La Casbah n'avait pas enfanté, à l'époque, un poète ou un parolier pour atteindre le rang des grands de Tlemcen qui ont beaucoup donné à la chanson chaâbi, avait expliqué Mustapha Toumi, auteur de la célèbre chanson "Soub'hane Allah ya Eltif", merveilleusement interprétée par le maître irremplaçable de ce genre de musique, el-Hadj M'hamed el-Anka. "Il fallait produire une œuvre qui marque notre époque (fin des années 1960 et 1970), c'est ce qui m'a poussé à créer ‘'Soub'hane Allah ya Eltif'' et sur insistance d'el-Anka durant plusieurs années", avait précisé cet érudit dans l'une de ses interviews à des confrères de la presse. "Mon père peignait des toiles qu'il conservait jalousement à la maison et n'avait jamais pensé à les vendre. Il ne les a jamais exposées", a confié mercredi à l'APS Imane, sa fille cadette. Ses centres d'intérêts étaient divers et multiples, selon elle. Il s'apprêtait même à publier un ouvrage sur l'histoire et les origines de la langue amazigh avant que la mort ne l'emporte, dans la nuit de mardi au mercredi, à l'âge de 76 ans. Natif de la Casbah, patrimoine culturel et architectural qui a donné naissance à des monuments de la culture algérienne, Mustapha Toumi surfait avec aisance sur le militantisme, le journalisme, la poésie, l'art plastique, la musique et le politique comme le faisait si bien son chanteur préféré, el-Anka, entre les différents modes de la musique chaâbi (el-Ghrib, Sihli, Djarka et A'âraka...). "Le lion restera lion même quand il vieillit, les loups ont toujours peur de lui", soulignait-il dans cette qacida d'anthologie qui a gagné en notoriété devant celles écrites par Ben Messayeb, Ben Sahla, Ben Triki et Sidi Lakhdar Ben Khelouf. "C'est l'insatisfaction politique, la transformation sociale brusque et l'inversion des valeurs qui m'ont fait inspirer la qacida (Soub'hane Allah ya Eltif)", avait affirmé cet artiste qui a également écrit pour Mohamed Lamari, Warda el-Djazaïria et Myriam Makeba. C'est ce sentiment, d'ailleurs, qui le motive, à l'âge de 53 ans, pour créer, avec l'ouverture politique en Algérie en 1989, un parti politique qui a fait hélas long feu en raison de son manque d'ancrage dans la société algérienne. Militant engagé, jaloux de son Algérie et maniant bien le verbe pour avoir travaillé à la radio et publié ses poèmes dans le journal Alger Républicain, il tentait d'expliquer ses opinions politiques, à travers les plateaux de la télévision algérienne et la radio, au moment où le pays allait sombrer dans la décennie la plus douloureuse et la plus meurtrière depuis l'indépendance. Il se consacra, depuis sa retraite, à l'écriture et comptait éditer un ouvrage relatant sa riche expérience dans des domaines aussi variés que la culture et la politique.