Le président Emmanuel Macron a décidé vendredi de créer un comité d'historiens pour examiner le rôle joué par la France durant les massacres de 1994 au Rwanda, qui avaient fait un million de morts, et d'ouvrir les archives. Cette décision intervient à la veille des cérémonies dimanche dans la capitale rwandaise Kigali du 25e anniversaire du génocide des Tutsis qui a eu lieu du 7 avril 1994 jusqu'au 17 juillet 1994. Le forfait a été accompli par les Hutus soutenus à l'époque par des responsables français. L'ONU a estimé qu'environ 800 000 Rwandais, en majorité tutsis, ont perdu la vie durant ces trois mois. Le Rwanda accuse depuis des années la France de complicité dans le génocide, ce qui a donné lieu à des relations diplomatiques tendues entre les deux pays. Mais, en mai 2018, le président Macron a pris un engagement, à l'issue d'une rencontre avec le président rwandais Paul Kagame en mai 2018 à Paris, pour faire la lumière sur cette tragédie. A cet effet, le président français a annoncé "la mise en place d'une commission d'historiens et de chercheurs chargée de mener un travail de fond centré sur l'étude de toutes les archives françaises concernant le Rwanda entre 1990 et 1994", selon un communiqué de l'Elysée publié vendredi. Parmi les grandes zones d'ombres de cette tragédie africaine auxquelles la commission est appelée à faire de la lumière sont l'assistance militaire apportée par la France au régime du président rwandais hutu de l'époque, Juvénal Habyarimana, de 1990 à 1994 et l'attentat qui lui coûta la vie le 6 avril 1994 et qui a été le déclencheur du génocide. Par ailleurs, M. Macron a annoncé un renforcement des moyens judiciaires et policiers pour poursuivre d'éventuels participants au génocide qui se trouveraient en France. Chose que la justice française a toujours refusée. En juillet dernier, l'ancien ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a indiqué qu'au Rwanda, la France a commis une "très lourde faute, une faute politique". "Les décideurs n'ont pas voulu voir, malgré l'avis de nos services, qu'ils étaient l'ami des génocidaires?: c'est l'énorme ambiguïté de la France au Rwanda", a dit Bernard Kouchner qui se trouvait sur place dans le cadre des activités de Médecins du monde. Dans une tribune publiée vendredi sur les colonnes du Monde, l'ancien officier français, qui a servi dans cet Etat africain en 1994, Guillaume Ancel, a considéré que la France peut être accusée de "complicité de génocide", estimant que le Rwanda est "un désastre français". "Il serait temps de sortir du déni car c'est le dernier génocide du XXe siècle, celui que ma génération aurait dû empêcher. Mais ce n'est malheureusement pas ce que nous avons fait", a-t-il déclaré, indiquant que "nous avons livré des armes aux génocidaires, avant le génocide, pendant et même après. Pour sa part, l'historien Vincent Duclert, nommé par l'Elysée à la tête de la commission, a indiqué, dans une interview accordée au journal Le Monde, que la France "ne peut plus refuser l'histoire sur elle-même sur l'Afrique", soulignant "la nécessité d'établir la vérité dans ce dossier".