La suppression de la subvention de l'Etat aux produits de large consommation n'est pas à l'ordre du jour et nécessite l'organisation et la mise en place des conditions de durabilité d'une telle décision, a indiqué samedi le ministre l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa. ''Il faut construire un système et créer des conditions qui vont garantir la durabilité de la décision à prendre'', a estimé le ministre en réponse à un avis exprimé par le président du Forum des Chefs d'entreprises (FCE), Réda Hamiani, relatif à son opposition à la subvention des produits de large consommation, comme le lait et les céréales. MM Benaïssa et Hamiani s'exprimaient lors d'une rencontre avec les opérateurs économiques en marge du Salon international de l'Elevage, du machinisme et de l'agroalimentaire (SIPSA-agrofood), ouvert samedi au palais des expositions de la Safex, à Alger. Le ministre a souligné que le soutien des produits de base comme le lait et le pain ''est avant tout un choix politique" qu'a pris l'Algérie au lendemain de son indépendance pour lutter contre la faim. Les disponibilités alimentaires étaient de 1.731 kilocalories/habitant/jour au lendemain de l'indépendance, soit en dessous du seuil de la famine limité par l'OMS et la FAO à 2100 Kcal. Aujourd'hui, l'Algérie a dépassé ce seuil en se mettant à 3193 kcal/habitant/jour, a rappelé M. Benaissa. ''Aujourd'hui, on repose la question autrement : supprimer ou cibler la subvention. Ce sont des sujets qui doivent être maîtrisés et évoluer dans le bon sens'', a précisé le ministre, soulignant que ''ce débat n'est pas idéologique, mais il s'agit d'un problème d'organisation et de création, d'abord, de filières durables''. Il a indiqué, par ailleurs, que l'Etat allait continuer à soutenir la production agricole comme cela se fait dans les autres pays. De son côté, le président du FCE a réaffirmé son opposition à ''la subvention'' accordée par l'Etat aux produits de large consommation comme le lait. ''Nous soutenons la politique agricole engagée par l'Etat et nous considérons que tout ce qui se fait comme accompagnement et aides pour augmenter l'offre va dans la bonne direction. Par contre, on est plus que réservé sur les subventions accordées aux produits'', a-t-il dit. M. Hamiani a cité l'exemple du lait pasteurisé et conditionné en sachets qui se vend à 25 DA/litre alors que son coût revient à 50 DA. Le bas prix de ce produit engendre toute sorte de détournements, selon lui. Pour obtenir le prix du lai administré à 25 DA, l'Etat achète la poudre au prix international équivalent à 320 ou 340 DA/kilogramme et il la vend aux transformateurs à 159 DA/kilogramme, sous condition que ce produit soit destiné uniquement à la production du LPC. Certains transformateurs utilisent cette poudre pour fabriquer d'autres produits laitiers dérivés, alors que d'autres quantités vont aux crémeries. ''Ce n'est pas l'Algérien qui profite de ce prix, puisque notre lait est acheminé vers des pays voisins, alors que la poudre subventionnée est utilisée dans la production des produits dérivés'', estime M. Hamiani. Dès lors, il a suggéré de trouver des mécanismes pour que ce soutien aille vers les gens à faible revenu. Abordant l'industrie agroalimentaire, le président du FCE estime que les produits transformés ''doivent être issus de nos vergers et nos terroirs. C'est comme ça qu'on va diminuer l'emprise de l'importation, qui coûte des milliards de dollars''. M. Hamiani a signé une convention de partenariat avec le président de la Fondation ''Filaha Innov'', organisatrice du SIPSA-agrofood, M. Bensemman, pour permettre aux deux parties d'opérer des rapprochements entre le monde agricole et les industriels membres du FCE. M. Benaïssa a relevé par ailleurs que l'industrie agroalimentaire devait s'impliquer dans la modernisation et le développement de l'agriculture. ''Il y a quelques années, l'industrie agroalimentaire s'approvisionnait à partir des marchés extérieurs. Aujourd'hui, cette industrie, qu'elle soit publique ou privée, a pris conscience que sa durabilité dépend de son implication dans la production nationale'', a-t-il soutenu. Après avoir visité les différents stands du salon, le ministre a relevé ''une véritable amélioration dans la maîtrise des techniques''. Il y a également, a-t-il ajouté, ''une demande qui s'exprime de la part des éleveurs et des opérateurs des différentes filières avec l'implication des jeune diplômés''. ''Ce sont des indicateurs importants qui laissent présager une meilleure professionnalisation aussi bien dans la sphère production que dans la valorisation. Cela veut dire que le renouveau dans les méthodes de travail et dans les mentalités est en train de s'installer'', a-t-il dit à la fin de sa visite.