ALGER - L'avocate et militante des droits de l'homme, Me Fatima-Zahra Benbrahem, a plaidé samedi à Alger pour un statut juridique de chouhada (martyrs) aux enfants assassinés lors des manifestations du 11 décembre 1960. "Je saisirai par correspondance le ministère des Moudjahidine pour qu'il se penche sur cette question car il est temps de rendre justice à ces enfants martyrs, morts pour le pays", a indiqué Me Benbrahem, lors d'une conférence de presse organisée au siège du journal El Moudjahid à l'occasion de la commémoration du 51e anniversaire des manifestations populaires historiques du 11 décembre 1960. Elle a expliqué qu'un statut juridique permettrait même aux enfants ayant survécu aux "tueries" de l'armée coloniale française de bénéficier de tous leurs droits, à l'exemple de l'octroi d'une pension. Me Benbrahem a également recommandé de recenser le nombre d'enfants morts lors de ces manifestations, entre les 10 et 13 décembre 1961, suggérant d'effectuer des déplacements aux cimetières et de se référer à l'état civil de l'époque. "Nous ne disposons pas de chiffres sur le nombre de morts, sachant que ce sont les enfants et les femmes qui étaient sortis en grand nombre pour manifester dans les rues", a-t-elle dit, proposant en outre d'ériger un monument à la mémoire de ces jeunes martyrs. Considérant que cette période de l'histoire de l'Algérie "n'est pas bien étudiée", Me Benbrahem a suggéré aux étudiants et autres chercheurs d'inscrire ce thème comme sujet de leurs thèses de fin d'études dans le but d'approfondir les recherches sur les manifestations du 11 décembre 1960. Me Benbrahem a fait remarquer que la répression sanglante des manifestations du 11 décembre étaient intervenues à la veille de la célébration de la convention des droits de l'homme et des citoyens, le 10 décembre de chaque année. Evoquant la portée de ces manifestations, Me Benbrahem a mis l'accent sur la "maturité politique" du peuple algérien et de sa jeunesse, rappelant qu'elles (manifestations) avaient été provoquées par une rixe entre des Français et des musulmans à Alger-centre. "Les Européens tiraient sur des jeunes qui manifestaient pacifiquement, d'où la propagation de la grogne qui avait atteint plusieurs quartiers d'Alger", a raconté Me Benbrahem, originaire du quartier Mohamed-Belouizdad (ex Belcourt) et ayant vécu ces événements alors qu'elle était âgée de 8 ans. Elle a notamment mis en relief la "grande conscience" des jeunes de l'époque, reflétée dans les slogans qu'ils scandaient : "Libérez Benbella", "Référendum sous contrôle des Nations unies", etc. Me Benbrahem a indiqué que ces slogans dénotaient l'adhésion "totale et spontanée" du peuple algérien à l'Armée de libération nationale (ALN), au Front de libération nationale (FLN) et au Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Elle a relevé que grâce à ces manifestations, qualifiée de "rébellion" par la France, la presse étrangère avait pu répercuter dans ses écrits les massacres perpétrés en Algérie par l'armée française mais aussi par des Européens civils.