Après une période d'accalmie, l'initiative des députés FLN et des partis islamistes –le projet de loi criminalisant le colonialisme- revient brusquement sur le devant de la scène politique. Et pour cause, le délai de réponse du gouvernement expirera demain. Remise le 28 février dernier, la proposition doit en effet avoir réponse deux mois après, selon le règlement intérieur de l'APN. Quelle sera la réponse du gouvernement? Difficile d'y répondre, eu égard au caractère hypersensible de l'initiative qui pose, en fond, toute la problématique des relations algéro-françaises, au moment justement où elles se trouvent au creux de la vague. Abdelaziz Ziari, président de l'Assemblée, qui sait bien de quoi il retourne, a déjà pris les devants en assurant que «l'adoption du projet dépendra de la circonstance et de la conjoncture dans lesquelles nous serons à ce moment-là. Le gouvernement dispose de deux mois pour répondre positivement ou négativement (…) sa marge d'appréciation est importante». Comprendre que rien n'est acquis. Ce que semble bien confirmer Moussa Abdi, le député qui est à l'origine de cette initiative, la seule d'ailleurs que les députés ont eu à prendre, depuis bien des législatures. «Je n'ai reçu aucune réponse» a-t-il répondu à une question de TSA. Les députés, initiateurs du projet, ont lancé une mise en garde dans le cas d'une réponse négative. Ainsi, Mohamed Hadbi, député Nahda, a déclaré hier que les signataires du projet sont en train de préparer des initiatives et des actions politiques sur le terrain, en réaction à un éventuel rejet du projet. Un député, cité hier par le quotidien Al Khabar, fait état d'échos selon lesquels «le gouvernement s'oriente vers le rejet du projet et demanderait en revanche au Bureau de l'Assemblée de le retirer». Le motif que le gouvernement mettrait en avant pour justifier le rejet est que «la politique extérieure est du domaine exclusif du président de la République». Même position de la part des députés MSP, à en croire Abdelaziz Belkaïd qui assure que le groupe parlementaire apporterait son soutien aux signataires du projet quelle que soit la réponse du gouvernement. Dimanche, la fondation du 8-Mai-1945 s'est fondue d'un communiqué dans lequel elle ordonnait presque au Gouvernement de dire «oui», sous peine d'être accusé d'antipatriotisme. La montée au créneau simultanée des députés et de la Fondation, créée par feu Bachir Boumaâza, à la veille de l'expiration du délai, n'est pas fortuite. En cas de réponse négative, c'est Ouyahia qui va, bien sûr, se retrouver sous le feu des critiques, d'autant plus qu'il ne s'était pas gardé, dans une de ses conférences de presse, de dire tout le «bien» qu'il pensait de cette initiative. Tout le monde, cependant, sait que la réponse est du ressort exclusif du président Bouteflika. En acquiesçant, il ne manquerait pas de compromettre davantage les maigres perspectives d'apaisement avec la France. En fait, le Président voudrait adopter une démarche plus globale en associant, dans le cadre d'un même front, toutes les anciennes colonies de la France pour exiger réparation. Ce qui semble relever de l'utopie, sachant que la plupart de ces colonies se font dicter leur politique par l'Elysée. Quant au Vietnam, dont le président était à Alger la semaine dernière, il ne donnait pas l'impression d'être emballé par le projet, demandant un temps de réflexion avant de trancher.