Le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, a prononcé, samedi à Tlemcen à l'ouverture officielle de la manifestation "Tlemcen, capitale de la culture islamique", un discours dont voici le texte intégral: "Mesdames et Messieurs, L'Algérie est fière que vous ayez choisi de retenir la ville de Tlemcen comme capitale de la culture islamique pour l'année 2011. Cette cité à l'histoire très riche recèle une multitude de trésors artistiques et culturels, elle a donné naissance à de nombreux penseurs, hommes de religion, philosophes, poètes et musiciens. Je remercie pour ce choix l'ensemble des pays islamiques ainsi que l'ISESCO et à sa tête le Dr Abdelaziz Touidjri, qui ont ainsi honoré le peuple algérien et l'une de ses cités historiques. Vous pourrez apprécier tout au long de cette année, la place que tient la culture dans le coeur du peuple algérien et la déférence qu'il témoigne aux hommes et aux femmes de culture dans tous les domaines de leur créativité. A travers les semaines culturelles qui seront organisées à Tlemcen et dans d'autres villes du pays, les Algériennes et les Algériens pourront prendre plaisir à apprécier les cultures des autres pays musulmans dans leurs immenses richesses et leur grande diversité. Venant d'Afrique, d'Asie, d'Europe et d'Amérique, elles offriront à l'Algérie la meilleure image de la culture islamique que vos peuples, depuis l'avènement du message coranique, en intégrant des cultures antérieures, ont su construire, élaborer, créer dans un humanisme toujours renouvelé, montrant par là que la culture est ce qui intègre et ce qui s'intègre. La mise en symbiose de tous les génies, de tous les talents, de toute la création culturelle, artistique et scientifique des peuples musulmans nous permettra de participer de manière significative à l'approfondissement de la diversité culturelle de l'humanité. Mesdames et Messieurs, Le pays et la ville qui vous accueillent aujourd'hui sont fiers de leurs aïeux et de leur contribution à l'élaboration des savoirs et de la culture islamiques. Très tôt, de nombreuses cités algériennes ont connu un rayonnement amplifié par l'arrivée de l'islam. Ainsi, Constantine, Béjaïa, Alger, qalaât Beni Hammad, Ghardaïa, Adrar ainsi que Tlemcen, pour ne citer que celles-là, ont constitué des lieux favorables pour le développement des sciences, du savoir et de l'enseignement, en même temps que l'entretien des relations entre elles, le déploiement du commerce national et international, allaient permettre des échanges féconds. Tlemcen a su développer et entretenir de nombreux métiers d'art dont le raffinement prouve la grande maîtrise de ses artisans. Ce raffinement se retrouve dans la pratique musicale, partie du Maghreb et revenue d'El Andalous, dans laquelle se révèlent les talents de cette société du plus haut niveau culturel et de compagnie fort agréable. Ces héritages très anciens sont encore pratiqués dans tout le Maghreb et même au-delà, ils continuent à alimenter la création musicale nationale contemporaine, constituant ainsi le plus bel exemple de patrimoine-source nourrissant la création vivante. Mesdames et Messieurs, Les programmes culturels, artistiques et scientifiques qui ont été élaborés avec votre concours visent à montrer au monde que la culture islamique a su, tout au long des siècles et partout où elle s'est déployée, intégrer les autres cultures dans leurs aspects les plus avancés. Ces programmes visent également à mettre en évidence la modernité de la culture islamique et à rappeler sa participation décisive à toutes les grandes inventions et innovations qui ont jalonné la marche en avant de l'humanité. Nos patrimoines culturels feront l'objet d'expositions mettant en exergue les monuments du passé, nos figures illustres ainsi que les productions littéraires ou scientifiques qui sont aujourd'hui partagés par le monde entier. L'humanisme musulman est en train de reconquérir la place qui a malheureusement cessé d'être la sienne, mis à mal qu'il était par les différents colonialismes qui lui ont réservé le sort que l'on sait et qui est fait de spoliations, d'aliénation, de dépersonnalisation et d'acculturation. Ces patrimoines font de nos peuples, les héritiers et les dépositaires d'une partie de la mémoire du monde. Ils disent le cheminement des nôtres, nos victoires et nos défaites. Tous ces monuments, ces cités, ces legs et héritages nous identifient, nous caractérisent et on fait de nous ce que nous sommes, c'est-à-dire des peuples qui plongent profondément leurs racines dans