Le département d'Etat américain a dénoncé, dans un nouveau rapport, la violation par le Maroc des droits de l'homme des Sahraouis au Sahara occidental occupé, citant les actes de violence physique dont la torture des détenus, le recours à la détention arbitraire et l'impunité des forces marocaines. Dans son rapport mondial 2013, publié vendredi, sur la situation des droits de l'homme à travers l'ensemble des pays, le département d'Etat a consacré un document de douze pages au Sahara occidental, dans lequel il a présenté la genèse de la question sahraouie ainsi que les problèmes des droits de l'homme dont il souligne qu'"ils sont de longue date et sont liés aux revendications indépendantistes" des Sahraouis. Tenant à préciser que la Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) ne bénéficie pas d'un mandat de surveillance des droits de l'homme, le département de John Kerry affirme que "des rapports crédibles indiquent que les forces de sécurité marocaines sont impliquées dans la torture, les coups et d'autres mauvais traitements infligés aux détenus sahraouis". Les ONG internationales et locales "continuent à signaler les abus contre, particulièrement, les indépendantistes sahraouis", alors que "la torture est pratiquée généralement lors des détentions provisoires", note John Kerry, ajoutant que les militants des droits de l'homme et les indépendantistes affirment que les autorités marocaines les accusaient faussement d'infractions pénales. Outre "les viols commis contre des détenus politiques sahraouis", le rapport cite d'autres abus pratiqués par les forces de sécurité marocaines, tels "les coups avec des câbles électriques, l'asphyxie avec des chiffons humides trempés dans l'urine ou de produits chimiques, les brûlures de cigarettes, et la suspension par les bras ou comme un +poulet ficelé+ pendant une longue durée". Selon le département d'Etat, "la plupart de ces traitements dégradants surviennent suite aux manifestations indépendantistes ou à celles appelant à la libération des prisonniers politiques sahraouis". A ce propos, il cite le cas de la militante sahraouie Aminatou Haidar, attaquée par la police marocaine après sa rencontre avec l'envoyé personnel du Secrétaire général de l'ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross, à la mission de l'ONU à EL Ayoun en novembre dernier, et dont la scène, ajoute le rapport, avait été filmée et diffusée sur YouTube. Par ailleurs, le département d'Etat souligne que bien que les lois marocaines exigent des autorités à enquêter sur les allégations d'abus, "les défenseurs des droits de l'homme locaux et internationaux affirment que les tribunaux ont souvent refusé d'ordonner des examens médicaux ou de considérer les résultats des examens médicaux dans les cas d'allégations de torture". Plus encore, poursuit-il, "la plupart des plaintes ne sont pas examinées, les médecins n'attestent pas des traces de blessures causées par la torture, alors que les ambulances ne sont souvent pas mobilisées pour soigner les blessés lors des manifestations". A ce propos, le rapport rappelle qu'après sa visite au Maroc et au Sahara occidental, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, Juan Mendez, avait déclaré en mars dernier qu'il avait "de bonnes raisons de croire qu'il y a des allégations crédibles sur les agressions sexuelles, les menaces de viol de la victime ou de membres de sa famille, et les autres formes de mauvais traitements". Se penchant sur le rôle de la police et l'appareil sécuritaire marocains, le département d'Etat affirme clairement que "l'impunité de la police demeure un problème". Allant dans les détails et en se référant aux rapports d'ONG internationales et locales, il soutient que si le gouvernement marocain prétend qu'aucune plainte n'a été déposée contre la police, "les victimes sahraouies présumées des violations des droits de l'homme avaient déposé, en 2012, davantage de plaintes contre les agents de police et les forces auxiliaires que l'année précédente". Les organisations locales et internationales des droits de l'homme, note-t-il encore, ont affirmé que les autorités marocaines avaient "rejeté presque toutes les plaintes et s'appuyaient uniquement sur la version avancée par la police". L'autre critique relevée par le rapport est que le gouvernement marocain nie l'existence de prisonniers ou de détenus politiques et revendique que tous ceux qui sont incarcérés ont été reconnus coupables ou accusés de crimes, alors que les organisations des droits de l'homme et les indépendantistes affirment qu'il y a 74 prisonniers politiques sahraouis. Il est à souligner que ce rapport a été précédé, il y a six mois, par un autre qui avait été adressé par le département d'Etat au Congrès, dans lequel il avait été souligné que la situation générale des droits de l'homme dans les territoires sahraouis soulevait de "sérieuses inquiétudes". Ce précédent rapport avait été élaboré en application d'une loi adoptée en 2011 par le Congrès américain, exigeant du département d'Etat de s'assurer du respect des droits de l'homme au Sahara occidental avant l'octroi de toute aide financière militaire au Maroc. Le Sahara Occidental, considéré depuis 1964 par l'ONU comme un territoire non autonome, est la dernière colonie en Afrique que le Maroc, soutenu par la France, occupe depuis 1975.