'un formulaire, du profil racial des personnes contrôlées pour vérifier, a posteriori, l'impartialité des contrôles. Idée difficilement applicable en l'état dans le droit français alors que les partisans des statistiques raciales ont bien du mal à s'imposer.