l'histoire des cultures humaines. Les colloques scientifiques internationaux de haut niveau qui seront organisés à l'occasion de cette année permettront à la communauté scientifique des pays d'Islam d'ailleurs de faire le point des connaissances sur de nombreux sujets portant sur la culture, l'Histoire et les avancées de nos peuples. Mesdames et Messieurs, Nous croyons en l'unité de l'humanité, car si ses cultures sont nombreuses, diverses, variées et toutes aussi respectables les unes que les autres, il n'en demeure pas moins qu'il n'existe une civilisation mondiale qui englobe toutes ces cultures. Nous sommes adeptes du dialogue, de l'échange, du partage entre les cultures car c'est à cela que nous convie le message adressé à l'humanité entière par le Saint Coran: "Nous avons fait de vous des peuples et des tribus pour que vous vous connaissiez". Cette année de la culture islamique permettra une meilleure connaissance de l'Islam par les occidentaux en même temps qu'une plus grande compréhension entre les peuples. Notre devoir est d'œuvrer solidairement, non pas à l'instauration de la confrontation et de la rupture, mais à la construction des consensus, des dialogues, des échanges fondant la grande réconciliation des cultures humaines. L'adaptation de notre culture à la mondialisation constitue un défi qu'il nous appartient de relever. Cette modernisation, plus indispensable maintenant que jamais, doit se faire dans le respect de notre personnalité et de nos valeurs. A l'occasion de cette année, nous dirons au monde que nous n'entendons rien renier de notre foi, de nos convictions, de nos façons d'être, mais sans nous attarder sur le bord du chemin à regarder le temps qui passe. La modernité c'est aussi nous, nos rythmes, nos chants, nos contes, nos livres, nos films, notre théâtre, notre créativité, notre talent. Nos âges d'or, nous voulons les conjuguer au présent car la civilisation humaine ne peut se passer de nos gisements de spiritualité, de culture, d'histoire et d'imaginaire. Nos âges d'or ne se contentent plus d'être évoqués, ils veulent se succéder, se poursuivre, se frayer leurs chemins dans le présent, continuer leurs routes en tant que viatiques indispensables à la montée de la sève des générations. Nous voulons éclairer avec les lumières du passé, car nous savons parfaitement qu'il ne suffit pas d'être le contemporain du monde pour être moderne. Tout comme je voudrais rappeler que nos créations témoignent par leur qualité, leur étendue et leur raffinement à la fois de la sensibilité de nos créateurs et de la liberté qui leur est laissée de l'exprimer dans leurs productions. Le rôle de chacun de nos Etats est d'impulser, d'administrer, d'encourager, de donner des moyens, de créer des environnements, de tracer et de mettre en oeuvre des politiques culturelles. C'est bien ce que l'Etat algérien s'emploie à faire en ouvrant grandes les portes aux talents, en exprimant de la reconnaissance aux créateurs, en réalisant des mises en relations fécondes et en mettant à la dispositions de la création, de la pensée, de l'art, de l'innovation, les moyens nécessaires à l'éclosion du génie de notre peuple et l'épanouissement de son talent. Mesdames et Messieurs, Le monde musulman fait face aujourd'hui à de nombreux obstacles qui peuvent contrarier sa réalisation comme sphère culturelle stable susceptible de compter dans le concert des nations. Cette situation appelle de notre part une solidarité plus active et la densification de nos réseaux de coopération. Cet événement de "Tlemcen, capitale de la culture islamique" constitue un acte important pouvant nous permettre de mesurer la fécondité de notre culture, ses capacité d'innovation ainsi que sa force de propositions. Il nous faut bien sûr rechercher, étudier, écrire, mettre en valeur nos patrimoines, car il s'agit là, plus que d'une tâche noble et exaltante, d'un devoir non pas seulement vis-à-vis de nos ancêtres qui, eux, ont assumé le leur, mais surtout vis-à-vis de nos enfants. Car si ce passé, cette histoire, ces patrimoines doivent être utilisés, c'est bien comme viatique et rampe de lancement vers le futur pour notre jeunesse. Je suis convaincu que nul développement durable ne peut se concevoir sans qu'il ne se donne comme cible et moyen l'être humain. Nous voulons que la présente manifestation "Tlemcen, capitale de la culture islamique", soit à la hauteur qui sied à notre culture et à notre civilisation. C'est dans cet esprit et avec le plus grand optimisme que je la déclare ouverte. Je vous remercie.