ALGER - Le Congrès international des victimes du terrorisme, qui se tiendra à compter de jeudi à Paris, entretient "l'amalgame" entre le terrorisme et le droit des peuples à lutter pour leur autodétermination, a estimé mercredi à Alger la militante algérienne pour les droits des victimes du terrorisme, Saida Benhabyles. "J'ai refusé de prendre part à ce congrès pour des raisons liées au fait que ce congrès se tient sur la base de la définition de l'Union européenne qui fait l'amalgame entre le terrorisme et le droit des peuples à se défendre et à lutter pour leur autodétermination et leur liberté", a affirmé Mme Benhabyles dans une déclaration à l'APS. Les organisateurs de ce congrès, a-t-elle poursuivi, sont partis "très loin" en invitant une victime civile de guerre blessée dans l'attentat organisé par le Front de libération nationale (FLN) au Milk Bar d'Alger en 1956, pendant la guerre de libération nationale, "en qualité de victime du terrorisme". "Lors de la discussion que j'ai eu avec le directeur général de l'Association française des victimes du terrorisme (AFVT), M. Guillaume Denoix de Saint Marc, je lui ai demandé s'il considérait le héros français contre le nazisme Jean Moulin comme un terroriste", a indiqué la lauréate en 2001 du prix des Nations unies pour la société civile obtenu pour son engagement dans la lutte antiterroriste en Algérie. Mme Benhabyles a lancé, dans ce cadre, un appel pour arrêter une définition définitive du terrorisme, sous l'égide de l'Onu, pour mettre un terme à ce genre d'amalgame. En sa qualité de membre fondateur du Centre international de recherche et d'étude sur le terrorisme et d'aide aux victimes du terrorisme basé à Paris, elle a souligné "la nécessité d'une solidarité internationale plus effective envers des victimes du terrorisme". Elle a proposé, à ce sujet, la création d'un fonds international d'aide aux victimes du terrorisme, sous l'égide de l'Onu, afin de soutenir, a-t-elle précisé, l'ensemble des victimes du terrorisme. Réagissant à la tenue de ce congrès, à travers une lettre ouverte adressée au directeur de l'AFVT, le président de l'Association nationale des anciens condamnés à mort, Mostefa Boudina, a relevé que ce congrès se base sur "une définition bien européenne du terrorisme, en sachant qu'elle est rejetée par l'écrasante majorité des peuples du monde". "Votre amalgame vise à remettre en cause le droit des peuples à la lutte armée pour le recouvrement de leur indépendance, avec l'arrière pensée de conforter les états colonialistes", a-t-il écrit dans la lettre qu'il a adressée à Guillaume Denoix de Saint Marc. M. Boudina s'est interrogé, à ce propos, sur les motivations qui ont poussé les organisateurs de ce congrès "à citer la guerre de libération de notre pays et à inviter une victime civile de la guerre" de libération nationale. C'est ainsi qu'il a qualifié l'invitation de cette victime civile de guerre de "manœuvre de plus, de provocation et de tentative de falsifier et de souiller l'histoire de la longue lutte du peuple algérien contre le colonialisme". Le président de l'Association nationale des anciens condamnés à mort a rappelé, à cette occasion, sa condamnation à mort par la justice française et son séjour durant 3 ans dans le couloir de la mort de la prison de Fort Mont-Luc de Lyon dans une cellule faisant face à la cellule dans laquelle avait séjourné, Jean Moulin, un responsable de la résistance française contre l'occupation allemande. C'est ce qui l'a amené à condamner, dans sa lettre, "tous ceux qui considèrent les combattants pour la libération de l'Algérie comme des terroristes". Il a considéré, à cet effet, que le congrès de Paris qui "se donne une dimension internationale est loin d'être rassembleur", allant, a-t-il expliqué, "à l'encontre de tous les efforts déployés, par l'Algérie, et beaucoup d'autres pays du monde, pour renforcer la solidarité agissante des peuples dans la lutte contre le terrorisme". "Pour toutes ces raisons, nous soutenons les associations algériennes qui ont décidé de boycotter ce congrès", a-t-il indiqué, appelant "les représentants des sociétés civiles maghrébine, africaine et arabe à réagir, de leur côté, à l'amalgame entretenu" entre le terrorisme et le droit des peuples à lutter pour leur autodétermination. Le VII ème Congrès international des victimes du terrorisme tiendra ses travaux à Paris à compter de ce jeudi.