Les partisans, en général francophones, de l'utilisation de darija (ou darja) et leurs adversaires, en général arabophones, ont été également surpris par la position exprimée par Mme Malika Greffou, sur la polémique en cours sur l'utilisation des langues maternelles. Greffou, une pionnière dans la création des écoles privées est intervenue, il y a trois jours, dans un forum du journal El-Hiwar, a été particulièrement critique à l'égard des mesures annoncées par le département de Mme Nouria Benghebrit. Selon elle, le projet d'enseigner la langue darija, est un vieux projet colonial. La ministre, a-t-elle indiqué, selon le récit qu'en fait le journal El Hiwar “est là uniquement pour exécuter les ordres d'inspecteurs qui tiennent les rênes du ministère”. Langue “créole” Selon Mme Greffou, il y a une tentative d'imposer une forme de langue “créole” et s'est étonnée de voir ceux qui se proclament “défenseurs de l'arabité et de l'islam” applaudir ce genre de projets au niveau du parlement. Ce sont des projets “qui en apparence se proclament au service de la culture arabe mais qui dans les faits aliènent la société à commencer par les plus petits”. Dans l'extrait de vidéo, ci-contre, elle souligne qu'une “multinationale” qu'elle ne nomme pas a pris une grande emprise en Algérie au point de peser sur le sens de la réforme. C'est une multinationale à qui “on a ouvert les portes” et qui a fixé les “normes du livre pour enfants. ” Les éditeurs qui refusent de suivre ces normes sont soumis à une véritable exclusion, a-t-elle affirmé. “Ces normes progressent, progressent, et l'arabe recule, recule… Jusqu'à ce qu'elles (les normes) pénètrent au parlement où elles ont été applaudies par ceux qui se disent les défenseurs de l'arabité et de l'islam”. Mme Greffou a parlé ensuite en tant que membre du syndicat des éditeurs. “A cette conférence de l'éducation nationale, les éditeurs qui appliquent les normes étaient bien présents. Ceux qui étaient contre, comme nous, ont été exclus de participation à cette conférence”.Ce projet sur le livre va arriver au sénat et il va probablement passer, selon elle. “Nous sommes aujourd'hui comme si le piège s'est totalement refermé sur nous”. Bête-noire des conservateurs Auteure d'un livre très polémique, intitulé “L'école algérienne de Benbadis à Pavlov”, paru chez Laphomic en 1989, Malika Greffou a été une bête-noire des conservateurs du secteur de l'éducation dont elle dénonçait les méthodes qui ont conduit, selon elle, à une acculturation des élèves qui au lieu d'apprendre était soumis à un travail de conditionnement. La méthode d'enseignement pratiquée en Algérie s'inspire, selon elle de la méthode Assimil qui gavent les élèves au lieu de les amener à bien penser. “L'introduction de la méthodologie structuraliste et pavlovienne est un coup porté à notre patrimoine, un coup porté au terroir” écrivait dans ce livre celle qui a été classée “femme de l'année” en 1989 par le journal Horizons. Malika Greffou aboutissait à cette conclusion qui mettait en furie les responsables du secteur de l'éducation : Ben Badis, sans avoir les moyens d'un Etat, a créé une école qui prodiguait un enseignement de meilleure qualité que l'école de l'Algérie indépendante. D'où le titre du brulot, “L'école algérienne de Benbadis à Pavlov”. A l'évidence, Mme Greffou est loin de la réconciliation avec les inspecteurs qui contrôlent, selon elle, le système éducatif. Hebba Selim HuffPost Algérie