Flambée ou pas flambée ? Alors que les témoignages dans les médias se contredisent, certains dénonçant l'envolée des prix des aliments, d'autres assurant que le marché est resté stable, El Watan a lancé, bien avant que le Ramadhan ne commence, une étude en direct des marchés. Pendant quatre semaines, depuis la mi-août jusqu'à hier, nos correspondants à Constantine, Oran, Ouargla, Tizi Ouzou ont relevé les prix des fruits, des légumes, de la viande, des dioul et des œufs. A Alger, nous nous sommes servis de la liste des prix moyens, par produit, tels qu'ils sont calculés chaque jour par la direction de la concurrence et des prix, depuis la fin du mois d'août, à partir des prix relevés sur les 68 marchés de la wilaya. Voici, dans le détail et analyses, les résultats de notre enquête. Une hausse mais pas de flambée Il y a bien eu une augmentation régulière, mais légère, les semaines précédant le premier jour du Ramadhan, qui a faibli dix jours après, sans toutefois retrouver la moyenne du mois d'août. Mais pas de flambée. « Le marché aujourd'hui ne connaît pas de flambée telle que nous l'avons connue en 2003, nous a expliqué Youssef Lamari, directeur de la concurrence et des prix de la wilaya d'Alger. A l'époque, le kilo de viande dépassait les 1 000 DA et la courgette les 220 DA le kilo. On enregistrait sur certains aliments plus de 100% d'augmentation ! » Dans les wilayas, les correspondants confirment les observations d'Algérie presse service (APS) qui relevait, le 1er septembre : « Au marché d'El Madania, le prix de la pomme de terre varie entre 30 et 35 DA le kilo au moment où celui des oignons est de 20 à 25 DA et celui des carottes et tomates oscille entre 50 à 70 DA le kilo. Ces prix sont identiques dans les autres marchés visités, comme ceux d'Ali Mellah (1er Mai), Ferhat Bousaâd (ex-Meissonnier) et Laâqiba (commune de Belouizdad). » Des étals victimes de « l'entre-deux saisons » Ce n'est pas un hasard si la tomate est l'un des fruits qui a connu la plus forte hausse (de 32,50 DA en moyenne à la mi-août, elle est passée à 58 DA les premiers jours du Ramadhan). Mohamed Medjber, président de l'Association des commerçants grossistes des fruits et légumes au marché des Eucalyptus, avait prévenu : « Le mois sacré coïncide cette année avec la fin de l'été, période d'assolement marquant la fin de la saison des récoltes estivales et le début des cultures automnales, dont la saison des récoltes s'ouvre à partir de fin novembre. » La demande sur la tomate est très forte pendant le mois de jeûne. Or, elle se fait, comme à chaque fin de saison, de plus en plus rare et de moins en moins belle. Pour la laitue, devenue subitement très coûteuse (dépassant les 110 DA sur plusieurs marchés), c'est l'inverse : « Nous sommes en début de saison et les récoltes ont souffert des intempéries », nous explique Youssef Lamari. Sur les marchés de Constantine, Arslan, notre journaliste, note que les consommateurs se sont adaptés. « Ils ont laissé la laitue, trop chère, pour se rabattre sur la betterave à 40 DA le kilo ou la carotte à 50 DA le kilo. Même chose pour les pêches, inabordables (à partir de 120/140 DA le kilo), abandonnées au profit du melon à 50 DA le kilo, parfois même cédé à 50 DA les trois petites pièces. » A Ouargla, le dromadaire remplace le bœuf dans les boureks Au rayon boucherie, les viandes blanches (poulet et dinde), du fait de la raréfaction des élevages en été, sont nettement plus chères, et par extension, les œufs aussi ont connu une augmentation. La baisse de 10% par rapport à l'année dernière, annoncée par le ministère du Commerce suite à la suppression de la TVA (17%) sur les aliments de la volaille décidée récemment dans la loi de finances complémentaire, n'aura finalement pas eu lieu. A Ouargla, où la viande de bœuf bat des records à 900 DA le kilo au marché du Ksar, au centre-ville, les consommateurs ont trouvé une alternative : la viande cameline. « Même les gens qui viennent du nord de l'Algérie s'y mettent : la viande de dromadaire en morceaux, et surtout hachée, est très prisée pour les boureks, par exemple, note Houria Alioua. Goûteuse et légère, elle se vend 600 DA le kilo, soit les deux tiers du prix du veau ! » L'offre est mieux gérée et mieux contrôlée Tous les ministres ont assuré,au début du mois, que les produits alimentaires seraient disponibles en abondance sur les marchés et qu'il ne devrait pas y avoir de pénurie. Le gouvernement est allé jusqu'à « stocker 120 000 tonnes de pommes de terre tellement la récolte est abondante, pour que son prix ne s'effondre pas, alors que son prix avait dépassé les 70 DA le kilo l'année dernière », a précisé Hachemi Djaâboub, ministre du Commerce. A la DCP, Youssef Lamari se veut lui aussi confiant : « Des mesures ont été prises. Au 31 août, la pomme de terre était à 30 DA le kilo. En cas d'envolée de son prix, le wali déstockera les chambres froides pour réguler le marché. Il n'y aura pas de rétention à des fins spéculatives. Les marchés de gros et les chambres froides sont aussi contrôlés. » Dans tout le pays, 3800 agents sont mobilisés dans le cadre du dispositif spécial. « Ils travaillent sept jours sur sept pour vérifier l'affichage des prix et les pratiques commerciales dans les marchés et les épiceries. C'est presque le même dispositif que pendant la saison estivale, mais pendant le mois de Ramadhan, il est étendu aux soirées », ajoute Youssef Lamari. Mieux contrôlée, l'offre est aussi mieux gérée : même si les intermédiaires existent toujours, l'assainissement dans la distribution – la production agricole, dans sa grande majorité, passe aujourd'hui par le marché de gros – contribue aussi à réguler le marché. Adlène Meddi, Ahcène Tahraoui, Arslan S., Cherif Lahdiri, Farida. h, Houria Alioua, Mélanie Matarese, Selma B.