Avalanche de portraits de stars sur la France... Richard Avedon et Annie Leibovitz, les deux monstres de la photo people, exposent leurs travaux à Paris et à Arles. Commençons par le maître. L'Américain a toujours voulu exposer dans la ville Lumière. Dans les années 1950, il a été le premier à sortir les célébrités des studios pour les emmener dans la rue, au cirque... Paris : De notre bureau Mais les musées de la capitale lui avaient toujours fermé leurs portes. Trop lisse, trop commercial, trop star... Avedon a dû attendre de mourir il est décédé il y a 4 ans pour atteindre les cimaises parisiennes, malgré sa notoriété internationale. Annie Leibovitz, elle, est bien vivante. Américaine comme Avedon, elle a débuté sa carrière dans la revue Rolling Stones, comme Avedon. Elle a suivi les traces de Richard dans sa passion pour les grands de ce monde. Mais la comparaison n'est pas raison, même si les deux photographes ont une technique parfaite et une touche bien à eux. Avedon, divin de la photo, ne s'est intéressé qu'au portrait chic mais décalé : un fond blanc, des gros plans, des flous, des surexpositions. Des instants volés Le tout tient en une seule recette : ne jamais accepter en photographie rien qui puisse devenir une formule. Annie Leibovitz, elle, a développé sa propre ligne et elle n'a jamais hésité à se mettre en scène. Elle raconte sa vie en images, selon une formule très simple : une vie de photographe est faite de photographies... Plus moderne, elle montre des clichés de sa famille qui contrastent avec ceux des stars. La star de Vanity Fair a aussi saisi sa compagne, l'intellectuelle Susan Sontag, dans son combat contre la maladie. Comme un journal intime d'instants volés. Avedon, lui, est plus chirurgical, plus froid. Son style est facilement identifiable. Des modèles se détachent d'un fond neutre, gommant ainsi tout ce qui peut distraire le regard. Des portraits affranchis de toute « glamourisation ». Il peut aussi voler des images, notamment celles de Charlie Chaplin jouant au diable avec ses doigts, avant son expulsion des USA. Sur une autre photo, Avedon croque Marilyn Monroe perdue dans ses songes. Ce fils d'une modeste famille juive, a aussi saisi tous les écrivains et les artistes de son temps.... Tous ceux qui dérangeaient, il les immortalisait. Ce sens de la provocation, il l'a gardé même quand il a voulu se retirer de la photo de mode en 1995. Cette année-là, il réalise une série en couleur avec le mannequin Nadja Auermann. Il la photographie avec un squelette. Sa façon de clore le chapitre. Mais là où Avedon réussit par un clic à dénuder ses personnages, Leibovitz a souvent besoin d'artifices. Ainsi Avedon n'a jamais cédé face à la photo de publicité, à la différence de Leibovitz. Scandale de la couronne Il n'aurait pas aimé le tapage non plus dont la photographe a fait son fonds de commerce. Elle a même réussi à énerver la très royale Elisabeth II, en lui demandant d'enlever sa couronne pour la photo. Un scandale au pays de la reine. En dévorant des yeux les Demi Moore, Whoopi Goldberg, Brad Pitt, Andy Warhol, Cindy Crawford... C'est là qu'on s'irrite. Il y a comme un arrière-goût de fast-food dans les deux expos. La recette est bien huilée, américaine, et marche à tous les coups et pour tous les goûts. Jusqu'à la crise de foi. — « Richard Avedon, photographies 1946-2004 », jusqu'au 28 septembre. Jeu de paume, Paris. Ouvert tous les jours, sauf le lundi. Catalogue : coéditions Jeu de paume/Louisiana Museum of Modern Art, 192 pp. — « Richard Avedon, en souvenir des regrettés M. et Mme Confort ». Cloître Saint-Trophime, Arles. Ouvert tous les jours de 10 h à 19 h. Jusqu'au 31 août. * Annie Leibovitz, Maison européenne de la photographie, Paris. Jusqu'au 14 septembre. « La vie d'une photographe », Ed. La Martinière, 480 pp.