La fabrication des produits tabagiques ne sera plus accessible au premier venu. Un tour de vis vient d'être opéré par le gouvernement en vu de professionnaliser un secteur qui génèrent des milliards de centimes de bénéfices sans que l'administration des impôts n'en tire profit. Ainsi, l'ordonnance portant loi des finances complémentaire (LFC), publiée hier dans le journal officiel, impose de nouvelles règles à même de mettre de l'ordre dans ce secteur. Au titre, des impôts indirects, l'article 298 modifié stipule, en effet, qu'il sera créé auprès du ministre chargé des finances, d'une «autorité de régulation du marché du tabac et des produits tabagiques». Ce n'est plus le ministère du commerce qui se chargera de la régulation du marché du tabac mais bien celui des finances. Résultats des courses: le département de Karim Djoudi est désormais le seul habilité à donner l'agrément aux opérateurs qui voudraient se lancer dans la fabrication des produits tabagiques. «Les fabricants de tabacs sont agréés par le ministre des finances», souligne en effet l'article 298. Mieux encore, la LFC place la barre à sa plus haute histoire, celle peut être de professionnaliser la filière. C'est ainsi que ne peuvent être agréés en qualité de «fabricants de tabacs» que les personnes morales ayant la forme de «sociétés par actions et dont le capital social entièrement libéré à la date de constitution de la société est égal ou supérieur à 250.000.000 DA». Cette disposition est de nature de mettre le holà à la profusion de petites «boîtes» à tabac, notamment pour la chique -communément appelée «Chemma»- qui fabriquent sans aucun contrôle ces produits hautement nocifs à la santé. La délivrance d'un agrément à un fabricant de tabac sera désormais subordonnée à «la souscription d'un cahier des charges dont les termes sont fixés par décret exécutif». Ce cahier des charges fixe, souligne la loi des finances complémentaire, devra fixer les «conditions de partenariat auxquelles doivent satisfaire les fabricants». Ce partenariat entre opérateurs nationaux et étrangers fait, par ailleurs, la part belle aux investisseurs algériens. En effet, la LFC exige que le capital détenu par les nationaux résidents, dans le cadre de partenariat, soit à hauteur «de 51% au moins». Il y est précisé qu'un décret exécutif précisera, en tant que besoin, les modalités d'application de l'article. Il y a lieu de préciser que ces dispositions devant réglementer le marché du tabac s'insèrent parfaitement dans la logique des nouvelles mesure concernant l'importation. Ahmed Ouyahia avait, rappelons-le, exigé des importateurs étrangers d'ouvrir leurs capitaux à hauteur de 30% au profit des nationaux, faute de quoi ils seront interdits d'activité. Cette mesure qui a soulevé le tollé, notamment des pays de l'union européenne qui n'ont pas hésité à demander des explications, vient ainsi d'être appuyé par ces dispositions relatives au marché du tabac. L'objectif des pouvoirs publics étant de stopper l'hémorragie de la fuite des capitaux dans un contexte économique marqué par la hausse vertigineuse de la facture des importations pendant que les recettes d'exportation demeure un monopole figé des hydrocarbures. Encore que la volatilité des cours du brut a induit une fonte des réserves des changes et rien ne dit que la tendance ne s'inscrirait pas dans la durée. Toutes ces mesures protectionnistes aux yeux des partenaires étrangers visent en réalité à limiter au maximum les transferts à l'étranger des devises qui ont atteint, l'année dernière, près de 7 milliards de dollars.