Le rattachement de la Crimée à la Russie vient de franchir mardi une nouvelle étape après que le président russe Vladimir Poutine eut approuvé le projet d'accord sur l'intégration de ce territoire, malgré les protestations de l'Ukraine et des pays occidentaux qui ont imposé des sanctions visant des responsables russes et ukrainiens. Deux jours après le référendum sur un rattachement à la Russie organisé par les autorités séparatistes de Crimée (territoire ukrainien autonome, historiquement pro-russe) et approuvé par 97% des votants, Vladimir Poutine a approuvé le projet d'accord sur l'intégration de la presqu'île ukrainienne dans la fédération de Russie, selon le Journal officiel russe cité mardi par l'agence Ria Novosti. "J'estime nécessaire de signer l'accord (à) au niveau supérieur", indique un décret présidentiel publié dans le site internet du journal. Lundi, le président russe avait officiellement reconnu l'indépendance de la république ukrainienne de Crimée. Selon le décret qu'il a signé, la Russie, "compte tenu de la volonté des peuples de Crimée exprimée lors du référendum du 16 mars 2014", décide de "reconnaître la République de Crimée comme Etat souverain et indépendant où la ville de Sébastopol a un statut spécial". Pour accélerer la procédure d'adhésion, la péninsule de Crimée a décidé d'adopter le rouble russe comme monnaie officielle et de passer à l'heure russe, selon une résolution approuvée la veille par le corps législatif de la nouvelle république. Toutefois la péninsule "conservera cependant le budget et les codes fiscaux ukrainiens existants jusqu'à ce que la Crimée élabore ses propres réglementations". Peuplée principalement de russophones, la Crimée a été rattachée en 1954 à l'Ukraine qui faisait alors partie de l'Union soviétique. Il s'agissait d'une décision purement formelle, car le transfert de ce territoire a été effectué à l'intérieur du même Etat. Après la chute de l'URSS en 1991, la Crimée, qui abrite la flotte russe de la mer Noire, est restée au sein de l'Ukraine, mais a reçu le statut de république autonome. Kiev accuse Moscou d'attiser des troubles dans l'Est Le référendum sur le rattachement de la presqu'île est jugé "illégal" par l'Ukraine et des pays occidentaux. Treize des 15 pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU avaient soutenu samedi un projet américain de résolution condamnant sans équivoque le référendum sur le rattachement de la Crimée à la Russie. Moscou y a mis son veto, bloquant l'adoption du texte. Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a appelé mardi la communauté internationale à ne pas reconnaître la "République de Crimée" proclamée lundi par ses autorités séparatistes, ni aucun accord qu'elle pourrait conclure. Les nouvelles autorités à Kiev ayant succédé au président déchu Viktor Ianoukovith, craignent surtout que le référendum en Crimée incite d'autres régions russophones dans l'est du pays à faire de même. Le Premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk a accusé mardi les services spéciaux russes d'attiser les troubles dans l'Est pour justifier une "agression militaire" sous le prétexte de protéger les russophones. La semaine dernière, des affrontements avaient éclaté entre des manifestants pro-russes et ceux soutenant Kiev dans les grandes villes industrielles de l'Est, telles Donetsk et Kharkiv, faisant trois morts. Washington et l'UE imposent des sanctions Après avoir dénoncé le référendum en Crimée, les Etats-Unis et l'Union européenne (UE) ont annoncé la veille une série de sanctions visant un nombre limité de hauts responsables russes et ukrainiens pro-russes. ''Aujourd'hui, j'ai annoncé une série de mesures qui infligeront des coûts supplémentaires à la Russie et à ceux qui sont responsables des événements en Ukraine'', a déclaré le président américain Barack Obama, ajoutant que si la Russie continuerait à s'ingérer en Ukraine, il est prêt à imposer des sanctions supplémentaires. Le président russe Vladimir Poutine ne figure pas sur la liste des personnes ciblées dans cette première série de sanctions du fait que les Etats-Unis ne ciblent pas en premier lieu des chefs d'Etat, selon des responsables américains. Tout en imposant des sanctions, M. Obama a souligné que des mesures diplomatiques pouvaient encore être utilisées d'une manière qui soit satisfaisante tant pour la Russie que pour l'Ukraine sans entraîner de ''rupture irréparable'' dans les relations européennes.