Dans la rétrospective Nanni Moretti, il y a 58 films, ceux faits par lui, ceux où il est seulement acteur, ceux qu'il a produits, ceux que l'on a fait sur lui et d'autres qu'il préfère montrer ici et sans doute dans son cinéma de Rome. Locarno (Suisse) : De notre envoyé spécial Dans cette dernière catégorie, un film de Nagisa Oshima tourné dans les années 1960, traduit dans le générique français par : Nuit et Brouillard au Japon. C'est une œuvre d'une force inouïe qui a véritablement placé le niveau des programmes du festival de Locarno quelques niveaux plus haut. Arrière-plan de l'histoire filmée par Oshima comme un huis clos théâtral : la signature du traité de coopération mutuelle et de sécurité entre le Japon et les Etats-Unis dans les années 1950. Une affaire gravissime, qui survient après la défaite humiliante du Japon et l'occupation que des centaines de milliers de Japonais, étudiants et travailleurs, ont violemment contesté dans des émeutes demeurées historiques par leur durée et leurs répercussions sur le pays. Dans un face-à-face impressionnant, Oshima filme des clans naguère unis et qui par la suite se sont opposés, une fois que le traité fut finalement voté par le Parlement de Tokyo. Au cours du mariage de Nozowa et Reiko, leaders du mouvement contre le traité, mais qui ont renoncé à la violence, on voit surgir leurs camarades qui eux poursuivent le combat. A partir de là, le film prend un ton très dur à la mesure des rêves cruellement brisés de toute une jeunesse japonaise. Un premier clan veut suivre la ligne du parti et renoncer aux démonstrations de rue, de toute façon le traité est conclu... L'autre clan accuse le premier de manquer d'âme et de trahir les idéaux de la révolution et les engagements passés. Splendide mise en scène, superbes acteurs : on comprend pourquoi Nanni Moretti a tenu à tirer cette œuvre de nagisa Oshima, d'un injuste oubli.