Cinq décennies après l'indépendance, les crimes coloniaux ne sont toujours pas reconnus par la France officielle, alors que l'Algérie commémore mardi le 73e anniversaire des événements du 8 mai 1945, où plus de 45.000 Algériens ont été massacrés dans une vague de répression sanglante perpétrée par les forces coloniales contre une population qui réclamait son droit légitime à la liberté et à l'indépendance. Alors que les Français célébraient la victoire des Alliés contre l'Allemagne nazie, marquant la fin de la Seconde guerre mondiale, des dizaines de milliers d'Algériens sont descendus dans les rues, à Sétif, Guelma et Kherrata, ainsi que dans d'autres villes du pays, répondant à l'appel à une marche pacifique pour l'indépendance de l'Algérie. Il s'agit d'un droit légitime après plus d'un siècle d'une colonisation ayant affligé tous types de sévices, de brutalité et d'actes inhumains au peuple algérien, le privant de ses droits les plus élémentaires. "Mes convictions sur ce point n'ont pas changé depuis que j'ai été élu président de la République", avait-il affirmé lors de sa dernière visite à Alger en décembre 2017, ajoutant: "Je suis d'une génération de Français pour qui les crimes de la colonisation européenne sont incontestables et font partie de notre histoire". Il a estimé qu'il ne faut pas s'"enfermer" dans ce passé mais "construire un avenir commun et une espérance". Pour le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, il y a une "question d'âge du président Macron et une question d'époque, parce qu'il ne faut pas, à chaque visite présidentielle, revenir sans arrêt sur le passé". D'après Le Drian, "il faut dire que ce passé a eu lieu, que ce passé était douloureux, parfois dramatique, et dire aussi qu'entre nos deux pays, il y a une chance historique de collaborer ensemble". Dans le même sillage, l'ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, a noté, récemment, que le dossier mémoriel entre les deux pays "avance discrètement ou parfois trop discrètement, mais il avance". Pour sa part, l'Algérie, par la voix de son ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, la France "reconnaitra tôt au tard", les crimes qu'elle a commis pendant 132 ans de colonisation, mettant en avant le droit des générations montantes de tout savoir sur les pratiques répressives des politiques coloniales. La vérité sur ces pratiques reste toutefois inaccessible aux Algériens, a-t-il relevé, précisant que "seulement 2 % de la totalité des archives, qui sont un bien et un droit de l'Algérie, ont été restitués par la France". Pour le ministre des Moudjahidine, ce dossier reste en suspens aux côtés de ceux inhérents aux disparus pendant la guerre d'indépendance et aux indemnisations des victimes des essais nucléaires dans le Sahara. Le chemin semble encore long pour que le dossier mémoriel entre l'Algérie et la France soit définitivement clos, et en premier lieu en ce qui concerne la reconnaissance des crimes coloniaux. Le combat continue aussi à travers la société civile, les historiens, les juristes et les avocats.