Le Mexique doit être dans le domaine économique une référence pour l'Algérie. La réalité est là. Pour donner plus de consistance à notre vision de la chose, soulignons que pour la première fois le Mexique dépasse l'Espagne, elle-même classée douzième par la Banque mondiale. Belle revanche de l'histoire et c'est autant dire que le colonisé a appris la leçon et dame le pion au maître. Mexique : Correspondance particulière Ce pays d'Amérique centrale engrange en moyenne 24 milliards de dollars d'investissements étrangers chaque année. En 36 ans de croissance économique, le Mexique exporte un peu plus de 120 milliards de dollars vers les USA, soit plus que toute l'Europe réunie et opère des échanges économiques à hauteur de 220 milliards de dollars. Le peuple mexicain est travailleur et besogneux, malgré tous les clichés qu'on lui colle ; c'est une certitude et ce n'est pas un hasard si ses ancêtres, les Aztèques, ont construit de superbes pyramides, 500 ans avant J.-C. Ne cherchons pas loin pour démontrer la puissance du pays d'Emiliano Zapata comparativement à l'Algérie. Nous avons hérité de superbes usines de fabrication de ciment. Le résultat nous le connaissons tous et le prix ainsi que la rareté de notre ciment en sont la preuve. Au Mexique, le géant mexicain du ciment, Cemex, numéro deux mondial, profitant de la faiblesse du dollar a racheté 22 usines aux USA devenant le premier fabricant, une année après avoir racheté le n°4 mondial du ciment l'australien Rinker. Avec une mise de 15 milliards de dollars, Cemex s'est converti en une vraie curiosité de management, cotée à la Bourse de Mexico ainsi que celles de New York et Londres. N'est-ce pas là un exemple à suivre, puisque les mexicains, selon Omar Gouigah, premier conseiller de l'ambassade algérienne à Mexico, sont prêts à nous prêter main-forte dans tous les domaines. Mais, chez nous, nous devrons apprendre d'abord à conjuguer commerce, économie, relations, management et investissements pour espérer être dans la cour des grands. L'exemple nous vient de l'Hindou Mittal qui est passé au Mexique et y a laissé 9 milliards de dollars. Mais il faut savoir qu'à chacun de ses voyages, il est reçu par le président des Etats-Unis. En est-il ainsi en Algérie ? Par ailleurs, il est possible, selon notre diplomate, que les intermédiaires soient éliminés du réseau commercial de certains produits que l'Algérie achète à des pays et qui proviennent du Mexique. Nous citerons, dans ce cas, le concentré de jus de fruits. Le Mexique est le deuxième producteur mondial de jus de fruits après le Brésil et son produit est vendu aux fabricants algériens avec la mention « made in España ». L'investissement mexicain en Algérie Le groupe mexicain Mepoltec souhaite développer dans le secteur gazier un projet d'investissement d'un milliard de dollars en Algérie. Cet apport ne peut demeurer ignoré dans un pays où toutes les voix s'élèvent pour ouvrir l'espace de financement de projets par des étrangers. Cet investissement qui a reçu l'accord des autorités gouvernementales mexicaines consiste en la transformation du gaz naturel algérien en méthane pour, ensuite, en extraire les oléfines nécessaires à l'industrie pétrochimique. Il y a lieu d'indiquer ici que les besoins de cette industrie sont en expansion dans toute l'Amérique. Il nous a été indiqué que les promoteurs de ce projet, qui, au préalable s'étaient intéressés à l'Iran et au Nigeria, axent leur intervention sur trois pôles en Algérie. Le premier étant la valorisation de notre ressource en gaz sur le territoire national pour en extraire une meilleure plus-value. Le second est de permettre l'accès de l'Algérie aux dernières technologies en matière d'oléfines. Le troisième donne la possibilité au partenaire algérien de participer à toute la chaîne, c'est-à-dire jusqu'à la commercialisation finale du produit, permettant ainsi à l'Algérie d'accéder à moindre coût, à partir du Mexique, à l'immense marché pétrochimique d'Amérique du Nord, USA et Canada, à travers l'accord de libre-échange qui lie les trois pays. Nous saurons que la société Mepoltec a déjà acquis au Mexique, pour 5 millions de dollars, les terrains nécessaires à ce projet. Ils sont situés dans le nouveau port de Altamira, sur la côte Atlantique, proche de la frontière US du Texas. Lors de sa visite, en avril dernier au