La ferme El Hedjim, qui s'étend sur 5 hectares, partagée entre deux communes (Khraïcia et Baba Hassen), a abrité en juillet 1954 le séminaire de préparation du déclenchement de la Révolution auquel ont pris part notamment Mustapha Ben Boulaïd, Mourad Didouche, Larbi Ben M'Hidi, Rabah Bitat, Abdelhafid Boussouf et Boudjemaâ Souidani. Une montagne de terre par-ci, des excavations par-là. Le tracé de la 2e rocade sud reliant Boudouaou dans la wilaya de Boumerdès à Zéralda dans la capitale, prend forme et s'enfonce droit dans la ferme El Hedjim, plus connue sous le nom de « ferme de Khraïcia ». Initialement, la rocade sud devait prendre un autre itinéraire, à quelque 2,5 km de la ferme. Mais les responsables du projet ont décidé de dévier le tracé pour éviter des habitations. Le nouveau tracé devrait ainsi passer par la ferme El Hedjim. Une équipe d'ingénieurs a été dépêchée sur place, il y a plusieurs mois, pour procéder au relevé typographique du site. Mais les héritiers et propriétaires de la ferme étaient présents et ont dû renvoyer l'équipe. La raison ? Ils n'ont jamais été avisés. « Nous n'avons pas été informés de la décision de faire passer cette autoroute par notre propriété. Nous avons été surpris de voir cette équipe sur notre ferme, sans être munie d'une autorisation et sans que nous en soyons avisés à l'avance », s'indigne Ghalib El Hedjim, l'un des héritiers. La famille El Hedjim est « très attachée » à cette ferme, car elle représente à ses yeux une partie de leur histoire familiale. Mais aussi et surtout elle porte en elle un pan de l'histoire de la guerre de Libération nationale. Cette ferme, qui s'étend sur 5 hectares, partagée entre deux communes (Khraïcia et Baba Hassen), a abrité en juillet 1954 le séminaire de préparation du déclenchement de la Révolution. Parmi ceux qui ont participé à ce séminaire, on cite Mustapha Ben Boulaïd, Mourad Didouche, Larbi Ben M'hidi, Rabah Bitat, Abdelhafid Boussouf et Boudjemaâ Souidani. La maison, qui existe toujours dans cette ferme, avait servi aux moudjahidine comme lieu d'apprentissage des techniques de fabrication d'explosifs tels que la cheddite et la poudre noire. « Ils ont appris (dans cette maison) à fabriquer des bombes défensives et offensives incendiaires, à poser les bombes munies de minuterie et les bombes antipersonnel », est-il écrit dans un document historique signé par de grandes figures de la Révolution à l'image de Rabah Bitat, Zoubir Bouadjadj et Othman Belouizdad. Au vu de l'importance des événements qu'elle a abrités, cette ferme a été reconnue et répertoriée site historique national. Le projet de l'autoroute qui risque de traverser de long en large ce site inquiète la famille El Hedjim, qui affirme avoir œuvré depuis l'Indépendance à le conserver, refusant d'en vendre la moindre parcelle. « Nous avons eu plusieurs propositions pour vendre et nous les avons toutes rejetées », assure Ghalib. Après avoir résisté à toutes les offres alléchantes, la famille El Hedjim risque ainsi de subir une expropriation. Ghalib dit avoir frappé à toutes les portes. En vain. « Nous avons vu avec les présidents d'APC des deux communes sur lesquelles se trouve notre propriété, à savoir Khraïcia et Baba Hassen, nous avons adressé un recours au wali d'Alger et nous avons écrit au ministre des Moudjahidine et même au président de la République », a-t-il indiqué, précisant avoir été reçu par le ministre des Travaux publics, Amar Ghoul. La famille El Hedjim dit avoir proposé au ministre une solution : céder la ferme contre un autre terrain dans les alentours. « Nous sommes conscients de l'importance du projet. Nous ne voulons pas l'entraver. Mais il est de notre droit de demander un transfert de propriété », a réclamé notre interlocuteur, indiquant que concrètement, rien ne leur a été proposé. Il faut dire que cette ferme a été convoitée par plusieurs parties dont l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), qui a voulu l'acheter pour y construire un musée et une maison de repos pour anciens maquisards. Face à l'incertitude sur le sort de sa propriété, la famille El Hedjim prend son mal en patience et continue d'espérer voir un jour le bout du tunnel.