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Le combat au quotidien d'Ouhbanet et de Meloudja, dans les Aurès, pour faire face à la rudesse du climat
Publié dans Algérie Presse Service le 20 - 02 - 2013

Quand l'hiver arrive et que le mercure chute brutalement, lorsque apparaissent les premiers flocons de neige, l'extrême rigueur de l'hiver se rappelle sans ménagement au bon souvenir des habitants des dechras de Meloudja et d'Ouhbanet, dans la commune d'Ichemoul (Batna), au pied du massif des Aurès.
Ici, le climat est particulièrement rude, illustré par l'apparition de "pics" de glace formés par le gel en contrebas des toits en tuile des maisons. La capacité de l'homme à dominer son environnement devient très limitée.
En ce vendredi hivernal, il fait moins 4° Celsius à Batna-ville. Sur le chemin menant vers le coeur des Aurès, un froid très vif enveloppe toute la région.
Les efforts des services des travaux publics s'accentuent sur la RN31 reliant Batna à Biskra, en passant par Arris et Ichemoul, (littéralement, la corne du coeur). Déneigement et salage des voies s'intensifient pour permettre à la circulation routière de reprendre. La route conduisant à la commune d'Ichemoul, est couverte de verglas.
Salah Soualhi, transporteur privé, rencontré sur le chemin de wilaya n° 172 reliant Ichemoul à la RN 31, essayant de se ménager un accès pour livrer une commande de sable à un client de la région, avoue que même s'il est habitué à ces lieux, "(il) a toutes les peines à se frayer un chemin pour arriver à destination". A quelques mètres de là, un homme tente, en vain, de faire sortir son tracteur enfoncé dans la neige. Il faut que Salah et quelques rares passants conjuguent leurs efforts pour dégager l'engin et permettre à son conducteur de reprendre sa route vers Ichemoul.
La dechra d'Ouhbanet, un "village fantôme" en hiver
A 5 km d'Ichemoul, apparaît la dechra d'Ouhbanet, à 1.500 m d'altitude. La petite localité donne l'impression d'être une sorte de "village fantôme", car beaucoup de ses habitants ont déserté les lieux, préférant l'hospitalité de proches résidant dans des zones plus clémentes. Mokhtar Mebarkia, 72 ans, et son frère cadet Mohamed, 61 ans, préfèrent eux continuer à défier dame nature car trop attachés à leur patelin. Ici, la télévision est la seule "fenêtre" vers le monde extérieur dans la mesure où elle permet aux habitants d'être connectés à la civilisation, affirme Mokhtar.
L'accumulation de neige dans cette bourgade déjà difficile d'accès coupe souvent, et pendant des jours, les habitants du monde extérieur, poursuit le vieil homme, ajoutant qu'en hiver, les malades à Ouhbanet doivent prendre leur mal en patience et prier pour qu'une journée clémente permette à la seule piste servant de route d'être carrossable. En cas d'urgence, les habitants s'entraident pour transférer, à pieds, le patient jusqu'à la polyclinique de la région, à plusieurs kilomètres de là. Ici, quand le froid devient âpre et mord cruellement le visage et les mains, "même les chevaux et les ânes ne peuvent plus bouger", affirme Mohamed, le frère de Mokhtar.
L'école devient un vague souvenir pour les enfants car ils doivent parcourir 5 km pour y arriver, ajoutent les deux hommes, recroquevillés dans leur kachabia.
Du bois pour se réchauffer et "El Aoula" pour faire face aux caprices de dame nature
Dans les bourgs d'Ichemoul, l'hiver se prépare. Des bûches de bois sont stockées dans des endroits secs bien avant que le temps ne se gâte. Les réserves de denrées alimentaires nécessaires pour vivre durant la période de l'hiver, appelées localement "El Aoula" font aussi partie des habitudes des familles d'Ouhbanet, de Meloudja et de la mechta de Tiguensoura. "Nous nous sommes adaptés à la dureté du climat et nous nous préparons pour y faire face tant bien que mal", lance Mohamed à l'intérieur de sa petite masure où la douce chaleur d'un feu de bois se dégage depuis la cheminée.
Au début de chaque automne, les femmes, dans toutes ces dechras du massif aurésien commencent à préparer "El Aoula pour l'hiver. Semoule, miel, huile et diverses victuailles sont emmagasinés en prévision des longs mois d'hiver", souligne Hadda. H (66 ans) en faisant cuire une kesra (galette) sur une "tabouna" (sorte de large braséro) chauffée au bois.
Un véhicule "antédiluvien" pour les cas urgents à Ouhbanet et à Meloudja
Le seul moyen de locomotion à utiliser pour parcourir la piste qui mène vers Ouhbanet et Meloudja est un véhicule tout-terrain, vieux de 31 ans, appartenant à la commune d'Ichemoul et servant d'ambulance pour acheminer malades et femmes sur le point d'accoucher vers des hôpitaux ou des structures de santé.
Véhicule "d'antiquité" certes, mais son conducteur, Omar, ne cache pas sa fierté en annonçant que cet engin a sauvé bien des vies. "Pas plus tard que la semaine dernière, on a pu acheminer, dans des conditions très difficiles, une femme sur le point d'accoucher", affirme-t-il.
La polyclinique de la région ne dispose toujours pas d'ambulance et la plus proche unité de la Protection civile se trouve dans la ville d'Arris, à 30 km de là. Tant bien que mal, les gens, dans cette bourgade, essayent de s'accommoder et de trouver des alternatives pour vaincre l'enclavement et le manque de moyens.
En dépit du malaise qu'éprouvent la plupart des gens que l'APS a rencontré dans la région d'Ichemoul, et malgré la rigueur extrême de la vie quotidienne à Ouhbanet et Meloudja, les gens ici, restent attachés à leur région.
Le jeune Moussa, évoque avec beaucoup d'enthousiasme les potentialités agricoles d'Ichemoul. Pour lui, les vergers d'abricotiers, fleuron de la région, et les indéniables richesses naturelles de cette partie des Aurès sont à même de permettre d'accéder à un véritable développement.
A Ouhbanet et à Meloudja, comme dans d'autres hameaux voisins, les habitants ne se plaignent jamais. Ils caressent pourtant le rêve de voir un jour leurs dechras désenclavées. Leur plus grand souhait est de voir les pouvoirs publics financer des opérations d'ouverture de nouvelles voies de communication et de réhabilitation des quelques pistes qui serpentent encore à flanc de montagne.


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