Le film documentaire "Retour à Montluc" du journaliste algérien Mohamed Zaoui a été classé parmi les trois meilleurs films documentaires nominés sur les 26 longs métrages présentés au 9ème Festival international du film documentaire Al Jazeera qui vient de se dérouler à Doha (Qatar), a-t-on appris mardi soir auprès du réalisateur. "Si ce documentaire qui retrace le parcours carcéral dans les couloirs de la mort de Mustapha Boudina, ancien condamné à mort dans la prison de Montluc à Lyon (France) a été nominé pour le Prix du jury, c'est surtout pour saluer le travail de mémoire qu'il dévoile sur l'épreuve inhumaine vécue par ces militants algériens condamnés à la peine capitale par les autorités coloniales pour avoir porté les armes contre l'occupation de leur pays » a expliqué le réalisateur à l'APS. "La projection de documentaire a permis au public de s'instruire sur des épisodes de l'histoire de la guerre de libération nationale et de connaître cette histoire douloureuse et sanglante qui s'est déroulée y compris dans les prisons en Algérie et en France", a ajouté Mohamed Zaoui Il a précisé que la prison de Montluc est aujourd'hui devenue un musée d'histoire consacré à la résistance (française) à l'occupation allemande mais qui occulte délibérément toute trace de la présence de ces anciens condamnés à morts sur ce sinistre lieu et par conséquent, de l'histoire de la guerre d'Algérie. Entre 1956 et 1962, quelque 2 300 détenus arpentaient les couloirs de la mort en France et en Algérie. 217 ont été exécutés dont 208 guillotinés et le reste des détenus ont été empoisonnés ou brûlés vifs, selon les chiffres livrés par Mustapha Boudina. "C'est pour moi une expérience fantastique de participer pour la première fois à une compétition internationale, qui en quelques années est devenue une référence en matière de festival documentaire", a confié Mohamed Zaoui qui considère qu'il lui importait plus de participer à cette compétition pour dévoiler un pan de l'histoire de la guerre d'Algérie à l'opinion internationale que de décrocher une distinction qui est revenue à un des trois nominés, l'Allemand Fabian Daub pour "Une ville sur la rive". Il s'est également dit, "sincèrement très flatté" de constater que ce documentaire sur lequel il a travaillé "pendant deux ans, sur fonds propres sans aucun autre financement, a pu sortir et se voir distingué par un jury international exigeant et très regardant sur l'aspect esthétique des productions". "La reconnaissance par le jury du festival du documentaire "Retour à Montluc" au point de le classer parmi les trois meilleurs films nominés, est aussi pour moi une reconnaissance pour le travail de mémoire réalisé sur l'histoire de la guerre que le peuple algérien a menée pour son droit à l'autodétermination et dont l'opinion internationale en ignore parfois des faits marquants", a-t-il ajouté. Il a par ailleurs estimé être de son devoir de "rendre hommage à Mustapha Boudina qui, à travers le pèlerinage douloureux qu'il fait à la prison de Montluc, et les témoignages qu'il a apportés, a convaincu le jury sur les atrocités auxquelles ils étaient soumis lui et ses compagnons, dont 11 ont été guillotinés dans cette prison". Tout comme il a tenu à "saluer" le talent du jeune comédien Lies Kaouah "qui a si bien incarné le rôle de Mustapha Boudina dans sa jeunesse". Dans "Retour à Montluc" Mustapha Boudina, président de l'Association nationale des anciens condamnés à mort, deux fois condamné à la peine capitale par le tribunal militaire de Lyon et poursuivi pour une troisième accusation durant la guerre de libération nationale revient sur les traces de son passé carcéral. Il apporte des témoignages édifiants à travers un récit poignant sur la crainte permanente vécue par le condamné à mort attendant l'aube fatale où le geôlier frappe lourdement à la porte de sa cellule pour le conduire à l'échafaud. Mohamed Zaoui a précisé que l'idée d'un documentaire sur le parcours carcéral de Mustapha Boudina et de ses compagnons de cellule, lui a été inspiré lorsqu'il a appris que cet ancien condamné à mort comptait accomplir un pèlerinage à Montluc où il a été détenu jusqu'au jour où il bénéficiera d'une amnistie le 11 mai 1962.