Militaires, gouvernants et politiques américains s'accordent à dire qu'il est urgent d'envoyer d'importants renforts en Afghanistan pour tenter d'enrayer la hausse des violences, mais le manque d'hommes disponibles risque de rendre ce vœu difficile à exaucer rapidement. « Il existe un besoin très réel et très urgent d'envoyer des troupes supplémentaires en Afghanistan. Nous travaillons dur pour ajouter des renforts et nous cherchons les moyens de le faire le plus vite possible », a assuré jeudi le chef d'état-major américain, l'amiral Michael Mullen, alors que les militaires sur place réclament plus de 10 000 soldats supplémentaires. Dans un rare consensus, les deux candidats à la Maison-Blanche, le démocrate Barack Obama et le républicain John McCain, sont également favorables à l'envoi de nouvelles troupes en Afghanistan, où les violences ont redoublé d'intensité depuis près de deux ans, malgré la présence de 70 000 soldats étrangers. Le sénateur Joe Biden, colistier de M. Obama, a défini l'Afghanistan comme le « véritable front de la guerre contre le terrorisme », mardi à Denver. Le Pentagone a déjà déployé quelque 3500 Marines en plus au printemps et compte 36 000 soldats sur place. Mais avant même d'envisager l'augmentation du contingent, les militaires américains doivent d'abord résoudre l'épineuse question du remplacement des Marines envoyés en renfort, dont la mission, déjà prolongée d'un mois, s'achèvera en novembre. Or, rien de concret n'est prévu pour l'instant pour prendre leur suite et maintenir les progrès accomplis sur le terrain, déplore le commandant des US Marines, le général James Conway. « Tout le monde a l'air d'approuver le fait que l'envoi de forces supplémentaires est la meilleure chose à faire, mais la question de savoir d'où elles vont venir reste en suspens3, a-t-il expliqué mercredi. L'envoi de troupes américaines en Afghanistan reste conditionné à une baisse du contingent en Irak, où se trouvent actuellement quelque 145 000 soldats américains. Le général David Petraeus, plus haut gradé américain en Irak, devrait recommander ce mois-ci le retrait de troupes supplémentaires. « Pour faire plus en Afghanistan, la présence de nos Marines doit être allégée ailleurs », a insisté le général Conway, dont 25 000 hommes sont basés dans la province d'Al Anbar (ouest), qui devait être remise hier au contrôle des Irakiens. En attendant, les Marines ont adapté leur entraînement pour pouvoir être déployés indifféremment en Afghanistan ou en Irak. « Nous envoyons plus d'unités qu'auparavant s'entraîner au combat de montagne, par exemple », explique-t-il, en rappelant que le déploiement en Afghanistan au printemps dernier « était une décision plutôt impromptue » qui n'avait pas laissé d'« opportunité d'entraîner pleinement ces Marines ». Malgré tout, même si le nombre de Marines en Irak baissait dans les prochains mois, il serait impossible de remplacer dès novembre la 24e unité expéditionnaire, composée de 2200 hommes et postée dans le sud de l'Afghanistan, reconnaît-il. « Cela prend du temps d'envoyer une unité expéditionnaire, de l'entraîner et rien n'est prévu pour l'instant, donc le calendrier ne colle pas pour remplacer la 24e unité », a-t-il admis. A ses yeux, le seul scénario « plausible » pour l'heure serait de prendre la relève en novembre du millier de Marines envoyés en Afghanistan pour entraîner les forces de sécurité afghanes. Un nombre qui reste bien inférieur aux trois brigades de combat réclamées avec insistance par le commandement américain en Afghanistan.