- Pouvez-vous nous dire depuis quand existe votre fédération et quels sont les objectifs que s'est assignés votre fédération avec sa constitution? - Notre fédération est née officiellement le 11 mai 1998. En fait, la création de l'actuelle Fédération nationale des agences immobilières (l'ex-Union nationale des agences immobilières) est partie d'Oran. L'idée de fonder une association à caractère professionnel est venue répondre à la nécessité de faire connaître notre métier, de consolider nos rangs, pour moraliser notre activité et essayer de réglementer notre profession et lutter contre le courtier, véritable ennemi de l'activité. Nous avons donc créé cette Union avec 63 membres fondateurs -dont une douzaine d'Oran- représentant 13 wilayas du pays. Nous sommes aujourd'hui 1.715 adhérents à la Fédération. Voici la nécessité première et les objectifs fondamentaux mis en place. Par la suite la situation a évoluée et le métier lui-même a évolué, et l'ouverture du marché national aux étrangers donc il fallait nous adapter à la nouvelle situation économique. Nous devenons de véritables partenaires et des opérateurs dans le secteur de l'immobilier. Que signifie la moralisation de la profession? D'abord il faut que l'agent immobilier vienne vers cette profession convaincu qu'il s'agit d'un gagne-pain honnête. Nous avons créé un cadre moral: nos adhérents prêtent serment en présence d'huissier; ils jurent devant Dieu et devant l'assistance qu'ils défendront les intérêts de leurs clients. C'est déjà un premier niveau. - Vos adhérents sont donc des agents assermentés? - Quand un agent immobilier est assermenté nous lui attribuons le logo de la Fédération et lui délivrons une carte professionnelle de la FNAI. Et il est fait obligation à l'agent assermenté d'afficher la prestation du serment dans son bureau, d'afficher le barème des honoraires et d'utiliser l'écrit dans toute transaction avec ses clients. Ce qui réduit les écarts et les incompréhensions. - Jusqu'à quel point la FNAI peut-être considérée comme un recours si un client de l'un de vos adhérents se sent lésé? - A travers toutes nos communications, nous mentionnons de la manière la plus claire l'adresse de la FNAI pour permettre à nos clients de nous saisir directement. Lorsqu'un citoyen a un problème et veut nous saisir, il doit le faire par écrit. Il doit apporter la preuve de ce qu'il dit. Notre première question est de savoir si le client est lié contractuellement à l'agent immobilier, faute de quoi nous ne pouvons pas intervenir. Nous suggérons aussi à nos adhérents de mentionner au verso de leurs cartes de visite les conditions de relations avec la clientèle. Lorsqu'un client s'adresse à un adhérent de la FNAI, la première des choses est l'établissement d'un mandat. Pour la simple raison que l'agent immobilier ne peut vendre l'appartement d'un client s'il n'est pas mandaté. Ce mandat fixe les droits et obligations de chacune des deux parties, l'agent immobilier et le citoyen. Ce qui réduit au maximum les problèmes. - Est-ce que le client est indemnisé si sa plainte est fondée? - Quand le citoyen s'dresse à nous et que nous constatons qu'il a raison, nous invitons les deux parties à donner leurs versions respectives et essayons de trouver le juste milieu. Très souvent, pour préserver notre honorabilité, nous demandons à l'agent immobilier de faire un geste supplémentaire. Donc c'est lui qui débourse alors qu'il n'a pas à le faire. Nous l'avons fait un certain nombre de fois. Mais dans 85% des cas des gens qui s'adressent à nous, quand nous leur demandons de nous communiquer l'adresse de l'agent immobilier, ils ne le font pas. Parce que très souvent le client lui-même ne distingue pas entre l'agent immobilier adhérent à notre fédération et l'agent non adhérent et le courtier. Chaque fois qu'un citoyen s'est adressé à nous, nous avons réglé le problème. Et quand l'agent immobilier refuse notre concours nous délivrons au client une attestation qui prouve -aux yeux de la loi- qu'il a raison pour qu'il puisse se défendre. Parce qu'on ne peut pas moraliser l'activité si on ne défend pas la profession avant les individus. - Pour beaucoup d'opérateurs et responsables, votre Fédération est aujourd'hui un partenaire incontournable des pouvoirs publics dans la politique nationale du logement. Qu'est-ce que la FNAI a apporté dans ce cadre précisément? - Nous disons toujours que nous sommes une entité d'intérêt public en dehors du fait que nous gagnons honnêtement notre pain. Malheureusement, à toutes nos interventions, l'Etat ne nous a pas écoutés à 20% et continue à faire certaines erreurs sans nous écouter. Et quant nous apportons certaines corrections et que l'Etat prend des dispositions, personne ne dit que c'est grâce à la FNAI. Nous ne demandons pas qu'on nous jette des fleurs, mais notre satisfaction c'est de voir notre métier se développer, le citoyen se rapprocher davantage des agences immobilières. Nous avons également la satisfaction d'exercer notre travail convenablement en donnant l'information utile et nécessaire à l'Etat. Et si aujourd'hui il y a un rabais de la fiscalité c'est bien grâce à la FNAI même si personne ne le dit. Nous avons des écrits ou nous avons expliqué au ministère des Finances le pourquoi de la sous-déclaration et les raisons qui la motivent. Je le dit clairement, le citoyen n'aime pas être arnaqué par l'Etat. Le citoyen accepte de payer l'impôt mais l'impôt