Qu'y a-t-il de changé dans les rapports de force arabes au Proche Orient et dans la vision américaine d'Israël pour que Mahmoud Abbas en vienne à jeter l'éponge? Les pays arabes savent qu'un pays tel que les Etats Unis s'engage en permanence à garantir la supériorité militaire opérationnelle d'Israël sur l'ensemble réuni des pays arabes et que, de préférence, pour assurer leur propre sécurité ainsi que celle des régimes, il serait une nécessité de s'intégrer dans l'architecture internationale de sécurité définie par les Américains. C'est un fait, les pays arabes ont retenu la leçon des conflits passés mais chacun à sa manière. La leçon ne consiste nullement en un engagement pour un programme commun d'acquisition des capacités égalisatrices de puissance, mais pour s'extirper du champ des possibles conflits avec Israël. C'est ce qu'on peut appeler casser les tabous qui maintiennent la politique extérieure en otage. Le premier de ces tabous a été cassé par l'Egypte lorsque le président Sadate s'était rendu à la Knesset. Le deuxième l'a été par le même pays avec la politique de l'«infitah» rejetée alors par nombre de pays arabes qui l'adoptent aujourd'hui. Une nouvelle situation est née ou plutôt confirmée du fait qu'Israël soit en guerre non pas contre des Etats, mais contre des mouvements politico-militaires dit de résistance qui ont eu à supporter tout seuls le poids de celle-ci. Décalage entre les autorités et ces mouvements? Une nouvelle donne géopolitique avec une nouvelle donne militaire? Un nouvel ordre politique régional avec un nouvel ordre distributif de puissance militaire dans la région? Une nouvelle configuration politique qui consacre la réalité militaire, avec des pays arabes qui mettent en œuvre des politiques destinées à mettre leur sécurité à l'abris de toute menace tandis qu'Israël assoit sa politique arabe sur l'expression de puissance? Le désengagement pratiquement définitif du monde arabe de la guerre contre Israël a déstabilisé les stratégies palestiniennes mais a d'abord provoqué la remise en cause des anciennes certitudes et des anciennes illusions. Le monde arabe devait initialement «libérer» la Palestine, toute la Palestine, et n'avait pas «pensé» à désengager administrativement l'Egypte de la bande de Ghaza et la Jordanie de la Cisjordanie pour les remettre aux Palestiniens. Les camps des réfugiés Palestiniens de 1948 installés à Ghaza étaient demeurés des camps même lors de la guerre dite des six jours de 1967, attendant que les pays arabes remportent enfin cette guerre qui leur permettra de rentrer chez eux. Il semble donc se confirmer qu'est consommée la fin de la confrontation militaire arabe avec Israël, ce qui explique que dans les questions liées à la Palestine, ce sont les ministres arabes des AE qui se réunissent pour un plan commun, et pas ceux de la Défense. Il faudrait bien cependant reconnaitre que les pays arabes tous ensembles seront empêchés de construire une entité soudée capable de disposer d'une politique commune sur les plans des relations internationales, de la défense, et même sur le plan intérieur, et qu'ils seront même empêchés de réussir un vrai processus de démocratisation.