Mexique, le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, a rencontré le groupe d'investisseurs de Mepoltec qui lui a assuré le succès de ce projet. Toutefois, il a été indiqué que la partie algérienne souhaiterait que l'investissement total soit réalisé en Algérie, d'où le produit sortira fini et prêt à l'exportation. Si le projet gazier semble encore sujet à discussion entre le groupe Mepoltec et Sonatrach, il n'en demeure pas moins que des tentatives dans d'autres domaines ont abouti. A titre d'exemple, le secteur agricole algérien a bien ficelé un projet mexicain qui sera sans nul doute d'un grand apport pour nos travailleurs de la terre. Les Mexicains, « El Hendi » et l'agriculture rurale en Algérie Pour le commun des Algériens, le cactus – figuier de Barbarie appelé aussi « hendi » ou « chimbo » selon la région – se limite à la seule production du fruit. Cette évidence algérienne est pourtant fausse, si l'on sait que pour les mexicains, ce cactus dénommé « nopal » ou « opuntia » est totalement consommable, à savoir les feuilles et les fruits. Le nopal fait partie de la culture mexicaine et figure sur le drapeau de ce pays. Ainsi un projet financé par le gouvernement mexicain a-t-il été lancé pour familiariser l'agriculteur algérien avec les nouvelles techniques de production, aussi bien des feuilles que des fruits. Il s'agira aussi d'ouvrir de nouveaux marchés à la consommation et pour l'exportation de ce produit agricole. A titre de référence, il faut savoir que le Mexique en tant que premier producteur et exportateur dans le monde du nopal et de son fruit engrange 50 millions de de dollars par an avec cete plante. Les Mexicains sont sur le point d'envoyer trois experts dans le domaine pour faire des études sur le terrain et voir la possibilité de passer à la culture intensive. Omar Gouigah nous dira : « Si le projet a réussi en Egypte, pourquoi n'en serait-il pas de même chez nous ? » Avouons que l'opération en elle-même est porteuse de beaucoup d'espoirs, surtout pour la population rurale et pour les jeunes désœuvrés qui habitent les zones arides et la steppe. Le développement de notre cactus, dont les origines sont mexicaines, permettra aussi de lutter contre la désertification. En trois ans, estiment les Mexicains, ce projet atteindra son apogée. Il faut savoir que le cactus a été introduit en Algérie, précisément à l'Ouest, par les marins du conquistador Hernan Cortès, au XVIe siècle. Les autochtones appelèrent alors le fruit « karmous ennassara ». Le projet englobe le conditionnement et la transformation des produits de l'opuntia ou nopal, à savoir feuilles et fruits, ainsi que l'introduction des espèces d'opuntia adaptées au gel et à l'altitude. L'amélioration de la biodiversité du cactus n'est pas exclue ; l'Algérie a fait des propositions dans ce sens. Au-delà de son apport socioéconomique, le figuier de Barbarie, dont le nom scientifique est opuntia ficus indica (famille des cactacées), a des vertus médicinales qu'il est important de souligner. En effet, la fiche scientifique indique que la consommation de feuilles de nopal réduit le taux de glucose sanguin, abaisse le taux de cholestérol LDL ou « mauvais cholestérol », sans toutefois affecter le taux de HDL ou « bon cholestérol » et les triglycérides sanguins, soulage les douleurs gastrointestinales, prévient les ulcères gastriques, traite l'hypertrophie bénigne de la prostate. Aussi ce cactus fournit-il un colorant industriel provenant de la grana cochinilla (dactylopius coccus costa) qui est un insecte parasite du nopal utilisé depuis des millénaires pour ses propriétés colorantes en tons carmin, écarlate et pourpre, ainsi que de nombreux autres coloris par l'ajout d'autres couleurs. Le nopal produit aussi un caoutchouc et un anticorrosif. Enfin, avec le figuier de Barbarie, on peut se préparer une quarantaine de recettes « cactus » simples à réaliser. C'est un aliment appétissant et très savoureux, son goût évoque à la fois l'oseille, les haricots verts et l'asperge. L'Algérien qui, actuellement, craint la tournée dans les marchés, verra son assiette bien remplie d'un légume à la portée de sa bourse et particulièrement riche en fibres, en acides aminés essentiels, en vitamines, en minéraux et oligoéléments. A vrai dire, n'est-il pas intéressant pour l'Algérie de se pencher sur le menu mexicain ?