Le référendum de dimanche en Grèce, sur le plan des créanciers d'Athènes, est le premier depuis 40 ans dans l'histoire du pays. Fin des aides d'urgence, faillite bancaire, débâcle économique et sortie de facto de l'euro ? Si le non l'emporte au référendum de dimanche, la Grèce pourrait se retrouver rapidement plongée dans un scénario noir. A moins que ses partenaires européens n'acceptent des concessions. Les électeurs devront répondre à la question : "Est-ce que la proposition soumise par la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international lors de l'Eurogroupe du 25 juin doit être acceptée ?". Ce référendum, le premier depuis 40 ans, s'annonce exceptionnel dans l'histoire de la Grèce, alors que le FMI a publié jeudi des chiffres épouvantables sur les finances publiques du pays. Le FMI a publié un rapport imprévu, réduisant de 2,5% à 0% ses prévisions pour la croissance grecque cette année, et encore, sans tenir compte de la mise sous contrôle des capitaux du pays depuis lundi. Il a imputé la situation aux changements politiques survenus "plus tôt cette année" dans le pays, dans une allusion à l'arrivée au pouvoir du parti de la gauche radicale Syriza fin janvier. En prenant la parole cette semaine pour appeler le peuple grec à rejeter les propositions des créanciers, le Premier ministre grec Alexis Tsipras s'est montré confiant. "Le non ne signifie pas une rupture avec l'Europe", c'est "une forte pression" pour obtenir "un accord meilleur", a-t-il martelé. "Ce n'est pas vrai", martèle de son côté le chef de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem. Pour le gouvernement, qui n'a aucune intention de sortir de l'euro, un non servirait surtout à être "mieux armé" pour la poursuite des négociations avec les créanciers. Mais ces derniers soutiennent qu'un non équivaudrait à un choix contre l'euro, de quoi impressionner des Grecs déjà très anxieux par la situation Pour la première fois, un sondage (de l'institut Alco) donnait vendredi l'avantage au oui, crédité de 44,8% des voix alors que le non recueillait 43,4%. Mais un autre sondage, réalisé pour Bloomberg par l'Université de Macédoine, montrait un très léger avantage du non avec 43%, contre 42,5% pour le oui. "Ce référendum a coupé la société grecque en deux groupes qui ont une compréhension différente de la question posée", a relevé le responsable de ce sondage, Nikos Marantzidis, professeur de sciences politiques à l'Université de Macédoine, cité par Bloomberg. Avec une victoire du non, le Premier ministre se verrait "mieux armé" pour repartir à la table des négociations avec les créanciers (UE, BCE, FMI), qui d'ailleurs, selon le ministre des Finances Yanis Varoufakis, ont continué en coulisses cette semaine, avec "un accord plus ou moins scellé". Le référendum de dimanche, le premier depuis 40 ans Au total, sept référendums ont été organisés au 20e siècle en Grèce, entre 1920 et 1974, tous portant "sur le dilemme monarchie ou république", dans des périodes agitées, rappelle le politologue Ilias Nikolakopoulos. "C'est la première fois qu'on a un référendum qui concerne une question de caractère politique international et national" et cela revêt "une importance exceptionnelle", remarque-t-il. Un autre projet de référendum sur une proposition des créanciers du pays (UE, BCE, FMI), concernant la dette grecque, avait fait long feu en 2011, entraînant la chute du Premier ministre socialiste Georges Papandréou. C'est cette fois un énième échec d'une réunion des ministres des Finances de la zone euro, la semaine dernière, qui a déclenché l'annonce de la consultation par le Premier ministre de gauche radicale Alexis Tsipras, dans la nuit de vendredi à samedi. D'autant que les enjeux du scrutin sont présentés de manière radicalement différente par les deux camps. Pour les partisans du non, comme M. Tsipras, il faut que les Grecs soient le plus nombreux possible à repousser la proposition des créanciers, pour espérer en avoir une meilleure par la suite. Les partisans du oui, emmenés par les partis d'opposition Nouvelle-Démocratie (conservateur), Pasok (socialiste) et Potami (centre gauche) annoncent au contraire un véritable cataclysme en cas de vote non, à commencer par une sortie de l'euro et son cortège de conséquences incalculables. Pour M. Nikolakopoulos, "le côté positif" de ce référendum, "c'est qu'on fait appel au peuple". "Le côté négatif, c'est la division de la société qu'implique un choix entre oui et non". Le dernier référendum grec en 1974 a suivi la chute de la dictature des colonels (1967-1974) et a donné une majorité de 70% en faveur de la restauration de la république. Le référendum de 1946 avait marqué le retour du roi Georges II, soutenu à l'époque par les alliés et surtout par le Royaume-uni. Mais il avait divisé le peuple et marqué le début d'une guerre civile de trois ans entre forces gouvernementales et communistes. Le premier référendum de 1920 a eu lieu également dans une période tourmentée, en restaurant la monarchie, tandis que celui de 1924 s'est déroulé sur fond de guerre gréco-turque. Le référendum de dimanche risque d'avoir des conséquences politiques de court terme. Le ministre des Finances Yanis Varoufakis a déjà indiqué qu'il démissionnerait si le oui l'emportait. M. Tsipras est resté plus évasif, se limitant à dire qu'il agirait en cas de défaite selon les principes de la Constitution, ce qui n'implique pas nécessairement son départ.