Interdite depuis 1993 puis soumise à des règles bien définies et établies par des profanes religieux qui ont investi la région de Rechaïga durant la décennie noire, la waada de Thouilila, à deux kilomètres du chef-lieu de la commune steppique, a renoué avec ses traditions. Toutes les tribus de la région ont bravé la canicule de jeudi, l'isolement et les vents chauds pour descendre honorer le saint patron de Thouilila où le thermomètre affichait déjà les 45°C, dans un espace steppique vide à perte de vue où seul l'armoise, cette plante spécifique de la région, défie la chaleur. En dépit de ces aléas naturels, des centaines de familles ont répondu donc présentes à l'appel lancé par le jeune maire de la commune, Yahia Mokhtar, en direction de sa population afin de réactiver ce patrimoine culturel légué par les premiers occupants de la région, ceux qui ont les premiers pris les armes contre l'occupant et parmi qui l'Emir Abdelkader recrutait des hommes pour sa cavalerie et sa smala à Aïn Taguine notamment. Des centaines de cavaliers venus des régions limitrophes de Djelfa, Médéa, Mascara, Saïda et Laghouat, ainsi que ceux des tribus de Tiaret ont participé à des fantasias bien orchestrées sur des terrains préparés à l'effet de rendre agréables les courses, sous les regards attentifs des accros du baroud et des galops. Conteurs, gouals, chanteurs, poètes, cafés sous des tentes… tout y était, contribuant à la réussite de la fête, surtout que beaucoup -et dans bien des endroits- on croit fort que ces «petites professions» ont disparu. A l'heure du grand repas, couscous, viande, lait et hermas (une sauce faite à partir d'abricot) coulaient à flots. Les invités étaient servis dans un grand espace, toujours sous un soleil de plomb. Par ailleurs, les plus proches du terrain de parcours comme est le cas de ce vieux fellah, Messaoudi Lazhari, au douar Fegrour, n'a pas lésiné sur les moyens par mettre toutes ses habitations au profit des invités et de la presse, sens de l'hospitalité de la région oblige. A noter que la waâda a coïncidé avec l'achèvement de la campagne des moissons battages où des récoltes record ont été enregistrées, bien que Rechaïga se soit reconvertie depuis longtemps aux cultures maraichères en devenant la Mitidja de la steppe.