Quelque 4,29 millions d'Ecossais se rendaient jeudi aux urnes lors d'un référendum qui devrai trancher sur l'indépendance, ou pas, de cette région du Royaume-Uni, dont l'enjeu est l'unité territoriale d'une union bâtie depuis plus de trois siècles. Les 2.600 bureaux de vote écossais ont ouvert leurs portes à 07H00 locales (06H00 GMT) et fermeront à 22H00 (21H00 GMT). Les premiers résultats sont attendus vendredi au petit matin. Au total, quelque 4,29 millions d'électeurs - dont 600.000 ont déjà voté par correspondance - étaient appelés aux urnes. Les instituts de sondage ont prédit une courte victoire du non, rattrapé en fin de campagne par le oui, mais avec une avance se situant dans la marge d'erreur de 3%. Ils misaient aussi sur une participation record de l'ordre de 80% des 4,2 millions d'Ecossais de 16 ans et plus, à l'aune du débat identitaire qui a embrasé le territoire ancré depuis 307 ans à ses voisins du sud, en vertu d'un Acte d'Union. Selon des médias, dans les bureaux de vote d'Edimbourg, comme ailleurs en Ecosse, les électeurs ont accouru avant même l'heure officielle d'ouverture, pour venir dire si oui ou non ils veulent leur indépendance, dans un scrutin qui s'annonce serré. - Un scrutin décisif - Jusqu'à une heure avancée mercredi soir, les dirigeants des deux camps ont jeté leurs forces dans la bataille pour tenter de séduire le dernier carré d'indécis. "C'est la chance de toute une vie (...) a saisir des deux mains", a dit jeudi Alex Salmond, le Premier ministre de l'Ecosse semi-autonome qui votait dans sa circonscription de Strichen. "Faisons-le!", avait-il clamé la veille au soir à Perth. "Yes we can", avait répondu la foule de ses partisans. L'ex-locataire travailliste du Downing Street Gordon Brown -- né en Ecosse -- a montré une ferveur égale à Glasgow, mais en faveur du non. Il a dénoncé un nationalisme "étriqué, égoïste et qui divise". Les quotidiens britanniques arboraient jeudi des Unes pleines de symboles, avec le plus souvent les deux drapeaux de l'Ecosse et du Royaume-Uni flottant côte à côte. Le Guardian présente pour sa part une vue aérienne de l'Ecosse entourée d'une mer ayant submergé les autres parties du Royaume-Uni. "Le jour de vérité. Les 4.285.323 électeurs écossais ont 15 heures pour décider du destin de leur pays", peut-on lire dans l'éditorial, qui veut convaincre les Ecossais de rejeter l'indépendance et d'aider à "reforger notre union" ensemble. Le Glascow's Sunday Herald se prononce pour l'indépendance: dans sa dernière édition avant le vote, le journal écossais affiche en Une une mosaïque composée de centaines de selfies de partisans du oui formant le drapeau écossais. Le président des Etats-Unis Barack Obama est venu mercredi à la rescousse du non. "Le Royaume-Uni est un partenaire extraordinaire pour l'Amérique et une force pour le bien dans un monde instable. J'espère qu'il restera fort, robuste, et uni", a-t-il écrit sur Twitter. - Que deviendra une Ecosse indépendante? - Lundi, le Premier ministre britannique David Cameron a prévenu que la victoire du oui au référendum sur l'indépendance de l'Ecosse organisé jeudi constituerait un "douloureux divorce" aux lourdes conséquences. Le camp du non a mis en garde: une Ecosse indépendante ne pourra plus utiliser la livre sterling, verra son système de retraite mis à mal, et son appartenance à l'Union européenne remise en cause. En face, on a fait valoir qu'une Ecosse indépendante pourra fixer ses impôts, mener la politique sociale-démocrate espérée par les Ecossais, dont le coeur penche traditionnellement à gauche, et gérer comme elle l'entend la manne pétrolière de la mer du Nord. A Glasgow, près de 2.000 partisans du oui ont tenu mercredi soir une ultime réunion publique, à deux pas de la place Mandela. "Mes frères, mes soeurs, soyons clairs. Nous sommes à l'aube d'une révolution démocratique et pacifique", s'est enflammé Tommy Sheridan, une figure du socialisme écossais. Si l'Ecosse choisit l'indépendance, ce sera la fin d'une alliance qui remonte à 1707. Cela pourrait aussi sceller le sort du Premier ministre David Cameron, qui a qualifié mercredi de "tragédie" le scénario d'une scission. En revanche, Alex Salmond devrait sortir vainqueur du scrutin quel que soit son issue. Si le oui l'emporte, il pourra en effet s'ériger en père de l'indépendance. Si c'est le non, il aura obtenu une autonomie accrue. Quant à l'Ecosse, "que ce soit oui ou non, (elle) ne sera plus jamais la même", pronostique le quotidien écossais The Herald.