La péninsule de Crimée a proclamé lundi son indépendance de l'Ukraine et demandé son attachement à la Russie au lendemain d'un référendum approuvé par 96% de ses habitants, contesté par les Occidentaux et qui a engendré des répercussions économiques mondiales. Après l'annonce des résultats officiels dans la matinée plébiscitant le rattachement de la Crimée à la Russie avec 96,6% de votants, le parlement criméen a proclamé l'indépendance de la péninsule autonome du sud de l'Ukraine et demandé son rattachement à la Fédération de Russie. Tous les 85 députés ont approuvé à l'unanimité ces décisions, attendues après la victoire massive des partisans du rattachement au référendum de dimanche, et décrété aussi la nationalisation de tous les biens de l'Etat ukrainien sur son territoire. La commission référendaire de Crimée a indiqué que seuls 2,55% des électeurs ont souhaité demeurer au sein de l'Ukraine avec une plus grande autonomie. La Crimée est peuplée d'environ 2 millions de personnes. Le Conseil suprême criméen avait adopté une résolution de déclaration d'indépendance le 11 mars pour ouvrir la voie au référendum de dimanche. Peuplée principalement de russophones, la Crimée a été rattachée en 1954 à l'Ukraine qui faisait alors partie de l'Union soviétique. Il s'agissait d'une décision purement formelle, car le transfert de ce territoire a été effectué à l'intérieur du même Etat. Après la chute de l'URSS en 1991, la Crimée est restée au sein de l'Ukraine, mais a reçu le statut de république autonome. Conformément à sa première Constitution de 1992, la Crimée définissait ses relations avec l'Etat ukrainien sur la base d'accords bilatéraux. La Rada suprême (parlement ukrainien) a aboli la Constitution de 1992 en mars 1995, supprimant de facto l'autonomie de la Crimée. Le référendum conforme aux normes du droit international, affirme Moscou Le référendum, largement contesté par les Occidentaux dont l'UE et les Etats-Unis est "conforme aux normes du droit international", a affirmé lundi un communiqué du service de presse du Kremlin. Le président russe Vladimir Poutine "a mis l'accent sur le fait que la tenue du référendum criméen était entièrement conforme aux normes du droit international et à la Charte de l'Onu et prenait en compte notamment le précédent du Kosovo", indique le communiqué à l'issue d'un entretien téléphonique entre M. Poutine et son homologue américain Barack Obama. L'entretien a eu lieu à l'initiative de la partie américaine. Selon le Kremlin, en dépit de divergences sur certains points, les deux dirigeants sont tombés d'accord pour chercher des moyens de contribuer à la stabilisation de la situation en Ukraine. Le président russe avait déclaré que son pays respecterait le résultat du référendum sur le rattachement de la région ukrainienne de Crimée à la Russie. M. Poutine avait en outre fait remarquer que la volonté de la population de la péninsule s'exprimait dans le respect total des normes du droit international et notamment de l'article 1er de la Charte de l'Onu, qui affirme le principe de l'égalité et du droit à l'autodétermination des peuples. Un référendum avec des répercussions économiques mondiales Le pétrole montait lundi en Asie après le "oui" de la Crimée au rattachement à la Russie. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en avril gagnait 23 cents à 99,12 dollars. Le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en avril également s'appréciait de 11 cents, à 108,32 dollars. L'euro a ouvert la semaine en baisse lundi dans un marché qui anticipe de nouvelles sanctions occidentales contre la Russie au lendemain du vote en Crimée en faveur d'un rattachement à la Fédération russe. La monnaie européenne valait 1,3900 dollar lundi matin, contre 1,3909 dollar vendredi soir. Elle progressait en revanche face à la devise nipponne, à 141,29 yens contre 140,94 yens vendredi soir, comme le dollar qui s'échangeait à 101,65 yens contre 101,33 yens. "Les investisseurs vont désormais se focaliser sur l'ampleur des sanctions qui seront imposées à la Russie par l'Occident et anticipent une éventuelle réponse de Moscou", a expliqué la National Australia Bank (NAB). "Les conséquences du référendum de ce week-end seront au centre de toutes les attentions pour ce début de semaine", a-t-elle ajouté. Les cambistes restent par ailleurs attentifs à l'issue de la réunion de la Réserve fédérale américaine (Fed) mardi et mercredi. Les analystes s'attendent à une nouvelle réduction de 10 milliards de dollars des achats d'actifs de la Fed, ce qui porterait cette aide destinée à pousser les taux à la baisse à 55 milliards de dollars mensuels. En Chine, la banque centrale a annoncé samedi qu'elle élargissait la marge de fluctuation journalière du yuan par rapport au dollar à 2%, contre 1% avant, de part et d'autre d'un niveau médian ajusté chaque jour par l'institution. De son côté, la livre britannique était quasi stable face à l'euro, à 83,53 pence pour un euro, comme face au dollar, à 1,6640 dollar pour une livre. La devise helvétique montait face à l'euro, à 1,2146 franc suisse pour un euro, comme face au dollar, à 0,8738 franc suisse pour un dollar. Le référendum en Crimée mal accueilli par les Occidentaux A Bruxelles, les ministres européens des Affaires étrangères se réunissent lundi pour décider de sanctions à l'encontre de responsables russes jugés impliqués dans l'intervention russe en Crimée. Le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, reçoit le ministre ukrainien des Affaires étrangères par intérim, Andriï Dechtchytsia dans la capitale belge. Après Kiev, le vice-président américain, Joe Biden, poursuit une tournée consacrée à la crise ukrainienne en Pologne et Lituanie, deux pays de l'UE partisans d'un soutien à l'Ukraine face à Moscou. A Washington, le président Barack Obama a évoqué d'éventuelles sanctions supplémentaires contre la Russie, avertissant que les Etats-Unis et leur alliés ne reconnaîtraient "jamais" le référendum.