Au lendemain de l'intégration de la Crimée dans la Fédération de Russie, les grands pays occidentaux et l'Ukraine l'ont qualifié d'"illégal" et "contraire au droit international", menaçant de renforcer l'isolement politique et économique de Moscou par des sanctions supplémentaires. Après l'annonce des résultats officiels lundi du référendum plébiscitant le rattachement de la Crimée à la Russie avec 96,6 % des votants, le parlement criméen a proclamé l'indépendance de la péninsule autonome du sud de l'Ukraine et demandé son rattachement à la Fédération de Russie. De son côté, le président russe Vladimir Poutine avait officiellement reconnu l'indépendance de la république ukrainienne de Crimée. Selon le décret qu'il a signé, la Russie, "compte tenu de la volonté des peuples de Crimée exprimée lors du référendum du 16 mars 2014", décide de "reconnaître la République de Crimée comme Etat souverain et indépendant où la ville de Sébastopol a un statut spécial". M. Poutine a signé mardi un traité historique rattachant la Crimée à la Russie, avec effet immédiat, faisant fi des sanctions occidentales décrétées la veille. Cette décision a été immédiatement dénoncée par les Occidentaux et par Kiev, le porte-parole de la diplomatie ukrainienne a affirmé que son pays ne reconnaîtrait "jamais la soi-disant indépendance et le soi-disant accord sur le rattachement de la Crimée à la Russie". Washington et l'UE imposent des sanctions contre Moscou souhaitant une évolution positive Après avoir dénoncé le référendum en Crimée, les Etats-Unis et l'Union européenne (UE) ont annoncé la veille une série de sanctions visant un nombre limité de hauts responsables russes et ukrainiens pro-russes. Le président américain, Barack Obama, a invité les dirigeants du G7 et de l'Union européenne à se réunir la semaine prochaine à La Haye afin d'examiner les "décisions que le G7 pourrait prendre pour répondre à l'évolution de la situation et soutenir l'Ukraine". Joe Biden, le vice-président américain, a qualifié l'action de la Russie en Crimée de "confiscation de territoire". "L'isolement politique et économique de la Russie ne peut qu'augmenter si elle poursuit dans la même voie, et elle verra en fait de nouvelles sanctions de la part des Etats-Unis et de l'UE", a-t-il assuré. Angela Merkel, la chancelière allemande, a jugé que l'intégration de la Crimée était "contre le droit international". "Parallèlement aux sanctions prises, nous allons privilégier le dialogue, nous allons privilégier la discussion", a-t-elle cependant ajouté, souhaitant "une évolution positive en Ukraine en particulier pour la préparation de l'élection" présidentielle anticipée du 25 mai. Le président français, François Hollande, a de son côté appelé à "une réponse européenne forte et coordonnée". "La France ne reconnaît ni les résultats du référendum tenu en Crimée le 16 mars dernier, ni le rattachement de cette région d'Ukraine à la Russie", a-t-il dit. Le chef de la diplomatie britannique William Hague, a estimé mardi que l'Occident doit "reconsidérer" ses relations avec la Russie, et a annoncé la suspension de Londres de toute coopération militaire avec Moscou, y compris les licences d'exportation en cours. Pour le président ukrainien Olexandre Tourtchinov, "l'Ukraine et le monde entier ne reconnaîtront jamais l'annexion du territoire ukrainien". "C'est une décision dangereuse qui n'a aucune conséquence juridique. C'est une provocation dangereuse pour l'Europe et le monde", a-t-il ajouté. L'Ukraine se réserve le droit de saisir des biens de la Russie si celle-ci approuve la "nationalisation" des propriétés de l'Etat ukrainien en Crimée, selon le ministre ukrainien de la Justice, Pavlo Petrenko. Pour le chef de la diplomatie suédoise Carl Bildt le président russe Vladimir Poutine confirme ainsi "sa volonté de défier le droit international et l'ordre mondial". Poutine: l'occident a "franchi la ligne rouge" Dans son discours, M. Poutine a assuré que la Russie ne voulait pas d'une scission de l'Ukraine, deux jours après un référendum en Crimée qui a plébiscité un rattachement à la Russie. "Dans le cœur et la conscience des gens, la Crimée était et reste une partie intégrante de la Russie", a-t-il lancé, affirmant que Moscou aurait "trahi" les habitants de la péninsule si elle n'avait pas répondu à leur appels à les protéger face à la contestation à Kiev qui a abouti à la destitution du président Viktor Ianoukovitch. "Ne croyez pas ceux qui vous font peur au sujet de la Russie, qui vous disent qu'après la Crimée, vont suivre d'autres régions", a déclaré M. Poutine à l'adresse de ceux qui s'inquiètent d'une éventuelle répétition du scénario criméen dans l'est russophone de l'Ukraine. Le chef de l'Etat russe s'est aussi livré à une dénonciation en règle des Occidentaux qui ont décrété des sanctions contre Moscou, estimant qu'ils avaient "franchi la ligne rouge" et s'étaient comportés de "manière irresponsable" dans la crise ukrainienne. Il les a accusés de faire preuve de "cynisme" et d'agir selon "le droit du plus fort".