nécessaire, pas le sur-impôt. Nous sommes très respectueux de la force légale de l'Etat mais je le déclare en toute responsabilité, si l'Etat voudrait bien nous écouter, 80% des contentieux seront réglés et vous verrez moins de citoyens aller vers les tribunaux. Lorsqu'il y a eu les manifestations de contestation à Sidi Bel-Abbès, après la distribution des logements sociaux, j'avais saisi le Président de la République, le Premier ministre, le ministre de l'Habitat et le Wali de Sidi Bel-Abbès de l'époque. Je leur avais expliqué pourquoi ces gens ont manifesté avec un tableau comparatif qui montre qu'entre ce que dit le décret et la réalité du terrain, il y un grand écart. Comment d'un côté considérer que le chômeur à l'époque totalisait 90 points et le fonctionnaire ou l'employé n'avaient que 20 points? Donc, fatalement, il y avait une volonté d'attribuer le logement au chômeur. Pourquoi voulez-vous donner 30 points au moudjahid? Je suis moudjahid et je suis à l'aise de le dire tout haut. Etre moudjahid n'est pas synonyme de besoin de logement. Nous avons dit à l'époque qu'il fallait créer le fichier national du logement assisté selon notre approche. Mais le fichier national a été créé de manière administrative et n'apporte aucune information. Nous avons dit que pour mettre fin à ce racket du logement, il fallait mentionner l'attribution dans la commune de naissance du bénéficiaire de la même manière que le mariage. Et quand un citoyen postule à un logement, il doit présenter dans sa demande un négatif. Là oui, c'est un contrôle et il n'y a pas de possibilité de fraude. - Et qu'avez-vous préconisé comme démarche pour réglementer votre profession? - Dans notre démarche de réglementation de la profession, nous avons demandé, selon notre conception –je dis bien selon notre conception-, une caution de garantie. Or l'Etat a sorti une caution de garantie selon sa conception. - Quelle est la différence entre les deux conceptions? - Dans notre proposition de caution de garantie, l'argent appartient à l'agent immobilier. Ce qui doit permettre aux agents immobiliers -adhérents ou non adhérents de la FNAI- de créer une mutuelle de garantie qui doit rembourser le client victime avec preuves d'un agent immobilier indélicat, et poursuivre ce dernier. C'est rapide et efficace. Avec notre projet de mutuelle, le client qui veut louer un logement ou un local n'a pas à payer une année d'avance, mais c'est la mutuelle qui assure la garantie du payement au propriétaire. Es-ce que là ce n'est pas une contribution directe? - Selon certains, la FNAI a été sollicité pour son expérience et sa connaissance de la question du logement par des opérateurs étrangers travaillants en Algérie? - Il y a un peu plus d'une année, les Coréens sont venus vers nous et nous ont demandé quel type de logements l'algérien désire. S'ils sont venus vers nous, c'est qu'ils n'ont pas trouvé l'information ailleurs. La Banque mondiale aussi est venue vers nous il y a huit ans pour demander notre avis. Elle sait que nous sommes les plus près du terrain et que donc nous connaissons sa réalité. Tout le monde sait que le citoyen ne donne pas l'information à l'Etat. A ce titre prenez les statistiques du dernier recensement, il n'y a pas de crise de logement, il y a même un excédent de logements. Cela veut dire que les statistiques sont mal faites. Alors pourquoi ne pas laisser la fédération se développer et l'aider pour devenir un support d'informations à l'administration? - Parmi vos principales revendications, le passage obligé pour chaque transaction immobilière à l'agent immobilier. Serait-ce une atteinte à la liberté individuelle? - Non. Le passage par une agence immobilière n'est pas une atteinte à la liberté. Cela est nécessaire pour une maîtrise de l'information et donc du coût. Vous êtes un client et vous me proposer de vendre votre bien, si le prix demandé est élevé, je vous dis «non monsieur, je ne vends pas votre logement à ce prix». Et donc sans attestation de l'agence immobilière, vous ne pouvez pas transcrire la vente de votre bien. A ce moment-là, nous pouvons maîtriser les coûts. J'étais directeur général d'entreprise publique de bâtiment et je sais comment on calcule les coûts. Certains responsables estiment le prix du mètre carré à 27.000 DA… Sur quelle base? Sur quelle base on réalise 1000 logements? Prenez par exemple les assurances, prenez les banques, les experts, les architectes et les agences immobilières, nous avons cinq approches différentes de calcul du coût du mètre carré. Si l'écart était de 05% c'est à limite bon mais quand ça dépasse 30% c'est grave... - Mais quelle est la décision majeure à prendre immédiatement? - Nous avons demandé au président de la République de créer une «Maison de l'habitat». Une structure qui permettra au principaux concernés de donner leurs avis et participer à la réalisation du projet du logement, du concepteur de l'idée jusqu'au locataire. Et la discussion sur la question du logement est permanente et non pas des réunions ponctuelles à l'issue desquelles plus personne ne se manifeste. La création de la «Maison de l'Habitat» est une mesure urgente. Pour le moment, nous donnons notre avis, les responsables en font ce qu'ils veulent. Je dois juste signaler que, dans certains pays européens, aucune décision concernant la question du logement n'est prise sans les fédérations des agences immobilières. Entretien réalisé par Sahla Sid'Ahmed