Le camp d'internement de "Aïn Sfa", dans la wilaya de Tissemssilt, est une autre illustration des crimes perpétrés à l'encontre des Algériens durant la période coloniale. Des moudjahidine de cette région, à l'image de M. Kassel Abderrahmane, ont encore en mémoire la barbarie de la torture qui leur fut infligée dans ces tristes lieux au cours de la lutte de libération nationale. Ce camp, implanté à 5 km de la ville de Tissemsilt, constituait avant 1955 une ferme d'un colon appelé "Polo", qui s'étendait sur une vaste zone de terres agricoles fertiles dont les véritables propriétaires, des Algériens, en furent spoliés. L'un des détenus, le moudjahid Kassel Abderrahmane, âgé de 75 ans, se souvient que c'est en 1955 que cette ferme fut reconvertie en centre de détention. "L'armée coloniale usait de diverses méthodes de torture à l'encontre des citoyens en général et des moudjahidine en particulier", a-t-il confié, ajoutant que l'officier français appelé "Atos", premier dirigeant des opérations d'interrogatoire et de torture, avait à son actif plusieurs tueries collectives de prisonniers sans autre forme procès. Et M. Kassel de témoigner que dans le centre de détention qui abritait le commandement militaire, "tous les moyens disponibles étaient tolérés pour la pratique de la torture, dont le générateur électrique et la baignoire". Après avoir subi ces souffrances atroces, les détenus étaient ensuite pendus ou traînés et mutilés à mort, a encore évoqué l'homme qui n'est pas près d'oublier les scènes douloureuses de l'assassinat sauvage des trois frères Bouskin. "Dévorés une heure durant par des chiens dressés par les soldats français...", a lâché en larmes M. Kassel. Même les enfants ne furent pas épargnés par l'enfer de ce camp, poursuit-il en citant notamment Ali Bey, âgé alors de 13 ans à peine, qui fut arrêté en 1957 avec sa famille avant d'être torturé pendant huit jours puis transféré parmi les autres prisonniers. La liste des personnes exécutées dans ce camp s'élève à 1.871 martyrs, et ce, durant la seule période allant de 1955 à 1958, selon des données de la Direction des moudjahidine de la wilaya de Tissemsilt qui font état d'un total d'environ 5.000 détenus jusqu'à l'indépendance. Pour rendre l'hommage dû aux chouhada de la glorieuse révolution de Novembre, un carré des Martyrs a été aménagé à l'intérieur même de ce camp. Cinq autres espaces de recueillement à leur mémoire sont également prévus au chef-lieu de wilaya, à Khemisti, à Theniet El-Had, à Bordj Bounâama et à Lardjam.