Les combats qui ont opposé ces derniers jours à Juba des factions rivales de l'armée sud-soudanaise auraient fait entre 400 et 500 morts, selon l'ONU qui a appelé le président Salva Kiir à faire "une offre de dialogue" à ses opposants afin de "prévenir toute violence" dans le pays. Au cours d'une réunion du Conseil de sécurité sur le Soudan du Sud convoquée en urgence mardi à la demande du département d'Etat américain, un responsable de l'ONU a indiqué qu'"entre 400 et 500 cadavres auraient été transportés dans des hôpitaux de Juba" à la suite des combats qui ont éclaté dimanche suivis d'une tentative de coup d'Etat, annoncée par le président Kiir. Le secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix de l'ONU, Hervé Ladsous, a précisé devant le Conseil de sécurité que 800 autres personnes avaient été blessées dans ces affrontements entre les forces fidèles au président sud-soudanais et celles d'un de ses opposants, Riek Machar, ex-vice président qui nie toute tentative de putsch. De plus, les violences à Juba ont contraint jusqu'à 13.000 civils à prendre refuge sur des bases de l'ONU au Soudan du Sud pour échapper aux combats, selon le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui a évoqué la situation avec le président sud-soudanais, lors d'un entretien téléphonique mardi. La crise à Juba remonte à l'été dernier Les combats qui se sont déroulés ces derniers jours à Juba sont avant tout le résultat d'une vieille crise qui s'est exacerbée en juillet dernier lorsque le chef de l'Etat avait limogé l'ensemble du gouvernement dont M. Machar (alors son vice-président), sur fond de dissensions au sein du pouvoir, issu de l'ex-rébellion sudiste. Celle-ci est au pouvoir depuis un accord de paix avec Khartoum en 2005, qui a mis fin à des décennies de guerre civile et débouché sur l'indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011. Le limogeage de M. Machar était intervenu après que celui-ci ait ouvertement fait part de son intention de se présenter contre le chef de l'Etat à la présidentielle de 2015. Accusé de "tentative de coup d'Etat" par les autorités de Juba, Riek Machar a nié ce fait, dans un entretien au site indépendant Sudan Tribune publié mercredi. Pour lui, "ce qui s'est passé à Juba est un malentendu entre membres de la garde présidentielle, au sein de leur unité. Ce n'était pas une tentative de coup d'Etat. Je n'ai aucun lien ou connaissance d'une quelconque tentative de coup d'Etat", a-t-il encore dit. Selon les autorités sud-soudanaises, M. Machar est actuellement recherché et "en fuite", ainsi que quatre autre figures politiques du pays. Le gouvernement a annoncé mardi l'arrestation de dix hautes personnalités, dont huit anciens ministres du cabinet limogé en juillet par le président Kiir. Appels au dialogue et à éviter un conflit ethnique Appelant à un arrêt immédiat des hostilités, M. Ban a appelé le président Kiir, au cours de la conservation téléphonique de mardi, à faire "une offre de dialogue" à ses opposants pour mettre un terme aux combats, selon son porte-parole Martin Nesirky. Il s'est dit aussi "inquiet" face aux informations évoquant le fait que les membres de certains communautés étaient particulièrement visés, d'après la même source. "Tous les civils doivent être protégés, "quelle que soit leur ethnie", a-t-il déclaré. Salva Kiir et Riek Machar sont membres de deux ethnies différentes. Lors de sa réunion mardi à New York, le Conseil de sécurité de l'ONU a exhorté toutes les parties concernées au Soudan du Sud à "mettre fin immédiatement aux hostilités" et à faire preuve de retenue afin de "prévenir toute violence" dans le pays le plus jeune du monde. Pour sa part, l'Union Africaine (UA) s'est déclarée "profondément préoccupée" par la situation au Soudan du Sud. L'UA "exhorte le gouvernement et les dirigeants au Soudan du Sud, ainsi que tous les acteurs concernés, à faire preuve de retenue et à éviter toute violence supplémentaire", a déclaré la présidente de la Commission de l'UA, Nkosazana Dlamini-Zuma, dans un communiqué. L'UA a déclaré être prête à "apporter son aide afin de trouver une solution" à la crise, et a incité les factions rivales à chercher une solution pacifique. Mme Dlamini-Zuma les a invitées dans son communiqué à "régler leurs différends grâce à des moyens pacifiques, en respectant l'état de droit, les droits de l'homme et l'ordre constitutionnel". "Profondément troublés" par la tension qui règne à Juba, les Etats-Unis ont, de leur côté, ordonné l'évacuation de leurs diplomates et employés jugés non essentiels au Soudan du Sud et l'arrêt d'activités de son ambassade en raison des violences politiques qui secouent ce pays, selon le département d'Etat.