Le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, a prononcé, ce samedi 14 avril, un message à l'occasion de la célébration de la Journée du savoir (Youm el‐Ilm), dont voici le texte intégral : « Mesdames, Messieurs, Ce 16 avril que nous commémorons aujourd'hui intervient alors que l'Algérie s'attelle à l'approfondissement du processus démocratique et s'apprête à célébrer le cinquantenaire de son indépendance. L'Algérie, dès le recouvrement de sa souveraineté, s'est attachée à rattraper le retard accumulé durant la période coloniale en faisant de l'éducation, de l'enseignement et des sciences une de ses priorités. La démocratisation et la gratuité de l'enseignement, le développement des infrastructures de formation et de recherche à travers le territoire national ont été parmi les axes prioritaires des politiques d'investissement durant les deux dernières décennies. Pour arriver à un encadrement suffisant et de qualité, le nombre d'enseignants et leur formation ont été une préoccupation majeure de l'Etat. La célébration de cette date est une occasion pour la nation de mesurer le chemin parcouru et de rendre hommage à toutes celles et à tous ceux qui ont, avec courage, détermination et abnégation, assuré la rentrée universitaire et scolaire de l'année 1962 et continuent d'assurer cette noble mission de transmettre le savoir et de promouvoir la formation. Le déficit légué par 132 ans de colonisation a été largement comblé. La gratuité et l'égal accès à la formation ont donné leur chance à tous les Algériens et Algériennes d'accéder au plus haut niveau de qualification et de compétence et d'assurer dignement l'encadrement du pays. Pour ceux de nos compatriotes, qui ont décidé de s'installer à l'étranger, leur intégration et la reconnaissance de leur compétence dans leurs pays d'accueil sont une fierté pour ceux qui les ont formés et une fierté pour la nation. Leur attachement à leur pays d'origine et leur disponibilité lorsqu'ils sont sollicités doivent, dans ce contexte, être salués. Les appréciations apportées par les institutions internationales d'évaluation sur les performances de notre système de formation et de recherche peuvent être contestables et sont parfois contestées, elles ont néanmoins le mérite de nous indiquer les défis à relever et nous amènent à revoir et à parfaire notre système éducatif pour l'adapter aux efforts engagés dans le cadre des politiques publiques et l'élever au niveau souhaité. Dans le contexte de mondialisation des échanges et de rapidité de l'information, l'Algérie a opté résolument dans son système de formation, de recherche et de communications pour les nouvelles technologies d'information et de communication, comblant ainsi progressivement la fracture numérique qui la sépare des pays développés. Le défi à venir est de réduire d'urgence les fractures de la connaissance. Participer à l'élaboration du contenu de ce qui circule et rester vigilants sur la fiabilité des informations est une mission que nous confions à nos jeunes virtuoses des nouvelles technologies soucieux des intérêts de leur pays et engagés dans la bataille de la connaissance. L'évolution des sciences et des technologies est de plus en plus rapide et la force des nations réside désormais dans leur capacité à produire des connaissances, à les transformer en innovations et en richesses. Dans cette nouvelle configuration, nous sommes face à des centres producteurs de savoirs et d'innovation et des cercles périphériques plus ou moins proches de ces centres. L'enjeu est de s'y intégrer au mieux de nos capacités, de nos besoins et des intérêts de notre pays. Nous avons engagé, au cours des deux derniers programmes quinquennaux, des travaux gigantesques à la pointe des dernières technologies dans le domaine de l'hydraulique, avec notamment le transfert d'eau, et dans le domaine des travaux publics, avec les ouvrages d'art de l'autoroute est-ouest. Ces programmes structurants pour le développement économique et social que nous avons engagés constituent pour nos jeunes ingénieurs et techniciens le meilleur moyen d'apprendre et de développer des technologies encore plus innovantes. Car le véritable progrès est d'allier le développement économique et social avec le développement scientifique et technologique. C'est dans cet esprit que l'effort de ces dix dernières années a porté plus particulièrement sur l'activité de recherche, consacrée par la loi parmi les priorités nationales pour accompagner le développement économique et social du pays. Et c'est en développant une base scientifique nationale que notre pays pourra absorber les progrès scientifique, les adapter à ses propres besoins et contribuer aux efforts de recherche développés dans le monde. Conscients du rôle des formateurs et soucieux de leur stabilité, les efforts de l'Etat ont également porté sur l'amélioration des conditions socio-économiques des enseignants, tous paliers confondus, et l'amélioration des conditions d'exercice des activités pédagogiques et scientifiques. Le prix scientifique que nous avons institué relève de cette volonté de consolider le lien entre les forces scientifiques et les forces productives du pays. Ce prix, attribué annuellement, est une reconnaissance de la nation aux producteurs de la connaissance. Cette volonté de nous intégrer à cette économie mondialisée ne saurait nous faire oublier notre histoire et notre héritage culturel. Et c'est sur la base