Un nouveau sondage sur l'issue du référendum de demain en Grèce, par lequel les électeurs sont appelés à dire s'ils acceptent ou rejettent les propositions des créanciers, conclut à un léger avantage pour le "oui", avec 44,8%. Le "non" recueillerait lui 43,4%. Ce sondage, réalisé par un institut respecté, Alco, et publié hier par le journal Ethnos, fait état de 11,8% d'indécis. Il montre aussi que 74% des Grecs souhaitent le maintien de leur pays dans la zone euro contre 15% qui réclament le rétablissement d'une "monnaie nationale" et 11% qui ne se prononcent pas. Les électeurs interrogés sont divisés à égalité entre 43% pour qui le référendum sera sur le fond une consultation sur la poursuite de l'appartenance de la Grèce à la zone euro, et 43% pour qui les Grecs se prononceront uniquement, dimanche, sur une acceptation ou non des propositions des créanciers.
Revirement Néanmoins, 61% des sondés disent penser qu'une victoire du "non" accroîtra le risque d'une sortie de la Grèce de la zone euro. En outre, 46% pensent que la décision d'organiser ce référendum est une mauvaise chose et 44% sont d'un avis contraire. Globalement, ce sondage marque un revirement. Jusqu'à présent, la seule enquête d'opinion complète à avoir été publiée depuis l'annonce du référendum donnait le "non" en tête, mais déjà en net recul après l'annonce de la fermeture des banques pour toute la semaine. Cette enquête-là donnait 54% pour le "non" et 33% pour le "oui".
Un "non" ne renforcera pas la Grèce De son côté, Valdis Dombrovskis, commissaire européen chargé de l'euro et du dialogue social, estime vendredi dans une interview au journal allemand Die Welt que le référendum grec n'est ni factuellement ni juridiquement correct, et qu'il serait faux de penser qu'une victoire du "non" renforcera la position de la Grèce aux négociations. Il faudra sans doute plusieurs semaines pour mettre au point un troisième plan d'aide à la Grèce, ajoute-t-il en assurant que l'Union européenne s'emploie à maintenir ce pays dans la zone euro. Les critiques de ce commissaire européen envers les conditions de tenue du référendum ne sont pas les premières à voir le jour. Le Conseil de l'Europe a d'ores et déjà estimé que cette consultation n'était pas conforme à ses normes minimales en la matière.
Décision juridique attendue Le Conseil d'Etat, tribunal administratif suprême grec, doit se prononcer ce vendredi sur la constitutionnalité du référendum. Deux citoyens grecs cherchent à obtenir la suspension de la consultation, qu'ils estiment non constitutionnelle et illégale, en arguant que la campagne est trop courte, que la Constitution interdit que les questions budgétaires soient soumises à référendum, et plus généralement que la question posée est vague et trop complexe. Nombre de Grecs pourraient bien ne pas être en mesure de voter, soit parce qu'ils se trouvent à l'étranger et doivent rentrer au pays pour participer, soit parce qu'ils n'ont pas assez d'argent pour se rendre dans leur circonscription, en raison des limitations imposées aux retraits d'argent.
Derniers meetings Le Premier ministre Alexis Tsipras, qui appelle à voter "non", doit s'exprimer lors d'un rassemblement ce vendredi soir place Syntagma, en plein coeur d'Athènes, tandis que les partisans du "oui" prévoient de tenir un meeting non loin de là, dans l'ancien stade olympique. Les partisans du "non" ont dirigé pour une bonne part leur ressentiment contre l'Allemagne. Sur une affiche placardée ici et là, on peut voir une photo du ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, accompagnée de ces phrases: "Depuis cinq ans, il suce votre sang. Dites-lui NON maintenant!" Le dernier sondage en date a été publié vendredi matin alors que le Fonds monétaire international (FMI) venait d'estimer que la Grèce aurait encore besoin de 50 milliards d'euros d'aides au cours des trois prochaines années. Cette évaluation souligne l'ampleur des problèmes auxquels sera confronté Athènes, quel que soit le résultat du référendum dimanche soir.
Blocages et tensions La confrontation entre Athènes et ses partenaires de la zone euro se poursuit, à l'approche du référendum de dimanche. Le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis a promis de démissionner en cas de "oui". Pour Jeroen Dijsselbloem, une victoire du "non" placerait la Grèce mais aussi l'Europe "dans une position très difficile". "L'avenir de la Grèce est entre les mains du peuple grec", a dit le président de l'Eurogroupe au parlement néerlandais. "Si l'issue est positive, il y aura évidemment, du côté européen, une volonté d'aider la Grèce à s'en sortir", a-t-il dit. "Si le résultat est négatif, l'avenir sera considérablement plus compliqué". Le Premier ministre grec Alexis Tsipras a, lui, appelé les Grecs "à l'unité nationale" pour "surmonter la difficulté temporaire" que traverse le pays. Il a promis qu'au lendemain du référendum de dimanche, le pays "sera uni". De son côté, M. Varoufakis a lié son propre avenir à l'issue du référendum, assurant qu'il démissionnerait si le "oui" l'emportait. Il s'est dit par ailleurs convaincu qu'Athènes pourrait négocier de meilleures conditions, dont un allégement de sa dette, si les électeurs rejettent les conditions proposées actuellement par les Européens. Il a ajouté que la question d'une sortie de l'euro ne se pose de toute façon pas. Les marchés financiers, qui ont été relativement peu affectés par les négociations entre Bruxelles et la Grèce, se sont montrés plus nerveux jeudi. Le coût des emprunts de l'Espagne et de l'Italie ont atteint leurs plus hauts niveaux depuis plusieurs mois.
Démenti Pour le président de l'Eurogroupe, il est clair que la Grèce risque de "n'avoir plus aucune place dans la zone euro" si elle vote "non" au référendum. Le ministre français des Finances, Michel Sapin, a jugé jeudi matin impossible de conclure un accord avec Athènes avant le référendum, en rupture avec la ligne défendue jusqu'à la veille par le président François Hollande dans le dossier de la crise grecque. Cherchant à rassurer les électeurs grecs, Nikos Pappas, ministre d'Etat et l'un des proches conseillers d'Alexis Tsipras, a démenti que le gouvernement grec imposerait un prélèvement sur les dépôts bancaires. Les banques, a-t-il dit, rouvriront dès qu'un accord aura été trouvé entre Athènes et ses créanciers internationaux.