L'idée de réformer le Conseil de sécurité de l'ONU n'est pas nouvelle, et pour de nombreux pays et groupes régionaux elle constitue toujours une nécessité impérative pour rendre cet organe plus représentatif du monde d'aujourd'hui, une démarche qui peine à se concrétiser malgré moult appels africains et internationaux lancés dans ce sens. Le Conseil de sécurité composé de cinq membres permanents (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Chine et Russie) et dix non permanents élus pour deux ans n'a été réformé qu'une seule fois en 1963 lorsque quatre nouveaux sièges non permanents ont été créés. L'obstacle principal à la réforme du système onusien est l'opposition de certains membres permanents à toute idée d'élargissement du nombre de pays possédant le droit de veto. Au niveau des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, on accepte l'idée de la réforme tout en s'opposant à un éventuel élargissement du nombre de pays membres possédant le droit de veto. L'ambition légitime de siéger comme membre permanent au Conseil de sécurité, suscite, par ailleurs, une rivalité entre les prétendants à ce statut au sein de l'organe exécutif des Nations Unies, responsable du maintien de la paix et de la sécurité internationale. Toutefois, ces prétendants sont unanimes sur un point : la nécessaire démocratisation des relations internationales à travers une représentativité plus juste et une participation active et effective à la gestion des affaires mondiales. L'Afrique veut être mieux représentée à l'ONU La question de réformer le système de l'ONU a été évoquée dimanche dernier à Alger en marge de la réunion de haut niveau sur la paix et la sécurité en Afrique. Le Commissaire à la paix et à la sécurité de l'Union africaine (UA), Smaïl Chergui, a jugé "injuste que 'Afrique ne soit pas représentée dans cette institution de prise de décision, alors qu'elle compte, actuellement, le plus grand nombre des Etats membres de l'Assemblée générale de l'ONU". Appelant à l'élargissement du Conseil de sécurité, M. Chergui a expliqué que l'Afrique réclame "soit l'élimination du droit de veto, soit l'attribution (au continent africain) de deux sièges permanents avec les mêmes droits que les autres pays membres, en plus des trois autres sièges non permanents". Il a aussi rappelé que la réforme du Conseil de sécurité est une "exigence non seulement africaine, mais aussi internationale", expliquant que sa composante actuelle "ne reflète pas la réalité des évolutions qu'a connues le monde". Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a rappelé au cours de la réunion d'Alger que l'Afrique a fait une "percée" en matière de paix et de sécurité, mettant en avant les "programmes emblématiques" comme le NEPAD, le MAEP et "toute l'architecture de la bonne gouvernance qui contribue au renforcement de l'architecture africaine de paix et de sécurité". M. Lamamra a rappelé que 60% de l'ordre du jour du Conseil de sécurité de l'ONU est constitué de crises et de conflits affectant principalement l'Afrique, appelant à une coordination "étroite" entre l'Union africaine et les pays qui représentent le continent au sein de ce Conseil. De leur côté, les deux nouveaux membres africains non permanents au Conseil de sécurité de l'ONU (Nigeria et Tchad) ainsi que le Rwanda (membre non permanent depuis une année) ont plaidé à Alger pour l'établissement d'un "dialogue cohérent" entre le groupe africain au Conseil de sécurité onusien et le Conseil de paix sécurité de l'Union africaine (CPS) pour défendre les intérêts de l'Afrique. Louise Mushikiwabo, chef de la diplomatie du Rwanda, a jugé "inconcevable que l'Afrique soit représentée par un nombre limité de pays qui ne jouissent pas du droit de veto au sein du Conseil de sécurité alors que 70% des questions examinées par cet organe onusien concernent l'Afrique". Plusieurs groupes pour la réforme du Conseil de sécurité La réforme de l'ONU qui nécessite l'accord d'au moins des deux tiers des Etats membres de l'ONU et celui de tous les membres permanents qui disposent du droit de veto, est aussi réclamée par de nombreux groupes. L'ensemble des pays africains s'est rassemblé derrière "le consensus d'Ezulwini" (mars 2005), qui a formulé la proposition unifiée du continent. Le Groupe des 4 (G4 : Brésil, Allemagne, Inde et Japon) veut, pour sa part, la création de nouveaux sièges de membres, proposant un Conseil composé de 25 membres, dont 6 nouveaux membres permanents (les 4 membres du G4 et 2 pays africains) et de 4 non-permanents. Le Groupe des 5 - S5 "like-minded countries"- (la Suisse, le Costa Rica, la Jordanie, le Singapour et le Liechtenstein) plaide pour la nécessité d'une révision des méthodes de travail du Conseil, afin d'accroître la responsabilité de ses membres par rapport aux Etats-membres de l'ONU et d'augmenter la transparence de l'activité dudit organe. Le Groupe "Uni pour le consensus" qui réunit, entre autres, l'Italie, l'Argentine, le Pakistan et le Mexique, soutient, lui, un élargissement dans la catégorie des membres non-permanents et/ou la création d'une nouvelle catégorie de membres semi-permanents. La controverse principale concerne donc le nombre de membres d'un Conseil élargi et aussi la proportion des deux catégories de membres (permanents et non-permanents). Au niveau de l'ONU ont eu lieu des débats sur cinq thèmes principaux : les catégories des membres, le droit de veto, la dimension de l'élargissement, les méthodes de travail et la relation avec l'Assemblée Générale des Nations Unies. Devant l'Assemblée générale de l'ONU tenue en septembre dernier, les représentants de plusieurs pays ont fortement critiqué le fonctionnement du Conseil de sécurité et l'impasse dans laquelle se trouvent les négociations sur les changements à apporter pour une représentation équitable. Au nom du Mouvement des pays non alignés, le représentant de l'Egypte a dénoncé l'injustice historique faite à l'Afrique, appelant à une réforme du Conseil de sécurité qui améliore la représentation du continent. De son côté, le représentant de Cuba a réaffirmé l'urgence de procéder à une réforme profonde du Conseil de sécurité qui doit être "plus représentatif, plus démocratique et plus transparent". Le représentant de l'Indonésie a, quant à lui, regretté la sous-représentation de l'Asie et de l'Afrique. Ces deux régions "doivent obtenir au moins quatre sièges supplémentaires", a-t-il préconisé. Lors de ces débats, la Chine a souhaité que la réforme du Conseil se fasse "en vertu de la Charte des Nations Unies, et qu'elle permette une meilleure représentation des pays en développement, notamment le continent africain".