de cette conviction qu'une politique de préservation, de sauvegarde et de promotion de notre patrimoine culturel matériel et immatériel a été mise en place. Encadrée par une loi, dont le gouvernement assure la mise en oeuvre, cette politique ne peut cependant relever de sa seule responsabilité. Elle exige une mobilisation active de tous les acteurs. Médinas, Ksour historiques, foggaras, zaouïas, manuscrits, mosquées et autres centres et vestiges sont des symboles de vie et de mémoire, pour ceux qui y vivent mais aussi pour l'ensemble de la collectivité nationale. Les manifestations dédiées à la culture arabe à Alger et à la culture musulmane à Tlemcen ont permis aux spécialistes, mais également à tous les Algériens et Algériennes, de renouer, chacun à sa manière, avec quelques pans d'une histoire commune avec le monde arabe et avec le monde musulman Le festival panafricain a été organisé, à son tour, comme expression franche de notre africanité. La réflexion engagée sur le devenir de l'Afrique, par l'échange, l'interaction et le rappel des parcours militants de ses peuples, témoigne du lien étroit entre les fondements culturels et la substance du développement. Au-delà de leur caractère festif, ces manifestations ont été l'occasion, à chaque fois renouvelée, de replonger dans notre histoire et de renouer avec nos traditions millénaires d'ouverture qui ont toujours caractérisé l'Algérie riche de sa diversité et fière de ses héritages. Mesdames, Messieurs, Les réformes engagées pour consolider le processus démocratique ne sont et ne peuvent être dissociées de cet engagement soutenu pour une société fière de son passé et ouverte sur le monde. Car les institutions politiques ne peuvent fonctionner correctement que si les fondements culturels en sont bien assurés et liés à nos valeurs civilisationnelles. Comme elles ne peuvent être dissociées des efforts en matière de protection des catégories vulnérables de notre société et de la préservation des acquis sociaux. Les secteurs de l'éducation, de la santé, de l'habitat, de la protection sociale, de l'emploi et de la solidarité nationale ont, de manière constante, bénéficié d'une attention particulière. Cette démarche relève d'une volonté politique assumée de ne pas dissocier les droits culturels, économiques et sociaux des droits politiques. Cette conviction tire ses fondements de notre expérience historique et il est important que la jeune génération, qui est aujourd'hui la force de ce pays, s'en fasse le relais et en assure la garde et la préservation. Notre jeunesse, en cette journée particulière, ne saurait oublier l'action militante et engagée de nos savants qui n'ont jamais dissocié l'accès à la connaissance et au savoir du combat pour l'indépendance et du souci de leurs identité, liberté et honneur. Nous avons décidé de tourner la page de la période coloniale pour aller de l'avant mais le peuple algérien n'est pas et ne sera pas amnésique. Le peuple algérien, comme tous les peuples sous domination, a appris qu'aucune partie étrangère, aussi démocratique et développée soit-elle, ne lui apportera le développement et la démocratie. Ce qui se passe aujourd'hui sous couvert de démocratie et de respect des droits de l'homme reste sujet à débats. Car la démocratie comme le développement ne s'octroie pas comme un don et ne s'importe pas comme une usine clés en mains. Le multipartisme, le pluralisme syndical, la liberté de la presse constitutionnalisés dans notre pays en 1989 ont été une véritable école de formation et d'apprentissage, renouant en cela avec les traditions de pluralité du mouvement national. Les réformes engagées durant cette année pour une plus grande participation des femmes, des universitaires, des jeunes, sur les incompatibilités avec les fonctions d'élus, l'amélioration des conditions d'exercice des droits politiques par l'amendement de la loi électorale, les lois sur les partis et les associations vont dans le sens d'un approfondissement du processus démocratique déjà engagé. Mais cette démarche de consolidation des acquis en matière de droits politiques ne saurait être isolée et évaluée sans prendre en compte les acquis et la poursuite des plans de développement et l'amélioration des conditions socio-économiques de notre peuple. Elle ne peut être isolée des mesures prises pour la paix, dans le cadre de la réconciliation nationale. C'est dans une société apaisée, réconciliée avec son histoire, assurée de son destin que le développement et la démocratie trouvent leur véritable signification. C'est là l'enjeu des élections prochaines, c'est là le sens des réformes engagées. Mesdames et Messieurs, À la veille d'échéances politiques majeures qui interviennent dans un climat de défis internes et externes très sensibles, je voudrais rappeler que l'Algérie n'a jamais été en marge de l'histoire. Elle a été à l'avant-garde des pays qui ont accompagné le mouvement d'émancipation qui s'est développé dans le monde au lendemain de la 2ème guerre mondiale. Elle a mené une grande révolution sous l'étendard des valeurs humaines universelles que sont le droit, la liberté, la justice, la tolérance et les droits de l'Homme et tout ce qui donne sa quintessence à la démocratie, des valeurs qui sont restées vivaces et ancrées dans notre société même durant les phases les plus difficiles de l'Histoire. Telle est l'Algérie aujourd'hui, un pays pionnier qui s'est soumis à une expérience démocratique