Le lourd verdict prononcé, dimanche dernier, par un tribunal militaire marocain à l'encontre de 24 civils sahraouis, nommés "groupe de Gdeim Izik", a suscité l'indignation de nombreuses formations politiques et Organisations non gouvernementales (ONG), à travers le monde, qui exigent son annulation et la libération "immédiate" et "inconditionnelle" des accusés. Face à ce verdict, dont les sentences oscillent entre 20 ans de réclusion et la perpétuité, ces partis politiques et ONG ont également dénoncé les conditions dans lesquelles s'est déroulé le procès des 24 prisonniers politiques sahraouis. A cet effet, "Amnesty International" a demandé de rejuger le groupe de "Gdeim Izik" par un tribunal civil et non pas militaire. L'ONG, implantée dans plusieurs pays, a recommandé, notamment l'ouverture d'une enquête "indépendante" sur les déclarations des prisonniers sahraouis, faisant état de torture durant leur détention. "Nous demandons clairement aux autorités marocaines de rejuger les 24 prisonniers sahraouis dans un procès équitable, ainsi que l'ouverture d'une enquête sur leurs déclarations liées à la torture et aux aveux obtenus par la violence", a déclaré Ann Harrison, directrice adjoint du programme d'Amnesty pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, en réaction au verdict du tribunal militaire marocain. Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme (HCDH) a, quant à lui, vivement critiqué les conditions dans lesquelles s'est déroulé le procès de ces prisonniers politiques sahraouis. Lors d'un point de presse, le porte-parole du HCDH, Rupert Colville, a affirmé que cette instance réfute la décision des autorités marocaines de juger les prisonniers civils sahraouis par un tribunal militaire. De son côté, le Comité pour le respect des libertés et des droits humains au Sahara occidental (Corelso) a estimé, dans un communiqué, que ce "scandaleux" verdict doit être dénoncé à la fois par "les gouvernements, les partis politiques, les syndicats et les associations des droits de l'homme" du monde entier. Selon lui, l'impulsion d'un mouvement de solidarité avec la lutte du peuple sahraoui pour son indépendance permettra à terme de "briser le silence" imposé à cette cause. "Il faut, dès maintenant, briser le silence des principaux médias français et obtenir du gouvernement qu'il cesse, enfin, de soutenir les thèses marocaines", a-t-il poursuivi. Le Corelso s'engage à réitéré son soutien au droit à l'autodétermination du peuple sahraoui et à l'extension du mandat de la Mission des Nations-Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (Minurso), pour la surveillance et la protection des droits de l'homme dans les territoires occupés du Sahara occidental. En Italie, l'Observatoire international des droits de l'Homme, basé à Rome, a affirmé que les 24 prisonniers sahraouis ont été jugés par un "peloton d'exécution", ordonné par le ministère de la Défense marocain, et non pas par une cour de justice. Des ONG italiennes amies du peuple sahraoui ont elles aussi dénoncé les "lourdes" condamnations des prisonniers politiques sahraouis prononcées par le tribunal militaire de Rabat et ont lancé un appel pour leur libération immédiate. Les ONG françaises ont également condamné ce verdict "honteux". L'Association des Amis de la République arabe sahraouie démocratique (l'AARASD) a fustigé une "opération politique d'envergure" qui, selon elle, a "associé le pouvoir royal et les militaires à la manœuvre dans leur tribunal" dans un procès qui s'est ouvert le 1er février, après deux reports en 2012. "Alors que le Maroc est encore, aujourd'hui, membre non permanent au Conseil de sécurité, manifeste de grandes ambitions auprès du Conseil des droits de l'homme de Genève, le risque d'une telle opération a été pris pour définitivement faire oublier aux Marocains, aux Sahraouis, au Monde la grande protestation de "Gdeim Izik" qui a dit massivement le refus de l'occupation marocaine en octobre 2010", écrit l'Association dans une déclaration. Auditionnés durant quatre jours (du 9 au 12 février), les 24 prisonniers ont rejeté en bloc tous les chefs d'accusation les désignant comme une "bande de criminels", dénonçant un "procès politique" en rapport avec la question du Sahara occidental. Ils ont également réaffirmé qu'ils étaient des militants pacifiques et des défenseurs des droits de l'homme. En détention depuis plus de 27 mois, ces prisonniers ont été arrêtés et incarcérés pour avoir installé en 2010, à "Gdeim Izik", (à proximité de ville d'El-Ayoun occupée), un camp de toile où quelque 40.000 Sahraouis avaient élu domicile pour "défendre leurs droits politiques, économiques et sociaux". Le camp a été démantelé par les forces marocaines, le 8 novembre 2010. Les chefs d'inculpation retenus contre eux sont : atteinte à la sécurité intérieure et extérieure de l'Etat, formation d'une bande criminelle et atteinte aux fonctionnaires publics dans le cadre de l'exercice de leur fonction. Le Tribunal militaire de Rabat a condamné les 24 prisonniers politiques sahraouis de Gdeim Izik à des peines allant de 20 ans de prison à la réclusion à perpétuité.