Les acquis de la femme rurale algérienne sont "insuffisants" et en-deçà de ce que prévoit la loi, a affirmé, jeudi à Alger, la présidente du Mouvement féminin algérien de solidarité avec la femme rurale, Saïda Benhabylès. S'exprimant à la veille de la célébration de la Journée mondiale de la femme rurale qui coïncide avec le 15 octobre de chaque année, Mme Benhabylès a souligné à l'APS que malgré la volonté politique affichée pour promouvoir la situation de la femme rurale, "la discrimination à son égard persiste". Elle a rappelé, dans ce contexte, la politique du renouveau rural prônée par le ministère de l'Agriculture" et la volonté de soutenir le monde rural, en général, et la femme rurale, en particulier, ainsi que la Constitution qui garantie l'égalité entre les deux sexes. "Même si toutes nos lois sont non discriminatoires et stipulent d'intégrer la femme rurale, au même pied d'égalité que l'homme, dans le monde du travail, il persiste encore un grand décalage entre ces lois et les acquis obtenus par la femme rurale", a-t-elle fait remarquer. Mme Benhabylès, qui est également la co-présidente de la Fédération internationale des associations des victimes du terrorisme et a obtenu le prix de l'ONU pour la société civile, a ajouté que le programme de développement rural est une politique "encourageante" au profit de la femme rurale qui "l'aidera à sortir de son isolement et faire d'elle un réel facteur de développement durable". Pour elle, la réalisation de tous les objectifs assignés en matière de promotion de la femme rurale en dépit de la volonté politique et de la mobilisation d'importants moyens à cet effet, reste le niveau de culture et des mentalités. "Les mentalités, qui n'ont pas évolué à l'égard de la femme, la relèguent au second plan et à un niveau inférieur à celui de l'homme", a-t-elle noté donnant l'exemple des projets et d'entreprises octroyés au niveau local aux hommes et "presque jamais aux femmes". Elle a également cité le micro-crédit et les programmes de soutien agricole qui, a-t-elle relevé, en raison des mentalités "rétrogrades" et "discriminatoires", sont du "domaine exclusif" de l'homme. Pour remédier à cette situation et afin de promouvoir la situation de la femme rurale, Mme Benhabylès lance un appel à tous les acteurs de la société, notamment les médias, les partis politiques et les hommes de culte afin de prendre part à une campagne de sensibilisation autour de la question. Il s'agit, a-t-elle expliqué, de sensibiliser pour "impliquer la femme rurale dans tous les projets de la communauté qui bénéficiera des retombées positives de cette intégration". Il s'agit aussi de "rétablir une justice sociale et l'équilibre de la société ainsi que l'amélioration de la situation socio-économique", a-t-elle dit. Mme Benhabylès a aussi réitéré l'appel à la nécessité de créer un département de la femme rurale au niveau de la ministre déléguée chargée de la Famille et de la Condition féminine. Elle a déploré, à cette occasion, le "manque de coordination" entre les associations activant dans le domaine et les élus locaux, soulignant l'importance d'œuvrer pour impliquer les élus locaux à contribuer à la promotion de la femme rurale. Pour elle, la femme rurale, dont le nombre avoisine les 8 millions en Algérie, demeure une "source de sacrifice" pour l'Algérie et de "don de soi", rappelant que la femme rurale avait "largement" participé à cultiver et à vulgariser la culture de la paix et aidé à la réussite de l'application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. La femme rurale a toujours joué un "rôle pionnier" dans la consécration de la paix et la réalisation du développement et de l'autosuffisance alimentaire, a-t-elle dit. Pourtant, cette même femme "a toujours été la première victime de tous les problèmes sociaux, éloignée qu'elle est de l'administration et sans défense", a ajouté Mme Benhabylès. Elle a aussi souligné la nécessité pour les entreprises et la société civile de prendre en charge la femme rurale pour "la préserver contre toutes les formes d'exploitation et de la faire sortir de l'analphabétisme". Elle a souligné, dans ce contexte, l'importance de la promotion de la femme rurale pour lui permettre de recouvrer sa "véritable place" qui nécessite d'abord "la dynamisation de son rôle et l'élargissement de ses perspectives à travers les différents programmes lancés, notamment les projets d'investissement au profit de la femme rurale en apiculture et aviculture, outre l'intensification des activités de proximité couvrant les différents aspects de la vie rurale". Célébrer la Journée mondiale de la femme rurale est pour le mouvement de Mme Benhabylès une occasion pour "évaluer de ce qui a été réalisé en matière de promotion des aptitudes et compétences de cette catégorie active et d'identifier les lacunes qui entravent la réalisation des objectifs escomptés". La journée sera célébrée cette année à Laghouat, "une zone rurale qui a souffert du terrorisme et qui reprend vie", a-t-elle précisé, ajoutant que son mouvement poursuivra sa campagne de sensibilisation à l'échelle nationale et "offre encore et toujours un espace d'écoute, d'orientation, d'information et d'accompagnement". L'idée de consacrer une Journée mondiale à la femme rurale avait été évoquée, pour la première fois, lors de la 4e conférence mondiale de la femme, tenue en 1995 à Pékin. L'Algérie, qui célèbre cette journée depuis 1996, avait été l'initiatrice de cette proposition qui a trouvé un écho favorable auprès des pays participants, a noté Mme Benhabylès.