ALGER - Le nouvel album de l'interprète de musique chaabi Sid Ali Dris est entièrement consacré au poète du melhoun Khaled El Mendassi à travers deux "qacidate" (longs poèmes) écrites au 19ème siècle, célébrant la beauté et la passion amoureuse. "Mekmoul Ezzine Ouel B'ha" (La divine beauté) et "Echemaa" (La chandelle), sont deux poésies inédites jamais interprétées par les chanteurs chaabi que Sid Ali Dris a choisies du diwan "El Kenz El Meknoune Fi El Ch'ir El Malhoune" de Kadi Mohamed, imprimé en 1910. Les deux poèmes décrivent les tourments de la passion face à la beauté de la bien-aimée qui devient pour le poète une source d'inspiration, mais aussi de trouble et de chagrin. Interprétée en "Byte ou syah" (façon propre au chaabi d'entrecouper le texte chanté, par l'introduction de préludes et en changeant de mode), la première qacida est un hymne à la beauté feminine. Elle se termine par un Khlass "Haramtou Bik Nou'assi". Dans ce nouvel opus, la voix de Sid Ali Dris, dont le timbre est étonnamment proche de la voix de l'un des maîtres du chaabi le regretté El Hadj El Hachemi Guerouabi, est chargée de trémolos, a su parfaitement traduire les états d'âme si bien décrits dans le poème. "Echemaa", la chandelle qui brûle, se veut, elle, une métaphore de la passion dévorante qui consume l'amoureux. L'album produit chez les éditions Dounia en collaboration avec l'établissement "Arts et culture" de la wilaya d'Alger comporte aussi une déclamation de deux poèmes, sur un fond musical. Khaled El Mendassi, de son vrai nom Belbey Khaled, est né en 1850 à Oued Sebbah, dans la grande plaine de Mleta. Dès son jeune âge, il apprend le Coran dans la zaouïa du cheikh Boutlelis dans la ville de Hammam Bou-Hadjar, avant de s'installer à Aïn-Témouchent où il se lie d'amitié avec le poète Hadj Kaddour Tahalaiti. En référence au grand poète du melhoun Said El-Mendassi qui a vécu au 17ème siècle, Il fut surnommé El-Mendassi Seghier. TROIS QUESTIONS A Sid Ali Dris ALGER - L'interprète du chaabi, Sid Ali Dris, revient, après une dizaine d'années passées loin des studios d'enregistrement, "mais près du public", avec un nouvel album de deux titres inédits puisés dans le répertoire du poète du 19ème siècle, Khaled El Mendassi. Question : Vous n'avez pas produit d'albums depuis près de dix années. Peut-on considérer ce quatrième album comme un come-back ? Réponse : C'est vrai que ça fait une dizaine d'années que je n'ai pas produit d'albums, mais ce nouveau CD n'est pas un come-back, car, pour moi, je suis toujours présent sur la scène culturelle, je participe souvent à des manifestations artistiques et j'anime depuis près de seize années l'émission "El Kahwa Wel Lattey" sur les ondes de la chaîne III de la Radio algérienne, dédiée au chaabi, une musique que je pratique sans pour autant en être un spécialiste. Cet album, dont j'ai composé la musique, contient deux textes puisés dans le répertoire du poète du 19ème siècle, Khaled El Mendassi et que j'ai découverts parmi quatre-vingt textes du diwan de Kadi Mohamed, intitulé "El Kenz El Meknoune Fi El Ch'ir El Malhoune et imprimé en 1910. Les deux textes "Mekmoul Ezzine Ouel Bha" et "Echemaa" n'ont jamais été chantés auparavant. Question : Comment l'idée vous est-elle venue de chanter des textes inédits ? Réponse : Ce qui m'a incité à enregistrer ces deux textes, ce sont surtout les appréciations des connaisseurs lorsque je les ai interprétés pour la première dans une soirée organisée par l'Etablissement "Arts et culture" d'Alger. L'établissement organisait chaque mercredi une qa'ada chaabi (récital musical chaabi) et j'avais remarqué que les artistes qui passaient sur scène présentaient au public presque le même répertoire. Cette redondance m'a poussé à présenter quelque chose de nouveau. L'écho favorable que j'ai reçu des connaisseurs m'a décidé à enregistrer. Question : Chanter des textes inédits, est-ce un moyen de revivifier la musique chaabi et approcher le jeune public ? Réponse : Même s'il est difficile de trouver dans le répertoire chaabi des textes à la fois inédits et agréables pour les proposer au public, je crois que ce genre d'initiative pourrait contribuer à régénérer cette musique. D'ailleurs, le chaabi peut se régénérer de plusieurs manières, comme par exemple l'interprétation de textes écrits par des poètes contemporains ou, encore, par la chansonnette qui peut servir de relais au chaabi pour intéresser le jeune public au Q'cide ( poésies longues). A cet effet, les écoles et associations de musique andalouse, et même le Festival national de musique chaabi dédié à la découverte de jeunes talents dans toute l'Algérie, jouent un rôle non négligeable. Encore faut-il, pour que ces jeunes talents puissent percer et évoluer, des espaces d'expression qui, hélas, sont presque inexistants chez nous.