pluraliste élargie qu'il œuvre à consacrer et approfondir à tous les niveaux. De même, qu'il veille au respect et à la promotion des libertés et des droits de l'Homme dans leur aspects politique, économique, social et culturel, tout en poursuivant l'adaptation de son arsenal juridique national aux besoins et à l'évolution de la société d'une part, et aux transformations globales et exigences des standards internationaux en vigueur, d'autre part. Notre pays, qui s'est appliqué avec constance à jeter les fondements d'un développement soutenu tant sur le plan matériel que sur le plan humain, et a figuré parmi les premiers pays ayant exigé la démocratisation des relations internationales en prônant un nouvel ordre mondial plus équitable, plus équilibré et plus solidaire, ne pourrait se résigner à être aujourd'hui à la traîne du remarquable progrès économique, scientifique et technologique, ni à manquer le train des mutations accélérées que connaît le monde dans les domaines de la pratique démocratique, des libertés individuelles et collectives et des droits de l'Homme. Nous vivons une mondialisation globale, porteuse de changement radical qui impose une prise de conscience collective de l'importance des défis à relever et de la sensibilité du contexte et exige la mobilisation de toutes les énergies nationales afin de parachever les programmes de réformes et de construction inscrits, et faire aboutir les prochaines échéances politiques que nous considérons comme une phase cruciale et un pari décisif qu'il nous incombe de gagner car nous n'avons d'autre choix que de réussir. L'Histoire peut se répéter encore et encore pour les peuples qui ne savent pas en déchiffrer le sens et sont incapables d'en tirer les enseignements. Et s'ils ne s'efforçaient pas à être partie prenante à son élaboration, l'Histoire sera sûrement forgée sans eux, voire à leur dépens. Les vents furieux de la mondialisation souffleront et ceux qui ne prendront pas les devants par la réforme, le renouveau et ne s'armeront pas de convictions, de méthodologie et de perspicacité, pourraient se retrouver en difficulté devant un changement ravageur qu'ils n'avaient ni prévu ni souhaité. Les épreuves que notre nation a vécues durant les années de la tragédie nationale, les difficultés qu'elle a endurées et les malheurs que notre peuple a dû subir seul, sans l'appui ni l'aide de quiconque, ont fait comprendre à notre jeunesse ce que la destruction d'un pays et la lutte fratricide signifient réellement. C'est pourquoi elle n'a pas hésité a répondre favorablement à l'appel de conciliation pour concrétiser le miracle de la concorde et de la réconciliation, et valoriser la paix, la sécurité et la quiétude. L'Etat tire sa légitimité de la volonté du peuple, source de tous les pouvoirs, tel que consigné dans la Constitution de la République. La démocratie, c'est la souveraineté ou le pouvoir du peuple, exercé à travers les institutions constitutionnelles qu'il choisit, et les représentants qu'il élit en toute liberté, pour assurer la gestion de ses affaires et celles du pays, du maire jusqu'au Président de la République. Ainsi, l'élection devient le mécanisme indispensable à l'incarnation de la volonté du peuple. C'est la meilleure voie pour la consécration de la légitimité constitutionnelle et le garant qui permet de protéger la démocratie de tout dépassement ou dérive. C'est pourquoi l'élection doit être exercée en ce qu'elle constitue l'acte démocratique par excellence, l'indicateur de la citoyenneté et du civisme, un engagement national et un acte civilisationnel, enfin un droit et un devoir constitutionnel qu'on ne saurait nullement sous-estimer ou négliger. Aucune démocratie véritable, représentative ou participative soit-elle, ne peut de ce fait, être promue sans assemblées élues aux niveaux local et national, des assemblées qui rassemblent différents courants intellectuels et politiques, et réunissent une composante humaine diversifiée et de qualité, des assemblées dignes de confiance comme cadre de réflexion et d'action, comme réservoir de compétence et de savoir-faire, comme instance de consultation et de contrôle, des assemblées que nous voulons représentatives de la volonté du peuple, de tout le peuple algérien avec ses différentes composantes, catégories et tendances, avec sa majorité et sa minorité, ses grands partis et ses petits partis, des assemblées qui adhèrent à ses préoccupations et répondent à ses aspirations, des assemblées que nous voulons pleinement engagées dans l'élaboration des textes et des décisions, et dans la mise en place des plans et politiques à même de servir le pays et la population. Ceci démontre l'importance de la participation massive au scrutin du 10 mai prochain, et de la réussite des élections législatives à l'issue desquelles une haute instance de législation et de contrôle figurera parmi les grandes institutions de la République. L'Etat a donné toutes les garanties pour des élections libres et transparentes. Il appartient, donc, aux partis politiques, aux citoyennes et citoyens d'assumer leur rôle et de prendre leur responsabilité, afin que les sacrifices des femmes et des hommes qui ont lutté pour l'indépendance et l'intégrité territoriale de ce pays, ne soient pas vains, et que ceux qui se sont voués à la défense de sa souveraineté et de son développement puissent avoir leur part de reconnaissance. Je vous remercie de votre attention. »