Les crises au Mali et en Guinée-Bissau sont au centre d'un sommet extraordinaire des dirigeants ouest-africains, jeudi à Dakar, pour tenter de trouver des solutions pouvant amener à une transition démocratique et un retour de l'ordre constitutionnel dans ces deux pays. Au cours du sommet, les dirigeants de la Communauté économique de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), vont synchroniser des réponses régionales aux situations prévalant après les coups d'Etat commis en Guinée Bissau et au Mali. En Guinée Bissau, confrontée à une situation fragile depuis le coup d'Etat du 12 avril contre le président intérimaire Raimundo Pereira, le groupe de contact des ministres des Affaires étrangères de la Cédéao et du commandement militaire de ce pays, ont échoué dans leur tentative de s'accorder sur un programme de transition de 12 mois négocié par la région, et qui comprend l'élection d'un nouveau président. Le sommet de Dakar va examiner les développements en Guinée-Bissau suite à l'échec du groupe de contact avec le commandement militaire sur cette question de transition, a indiqué la Cédéao dans un communiqué. L'Organisation ouest-africaine a accusé lundi leur chef, le général Antonio Indjai, d'avoir "refusé" les décisions ouest-africaines concernant la transition et l'envoi d'une force régionale, et annoncé des sanctions immédiates. La junte bissau-guinénne a affirmé qu'elle acceptait "toutes les exigences" de l'Afrique de l'Ouest sur le retour du pouvoir aux civils, à l'exception du rétablissement dans ses fonctions de M. Pereira. Au Mali, les auteurs du coup d'Etat du 22 mars à l'encontre du président Amadou Toumani Touré, ont envoyé une délégation mercredi à Ouagadougou, où elle a rencontré le médiateur et chef d'Etat burkinabè, Blaise Campaoré. La délégation du Comité national pour le redressement de la démocratie, de la restauration de l'Etat (CNRDRE, ex-junte), a exprimé au médiateur de la Cédéao "sa disponibilité au dialogue et son attachement au succès de la transition" dans le pays, qui connaît ces derniers jours un regain de violences ayant fait plusieurs morts. "Il n'y a pas de raison qu'on n'exprime pas de façon sincère nos sentiments et qu'on puisse retrouver la bonne voie", a déclaré Abdoulaye Makalou, porte-parole de la délégation du CNRDRE. Dirigé par le capitaine Amadou Haya Sanogo, le CNRDRE, qui a rejeté les précédentes décisions de la Cédéao, "est venu à Ouagadougou pour exprimer au président Compaoré sa disponibilité au dialogue et son attachement à la bonne marche du processus de transition", a affirmé M. Makalou. "La délégation (de l'ex-junte malienne) veut poser ses questions au médiateur Campaoré", a ajouté le porte-parole des ex-putschistes maliens. Pour le ministre burkinabé des Affaires étrangères et de la Coopération régionale, Djibril Bassolé, "l'essentiel est de sauver le dialogue et la concertation qui existent entre les deux parties signataires de l'Accord cadre qui sont d'une part le CNRDRE et d'autre part la médiation". "Nous avons eu à nous expliquer sur l'ensemble des décisions qui ont été prises par les chefs d'Etat et qui n'avaient que pour seul but de stabiliser les institutions républicaines au Mali, de les rendre aptes à coopérer efficacement avec la communauté internationale", a prévenu M. Bassolé. "Nous sommes au stade de voir comment nous allons, de la manière la plus efficace possible, conjuguer nos efforts pour faire face à l'essentiel", a-t-il souligné. Malgré la transition politique instaurée depuis fin avril grâce aux efforts de la Cédéao, le Mali connaît ces derniers jours un regain de tension avec des combats dans la capitale Bamako entre ex-putschistes et forces loyales au président renversé Amadou Toumani Touré, et qui ont fait au moins 22 morts et des dizaines de blessés. Ces nouvelles violences "ne remettent pas en cause" la transition en cours dans le pays, a assuré le CNRDRE lors de sa rencontre mercredi avec le médiateur de la Cédéao à Ouagadougou. Exacerbée par une rébellion dans le nord du pays, la crise que traverse le Mali depuis le coup d'Etat du 12 avril dernier constitue "une grave source de menace" pour l'Afrique de l'Ouest et toute la région, a averti le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest, Saïd Djinnit. "La situation au Mali, notamment celle qui prévaut dans le nord, constitue une source de grave menace pour le Mali d'abord, mais aussi pour l'Afrique de l'Ouest et toute la région de manière globale", a déclaré M. Djinnit, faisant état en outre de "graves préoccupations" au Mali "non seulement en raison du coup d'Etat, mais à cause de la rébellion qui sévit au nord et de la présence de groupes terroristes armés". "C'est vraiment préoccupant et des menaces pèsent sur le Sahel", a-t-il en outre averti, affirmant que les Nations unies vont "soutenir toutes les initiatives sous-régionales pour lutter contre les terroristes présents au nord du Mali". "Nous avons toujours privilégié le dialogue dans la recherche de solutions même avec la rébellion, mais en cas d'échec des négociations, la CEDEAO envisage de recourir à une force armée", a-t-il souligné.