L'administrateur judiciaire aurait ordonné au PDG ainsi qu'à 20 cadres du groupe de ne pas entrer au complexe. La situation de Tonic Emballage s'envenime. Le groupe meurt à petit feu. Hier, lors de notre passage dans le complexe, l'unité sacherie était à l'arrêt. Beaucoup d'autres machines dans les onze unités que compte le complexe risquent aussi de connaître le même sort, en raison du manque de pièces de rechange et de matière première. Du coup, les 4000 employés du groupe s'inquiètent pour leur avenir. Et ce n'est pas à cause de la coupure d'électricité – qui a été d'ailleurs rétablie hier – survenue mardi en raison du non-paiement des factures Sonelgaz, cumulant 9,5 milliards de centimes. Le problème est ailleurs, il est beaucoup plus profond que cela. Les travailleurs rencontrés hier au complexe n'ont pas hésité à l'imputer à l'administrateur judiciaire. Ce dernier a, selon une source proche de l'administration de Tonic, ordonné au PDG, M. Djerar, ainsi qu'à vingt autres cadres du groupe, de ne plus remettre les pieds sur le site à partir de ce samedi. Une information démentie toutefois par l'avocat de M. Djerar qui, contacté hier, nous a indiqué que « rien ne nous a été notifié par l'administrateur ». Il va sans dire que cet administrateur judiciaire, M. Bouraoui, est accusé de vouloir « liquider » Tonic. « L'administrateur veut assassiner Tonic pour qu'il ne parvienne pas à payer ses dettes », selon un cadre du groupe. Un cadre financier qui a requis l'anonymat estime que « tous les indices indiquent qu'on va vers la liquidation en bonne et due forme » du groupe. L'administrateur judiciaire est aux abonnés absents. « C'est la tête de Djerar qu'on veut, sans plus », estime notre interlocuteur, qui ajoute : « En profitant de ses erreurs, ils veulent en faire un bouc émissaire. » Notre interlocuteur a tout de même reconnu que sur le plan technique, « Djerar a mal géré ». Mais selon lui, « la Badr pouvait réorganiser le complexe pour avoir son argent ». Il relève par ailleurs « une faiblesse sur le plan technique chez les responsables qui ont géré le groupe ». Pour lui, les responsables du groupe « n'ont pas exploité les solutions qui auraient pu sauver Tonic ». Les travailleurs interpellent le président de la République pour sauver le groupe. « L'administrateur judiciaire risque de démembrer le groupe et le vendre en KG », avertit une employée du groupe. Notre interlocutrice, inquiète, dit ne pas savoir si l'entreprise va fermer ou pas. « C'est un redressement qu'on veut, pas une liquidation », a-t-elle lancé. Celle-ci est convaincue qu'il y a un moyen de rembourser la dette de la Badr. Il faut rappeler que le groupe a été mis sous séquestre judiciaire depuis 2005 pour non-remboursement de prêts contractés auprès de la Badr. Cette banque a exigé le recouvrement de la totalité de ses créances, estimées à 65 milliards de dinars. « Il faut nous donner du temps. Est-ce qu'on a exploré toutes les solutions pour sauver l'entreprise ? », s'interrogent les représentants des travailleurs. Pour l'un d'eux, « c'est un crime économique s'ils procèdent de cette manière ». « Ce qui nous intéresse, c'est de travailler, de produire et de vendre », ajoute pour sa part une autre employée de l'entreprise, qui n'hésite pas à charger l'administrateur de vouloir à tout prix « couler le groupe ». « Ce qui intéresse cet administrateur, ce sont les intérêts de l'étranger », accuse-t-elle, estimant que « Tonic est en mesure de rembourser ses dettes si on lui fixe un échéancier ». Dans l'unité sacherie, les machines sont à l'arrêt. « Les machines sont sur cale car l'administrateur ne veut pas nous acheter de la matière première (papier). On a même des bons de commande de 100 millions de sacs », révèle une employée de cette unité. Par ailleurs, beaucoup d'autres unités risquent de connaître le même sort en raison du manque de matière première. Inquiets, les 4000 travailleurs du groupe Tonic Emballage demandent l'intervention du président de la République pour assainir la situation de leur complexe. « Nous voulons surtout que le Président ne compare pas le PDG de Tonic à Khalifa, car celui de Tonic est là, il souffre avec nous », disent-ils. « On veut juste savoir où on va », s'interrogent-ils.