Des représentants de musulmans de France, des personnalités et des élus ont exprimé, jeudi à Paris, leur "indignation" par la tournure que prend le débat sur l'Islam, avant son lancement officiel le 5 avril par le parti présidentiel, l'UMP. Réunis à la Grande mosquée de Paris, une vingtaine d'associations, des personnalités et des élus de Droite et de Gauche, venus de toutes les régions de l'Hexagone, ont dénoncé les "atteintes intolérables à la dignité de l'Islam en France notamment dans le déroulement solennel de la prière du vendredi et l'atteinte à la liberté du culte musulman contraire à la loi de 1905" sur la laïcité. Le recteur de la Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, a affirmé que tous ceux qui ont parlé de "francisation" de la langue sacrée de l'Islam "doivent savoir que les musulmans pratiquent leur culte comme la religion le leur demande, à savoir en arabe classique, langue de la révélation du Saint Coran". Le conseiller à l'Elysée, chargé de l'intégration, Abderrahmane Dahmane, a souligné, de son côté, la tenue de cette réunion en un lieu qui symbolise "l'islam de France" et l'histoire des musulmans qui sont morts durant les deux guerres mondiales pour la France."Hier, l'islam était bon pour ces musulmans qui ont sauvegardé la République et ses valeurs, mais aujourd'hui cet islam est montré du doigt. Nous ne sommes pas d'accord et sommes là pour soutenir notre communauté et n'avons pas l'intention de jouer le jeu ni de Copé, ni d'un autre", a-t-il rétorqué. Le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, avait fait récemment des déclarations sur le "prêche musulman en Français", suscitant un tollé tant du côté des associations cultuelles que de la classe politique. M. Dahmane a appelé, à cette occasion, l'ensemble des musulmans "dignes" et "fiers" à "ne plus renouveler leur adhésion à l'UMP tant que ce débat est maintenu". "L'UMP de Copé c'est la peste pour les musulmans", a-t-il lâché. Pour le président Collectif Banlieues Respect, Hassen Benbarak, le débat lancé par le parti de la majorité, vu son impact sur la communauté musulmane, est de "trop". "Nous disons ça suffit, parce qu'à chaque fois qu'il y a un débat, dans ce pays, ça aboutit à une loi contre les musulmans", a-t-il regretté. Le membre associatif a plaidé, à cette occasion, pour l'élaboration d'une "plate-forme" associant les organisations de banlieues, les représentants des musulmans de France, les élus, pour mettre en place des "actions de lutte contre la stigmatisation des musulmans". Mettant à profit cette réunion, le président de la fédération régionale du sud-ouest de la Grande Mosquée de Paris, Abdellah Zekri, a tout bonnement déchiré sa carte de militant UMP au sein du département du Gard. Pour lui, le discours de Copé est "démagogique, car il met en danger la cohésion nationale, montant les uns contre les autres". M. Zekri a appelé à manifester sur le lieu où se tiendra le débat sur l'islam, le 5 avril. Au terme de cette rencontre, les participants ont lancé un ''appel pour la dignité de l'Islam en France", dans lequel ils mettent en garde les "apprentis islamologues contre toute ingérence dans un domaine qui leur est totalement étranger, en particulier celui de la théologie musulmane qui ne les concerne pas". Les auteurs de la déclaration, rendue publique, rappellent que la citoyenneté des musulmans en France est fondée sur le sacrifice de centaines de milliers de leurs morts pour la Nation et pour la défense de ses valeurs dont la laïcité et la liberté de conscience. Les initiateurs de l'appel, dont la Fédération nationale de la Grande mosquée de Paris, le Conseil des démocrates musulmans de France et le Collectif Banlieues Respect, appellent tous les musulmans à "se mobiliser pour la dignité de l'Islam de France et contre l'islamophobie ambiante, la stigmatisation et l'utilisation abusive de l'islam comme bouc émissaire des difficultés d'un autre ordre". Dans une première réaction le 4 mars, le recteur de la Grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, avait déclaré que la Khutba (prêche) fait partie intégrante de la liturgie solennelle musulmane en langue arabe (langue du Coran) le jour du vendredi dans les mosquées, affirmant être "étonné" par les déclarations de Copé.