Le président égyptien Mohamed Morsi, interdit mercredi de quitter l'Egypte, après avoir rejeté l'ultimatum de l'armée, a appelé à former "un gouvernement de coalition et de consensus", alors que plusieurs milliers de manifestants poursuivaient les rassemblements pour réclamer le départ du chef de l'Etat. Alors que l'ultimatum donné par l'armée au président lui demandant de répondre aux exigences du peuple venait d'expirer dans l'après-midi, Mohamed Morsi ainsi que plusieurs dirigeants des Frères musulmans ont été interdits de quitter l'Egypte dans le cadre d'une enquête sur une affaire d'évasion de prison en 2011, selon des sources de sécurité. Des responsables à l'aéroport du Caire ont confirmé à des médias avoir reçu l'ordre d'empêcher les responsables islamistes, dont le Guide suprême de la puissante confrérie Mohammed Badie et son "numéro 2" Khairat al-Chater, de voyager. De plus en plus isolé, Morsi se trouve ainsi dans une mauvaise posture. Son entourage rappelle qu'il avait été élu par le peuple en toute légitimité et que toute pression pour le forcer à quitter le pouvoir et anti-démocratique. Son conseiller pour la sécurité nationale, Essam al-Haddad a dénoncé mercredi un "coup d'Etat militaire" après l'expiration d'un ultimatum de l'armée et l'interdiction faite à plusieurs dirigeants islamistes, dont M. Morsi, de quitter le territoire. "Dans l'intérêt de l'Egypte et pour la précision historique, appelons ce qui se passe par son vrai nom : un coup d'Etat militaire", a-t-il déclaré dans un communiqué publié sur Facebook. Accusé par ses opposants de vouloir instaurer un régime autoritaire au profit des Frères musulmans dont il est issu, M. Morsi a rejeté l'ultimatum de l'armée et affirmé qu'il ne se plierait à aucun "diktat". Il a aussi catégoriquement refusé de quitter le pouvoir. Face aux pressions, le chef de l'Etat a présenté mercredi une "feuille de route" prévoyant la formation d'un gouvernement de coalition et d'une commission pour amender la Constitution afin de sortir son pays de la crise politique. "La vision de la présidence est de former un gouvernement de coalition basé sur un consensus pour organiser les prochaines élections législatives et former une commission indépendante chargée d'amender la Constitution", a-t-il affirmé, en invitant "toutes les forces nationales au dialogue pour réaliser une réconciliation nationale globale". Les opposants déterminés à faire tomber Morsi L'appel du président au dialogue et à la formation un gouvernement de "consensus", n'a pas semble-t-il satisfait les opposants qui par milliers poursuivaient dans la journée leur rassemblement à la place Tahrir du Caire pour réclamer son départ pur et simple. La plupart des protestataires brandissaient des pancartes proclamant le départ de Morsi selon les images diffusées par des chaînes de télévisions, tandis qu'une pancarte reprenait les revendications des anti-Morsi dans le pays miné par une détérioration de l'économie : "De l'eau, de l'électricité, de l'essence". Une jeune manifestante, Rouaya, a indiqué aux médias, qu'elle rejette le discours de M. Morsi, qui a fait valoir sa "légitimité" obtenue via le premier scrutin présidentiel démocratique de l'histoire du pays. "Il a répété au moins 1.000 fois le mot +légitimité+ comme si nous n'existions pas. Sa légitimité, il la tient du peuple qui aujourd'hui manifeste partout contre lui", a-t-elle dit. Ailleurs au Caire, des milliers de pro-Morsi étaient toujours massés sur la place Rabaa al-Adaouiya. Les rassemblements anti-Morsi, déjà massifs au Caire, commençaient à se former dans d'autres villes, dont Alexandrie (nord) et Port-Saïd, sur le canal de Suez. L'armée a dépoloyé des renforts dans l'est du Caire. L'armée de retour sur le devant de la scène Applaudie par les manifestants pour avoir sommé le président de répondre aux exigences du peuple, l'armée a tenté de réunir les forces du pays pour tenter de trouver une issue à la crise. Le chef de l'armée, le général Abdel Fattah al-Sissi, a rencontré dans la journée le représentant de l'opposition Mohammed El Baradei et des chefs religieux au ministère de la Défense au Caire, où des représentants de "Tamarrod", un mouvement à l'origine des manifestations monstres contre M. Morsi, étaient également présents. Par ailleurs, les représentants du parti "al-Nour" et du "Parti de la liberté et de la justice" qui ont été invités ne s'étaient pas présentés. Les discussions portent sur la "feuille de route" que l'armée a menacé de mettre en place à l'expiration à 14H30 GMT de l'ultimatum de 48 heures qu'elle a lancé lundi au président, a-t-elle précisé. L'armée a annoncé qu'elle publierait un communiqué à une heure non précisée après l'expiration de l'ultimatum, alors que le pays traverse la crise politique la plus grave depuis la chute du régime de Hosni Moubarak depuis 2011.