L'avant-dernière journée de la campagne officielle pour l'élection présidentielle du 17 avril s'est déroulée samedi dans le calme, avec son lot habituel de déclarations publiques, d'interventions dans la presse mais aussi de réactions à des dépassements présumés lors de la campagne finissante, alors que les Algériens de l'étranger ont commencé à voter "normalement". Le vote des ressortissants algériens établis à l'étranger "se déroule normalement et toutes les conditions sont réunies pour garantir un bon déroulement de l'opération électorale", a assuré à Alger le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra. Jusqu'à jeudi prochain, jour du scrutin en Algérie, quelque 1.009.000 Algériens résidant à l'étranger, majoritairement en France, pourront accomplir leur devoir électoral dans les 398 bureaux de vote ouverts à leur intention. Le fait de la journée c'est cependant cette réaction du président-candidat Abdelaziz Bouteflika en personne à des "dépassements" dont se seraient rendus coupables certains candidats à des moments précis des trois semaines de campagne. "A certains moments, (la campagne) a manqué d'élégance. Il y a des appels à la violence et des comportements peu orthodoxes et anti-démocratiques", a dénoncé le chef de l'Etat lors de l'audience qu'il a accordée au ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Garcia-Margallo y Marfil, et dont des extraits ont été montrés au journal télévisé de 20h. Le président sortant n'a pas manqué, à l'occasion, de rappeler l'existence d'un code de déontologie auquel des candidats à la magistrature suprême doivent s'en tenir strictement. Auparavant, la direction de campagne du même candidat (Abdelaziz Bouteflika) a dénoncé, dans un communiqué, des "violences" émanant, "depuis le début de la campagne", de représentants du candidat indépendant Ali Benflis, selon elle. "Nous prenons acte (...) de la poursuite de comportements violents de la part de parties hostiles au déroulement serein et transparent de la campagne et de l'élection pour la présidentielle, et dénonçons les auteurs de cette violence qui émane de représentants du candidat à la présidentielle Ali Benflis", déclare le communiqué. Des troubles, généralement sans gravité, avaient émaillé certains meetings, notamment ceux animés par les représentants du candidat Bouteflika. L'incident le plus significatif, avec plusieurs blessés à déplorer, s'était déroulé la semaine passée à Bejaia où un rassemblement populaire de Abdelmalek Sellal a dû être annulé sous la pression violente de groupes de manifestants se proclamant hostiles au processus électoral en cours. Réagissant promptement à ces réactions, depuis Oran où il tenait un meeting électoral, M. Benflis a réfuté les "graves" accusations de la direction de campagne du candidat Bouteflika qu'il n'a pas cité nommément. "Plus ils échouent à apporter des solutions efficientes aux problèmes des Algériens et à chaque succès de mes meetings, ils recourent au mensonge allant parfois jusqu'à des accusations graves et infondées", a-t-il dénoncé. Considérant que tout cela visait à l'entraîner dans "des débats stériles et superflus de nature à entamer le bon déroulement de la campagne électorale et de l'élection présidentielle", M. Benflis a exprimé son souci de préserver la sécurité et la stabilité de l'Algérie et estimé que "seules des élections libres et démocratiques sont susceptibles de réaliser la souveraineté du peuple et de mener le pays à une stabilité durable". Lors de cette avant-dernière journée de campagne, les six candidats ou leurs représentants auront mobilisé tout ce qu'il leur restait comme réserve pour tenter de persuader les électeurs de se rendre en masse aux urnes pour "élire l'homme de la stabilité et de la continuité" (Sellal à Annaba), pour les pro-Bouteflika, et pour "dire non à ce pouvoir et le pousser à partir" (Touati à Blida) ou encore "donner sa chance à l'opposition de pouvoir gérer le pays" (Rebaine à Alger), pour les partisans du changement. Pour Louisa Hanoune, sa campagne est un "succès" du seul fait qu'elle considère avoir atteint son objectif principal, celui d'inciter la population à se mobiliser massivement, lors du scrutin, pour permettre d'éviter à l'Algérie de sombrer, dit-elle, dans "l'anarchie" et "l'instabilité". Au lieu de cela, souhaite de nouveau Mme Hanoune, il faut "rompre avec l'ancien système, sans renier les principes du 1er novembre, en instaurant une deuxième République". Pour sa part, le responsable du mouvement El-Islah, soutien du candidat Benflis, a appelé lui aussi à un vote massif car il ne s'agit pas pour lui d'un "scrutin ordinaire", mais d'un "référendum qui montrera qui soutient le despotisme et l'injustice, et qui est pour la liberté, la démocratie et la justice". De Mostaganem, le candidat Benflis a axé son intervention sur la nécessaire lutte contre la bureaucratie promettant pour ce faire d'instituer un "code d'éthique" valable dans tous les services de la fonction publique et de l'administration. Au volet politique de son programme électoral, M. Benflis a réaffirmé son "engagement" à mettre en place une Constitution "consensuelle" impliquant tous les acteurs politiques et économiques et la société civile. Cette Constitution, a-t-il ajouté, se proposera, entre autres, de "limiter à deux mandats la durée du mandat présidentiel" et d'instaurer "un gouvernement d'union nationale". "Je veux être le président d'une Algérie forte, prospère et démocratique, je veux être à la tête de la magistrature suprême du pays car il est temps de procéder à un changement radical dans tous les domaines", a clamé de son côté le plus jeune candidat Abdelaziz Belaid, 50 ans, qui a terminé à Alger la toute première campagne électorale de son existence.