Notre culture de la guerre se limite à lutter contre le colonialisme et à défendre nos frontières. Occuper un territoire étranger, voisin ou lointain, et préparer nos forces en conséquence ? Cela apparaît inconcevable au regard des principes qui fondent notre politique extérieure, car s'y préparer militairement reste peu conforme au discours officiel. Sur le plan officiel, l'Algérie ne possède ni ennemi aux frontières, ni ennemi lointain. Faudrait-il s'étonner de ce que les pays occidentaux plus particulièrement pensent que leurs ennemis se trouvent à l'extérieur, hors de leurs frontières, dans l'étranger proche pour l'Europe et partout dans le monde, mais dans les pays musulmans plus précisément pour les Américains ? Les pays arabes, par contre, n'identifient pas publiquement leurs ennemis, ou plutôt chaque pays arabe a une idée précise de qui est son ennemi, prépare et structure sa défense contre cet ennemi stratégique qu'il ne nomme jamais en public. Les pays occidentaux cultivent beaucoup le concept de projection de force, de puissance, de masse et il est évident qu'ainsi, avec une telle formulation de leur doctrine militaire, ce qui leur permet de justifier et d'engager des dépenses d'équipements, ils conçoivent que le théâtre des opérations militaires qu'ils sont appelés à développer se situe bien évidemment hors du territoire de l'Union. Selon ce qu'ils n'affirment pas en public, leurs intérêts peuvent être mis en péril très loin de l'Europe, mais surtout trop proches car juste au-delà des frontières liquides. C'est évidemment une chance que de ne plus avoir d'ennemis à ses frontières, de ne pas être éligible au rang de candidat à subir des agressions, sauf pour ce qui concerne les frappes terroristes quand on voit que des puissances, et non des moindres, en ont subi une intensité élevée. Quel pays arabe peut-il avancer avec certitude s'il ne considère pas du tout avoir un ennemi à ses frontières ? Les armées de nos pays n'intègrent pas le concept de projection très loin de nos frontières. Aucun pays, en tout cas, ne peut se permettre de désigner son ennemi étatique car d'abord cela équivaudrait à une déclaration de guerre. Vouloir intervenir forcément à l'extérieur traduit une volonté de puissance, une volonté à jouer un rôle mondial ou même régional en faisant appuyer sa diplomatie par l'instrument militaire. Telles ne sont pas les ambitions de l'Algérie.