60 ans après l'adoption de la convention relative au statut des réfugiés, ''discours trompeurs et pratiques des Etats de l'Union européenne (UE), vident de sa substance le droit d'asile'' , affirme Amnesty international France (AIF) dans un rapport rendu public mercredi soir. Présenté lors d'une conférence de presse, animée par la présidente d'AIF, Mme Geneviève Garrigos, ce rapport, intitulé ''Réfugiés, un scandale planétaire'', propose un état des lieux mondial sur cette question pour décrypter ces discours et comprendre les logiques étatiques à l'oeuvre. L'ONG souligne que 8,8 millions de réfugiés vivent dans leur région d'origine, alors que 8,5 millions sont accueillis par des pays en voie de développement, relevant que contrairement aux idées reçues, ce sont les pays en développement qui reçoivent la majorité des personnes en demande de protection. On précise aussi que 30% des réfugiés dans le monde vivent dans des camps, 7,2 millions sont réfugiés depuis plus de 5 ans et 845 000 personnes ont demandé l'asile dans le monde en 2010. ''Les Etats refusent trop souvent d'assumer leurs propres responsabilités et signent des accords de contrôle des migrations avec des Etats tiers et leur font jouer le rôle de garde-frontière'', constate le rapport qui observe aussi qu' ''aucune distinction n'est alors faite entre migrant et réfugié, qui sont refoulés vers le danger''. Certains Etats considèrent les demandeurs d'asile comme ''une menace'' pour la sécurité nationale. Ils sont de plus en plus considérés comme des migrants irréguliers indésirables. ''Cette suspicion entraîne une criminalisation des demandeurs d'asile et réfugiés lourde de conséquences : les procédures se durcissent, des mécanismes de sanction sont mis en place et le recours à la détention se généralise'', a souligné la présidente d'AIF, lors de la présentation du rapport. Citant le cas de la France, AIF relève que les obstacles que les réfugiés doivent surmonter pour accéder à une protection sont ''nombreux''. L'ONG dénonce ainsi un parcours '' semé d'embûches '' et déplore que les demandeurs d'asile soient placés en zone d'attente ''le temps d'un examen expéditif'' . En cas de rejet, ils ont 48 heures pour déposer un recours devant le tribunal administratif. Fuyant leurs pays, débarquant dans un autre qu'ils ne connaissent pas, le risque est grand dans ces conditions que des personnes ne parviennent pas à expliquer correctement en si peu de temps, les raisons de leur demande d'asile, relève AIF. L'ONG cite également les obstacles en préfecture, et dénonce le fait qu'il est déjà difficile d'obtenir un premier rendez-vous. Des personnes dorment devant les locaux, parfois plusieurs jours ou semaines pour y parvenir. Pendant tout ce temps, elles sont en situation irrégulière et peuvent être arrêtées et renvoyées à leurs pays, dénonce le rapport d'AIF. L'ONG, révèle aussi que l'examen des demandes est sommaire et qu'en 2011, environ 26% des demandes d'asile ont été examinées de manière ''accélérée'', soulignant que cette procédure décidée par les préfets rend possible le renvoi dans son pays d'une personne, même avant la fin de l'examen de sa demande par la Cour nationale du droit d'asile ''quelles que soient ses craintes''. Citant le cas des réfugiés en Libye, l'ONG indique qu'avant mars 2011, début des troubles dans ce pays, 1,5 à 2,5 millions d'étrangers vivaient en Libye. Parmi eux, 80 000 Soudanais, Somaliens, Erythréens, Ethiopiens, avaient déjà fui leur pays d'origine. ''Avec les hostilités, beaucoup ont dû prendre la route de l'exil pour la seconde fois''. AIF rappelle les chiffres du Haut-commissariat pour les réfugiés (HCR), selon lesquels, à la fin de 2011, 5 332 réfugiés étaient encore dans des camps en Egypte et en Tunisie. ''Moins de 10 Etats de l'Union européenne (UE) ont proposé de prendre en charge seulement quelques centaines de réfugiés. L'UE s'est illustrée par son défaut d'assistance en refusant de prendre en charge la protection de ces réfugiés'', déplore par ailleurs le rapport. Dressant un constat alarmant de l'asile dans l'UE, l'ONG indique qu'à l'arrivée des demandeurs d'asile ou en vue de leur expulsion, les Etats membres ont de plus en plus recours à la détention qui tend de plus en plus à s'allonger, ajoutant que les mineurs accompagnés ou non, les personnes victimes de torture ou ayant besoin de soin de santé particulier ne sont pas épargnés par ces mesures. Appelant les Etats à leurs obligations, AIF considère que les Etats signataires de la convention de 1951 et du protocole de 1967, doivent ''respecter le principe de non refoulement, protéger les réfugiés, garantir leurs droits fondamentaux, se montrer solidaires avec les Etats de premier accueil et soutenir le HCR dans ses actions, suivre ses recommandations et participer à la mise en £uvre des programmes qu'il propose''.