Le Forum France Algérie, un regroupement indépendant et apolitique de personnes et d'organisations souhaitant promouvoir la place des Franco-algériens dans la société française s'est s'insurgé vendredi contre "la vente ignoble" de la collection du bourreau Fernand Meyssonnier au profit de ses héritiers. Dans un communiqué, le forum rappelle que le 3 avril seront mis à l'encan les instruments de torture qui ont, entre autres, servi à supplicier les militants algériens de la guerre de libération nationale. "En cette année du cinquantenaire de l'indépendance, cette vente est d'autant plus déplacée qu'elle a atteint un niveau d'abjection rare", s'indigne le forum qui appelle à se joindre au rassemblement de protestation qui aura lieu le 3 avril à 18h devant l'hôtel Salomon de Rothschild, le jour de la vente. 350 objets composent cette collection "principalement dédiée aux objets destinés à infliger la peine de mort, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants", tels que des écrase mains des baignoires, des entraves et des cordes d''exécution, ayant appartenu à ce tortionnaire "ancien exécuteur en chef des arrêts criminels", décédé en 2008 et qui a procédé à quelque 200 exécutions en Algérie entre 1957 et 1962. "Cette liste n'est qu'une petite sélection sur plus de 800 objets proposés dans le catalogue de la vente. Elle montre le caractère odieux de cette proposition de vente aux enchères. Il n'est pas acceptable qu'il puisse exister un commerce, pour faire du profit avec de tels objets dont la famille de Meyssonnier espère +récolter+ au moins 200.000Ç de cette vente", commente Henri Pouillot, militant anticolonialiste. "Je dois dire, personnellement, ayant été confronté à la torture, en 1961-1962 au sein de la Villa Susini à Alger, pendant la Guerre d'Algérie, que je ne peux admettre une telle opération. Le traumatisme que je porte depuis cette période n'a jamais été guéri, je le vis comme un handicapé qui doit apprendre à vivre avec son infirmité. Alors, une telle opération est le ravivage terrible d'une plaie incicatrisable", a-t-il déclaré, Plusieurs associations de défense des droits de l'homme ont, de leur côté, dénoncé la future vente aux enchères de cette collection, critiquant une initiative "choquante, contraire à toute éthique et porte atteinte à la mémoire et à la dignité des victimes ayant subi des actes de torture". L'ACAT-France (Action française pour l'abolition de la torture), Amnesty international France, la Ligue des droits de l'homme, le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP), et l'association primo-Lévi, se sont opposés, après une réunion de coordination, dans un communiqué commun, à cette vente. Dénonçant "la commercialisation de la torture" ces associations interpellent le gouvernement pour que le contenu de cette collection "entre dans le patrimoine historique et non privé". "Ce qui nous choque, c'est que l'on continue de torturer dans un pays sur deux, c'est encore une pratique courante et ici en France, on fait commerce d'outils qui ont servi à torturer et à exécuter", a déclaré pour sa part la directrice de l'association Primo-Levi. "Ce n'est pas à l'honneur de la France et de ceux qui organisent la vente", a-t-elle dit, jugeant cette vente "extrêmement dégradante pour toutes les victimes de torture". Le Conseil des ventes volontaires (CVV) a pour sa part estimé que la vente aux enchères de ces instruments de tortures "n'était pas illégale". S'interrogeant sur le cadre juridique entourant cette vente et après avoir consulté les ministères de la Justice et de la Culture, le CVV a conclu qu'en droit français "rien n'interdit ce type de vente qui ne peut pas être déclarée illégale".