Dix ans après le détournement de l'Airbus, beaucoup de questions sont restées sans réponses. D'abord l'opération qui devait avoir lieu le 24 décembre, c'est-à-dire la veille de Noël, aurait peut-être servi, 7 ans avant le 11 septembre 2001, à parfaire les « techniques » d'utilisation d'avion de ligne pour des opérations kamikazes. Ce n'est que cinq ans plus tard que l'on saura par la bouche d'un ancien émir terroriste repenti, Omar Chikhi, que l'attentat était prévu pour le 31 décembre par Djamel Zitouni, chef du GIA à l'époque. On a su par la suite qu'une dizaine d'hommes devaient en principe faire partie du commando dirigé par Abdellah Kronfel, secondé par Abou Abdellah Yahia. Mais le 24 décembre, ils n'était plus que quatre hommes armés à embarquer non pas comme passagers, comme ce fut le cas pour les attentats du 11 septembre qui ont été perpétrés par 19 terroristes répartis sur quatre vols commerciaux distincts et avec des cibles distinctes, mais en se faisant passer pour des policiers grâce à des complicités au niveau de l'aéroport Houari Boumediène à Dar El Beïda. Que s'était-il passé entre-temps pour que la date soit avancée de cette manière ? Par contre, pour ce qui est des attentats contre les tours du World Trade Center prévus le 11 septembre 2001, les enquêtes menées par la suite ont révélé qu'ils avaient été planifiés et soigneusement préparés au cours du mois de juillet de la même année en Europe, en Espagne notamment, et qu'en dépit de la défection du « 20e homme », Zacarias Moussaoui arrêté au courant du mois d'août aux USA, la date des opérations-suicide n'a pas été modifiée. Par contre, pour ce qui est de la prise de l'Airbus d'Air France à Alger, il semblerait, selon le témoignage de Chikhi, que l'arrestation à la mi-décembre d'un membre du commando a poussé Abdellah Yahia à avancer la date de l'opération par crainte d'un démantèlement du groupe tout entier. Il arrête donc la date du 24 décembre avec comme objectif vraisemblablement de faire exploser l'Airbus au-dessus de la Tour Eiffel le jour de Noël, en ne comptant plus que sur l'aide de trois complices au lieu des dix, et ce, sans en référer à Djamel Zitouni qui apprendra l'événement par les médias. Mais contrairement aux pirates de l'air du 11 septembre, ceux de l'Airbus A300 du vol 8969 affichent, avant même le décollage de l'appareil, leur appartenance au GIA et font connaître immédiatement aux autorités leurs revendications dont entre autres la libération de Ali Benhadj et de Abassi Madani. Des négociations sont alors engagées et dureront plusieurs heures : des otages sont libérés, 63 passagers regagnent l'aérogare. L'exécution de deux passagers à Alger par les terroristes sans que ces derniers aient pu obtenir satisfaction de leurs revendications va précipiter les choses. Le gouvernement français demande alors aux autorités algériennes de permettre à l'Airbus de quitter Dar El Beïda pour la France selon le « vœu » des terroristes. Contrairement aux pirates du 11 septembre qui ont suivi une formation en matière de pilotage, ceux-ci n'ont aucune idée du fonctionnement d'un avion de ligne. Leur objectif était de rallier la capitale française mais, faute de carburant, l'appareil devra atterrir à Marseille où sera donné l'assaut final par le GIGN, après des négociations, car le gouvernement Balladur n'avait nullement l'intention de laisser les terroristes rejoindre Paris à bord de l'Airbus. On dit même que l'ordre aurait été donné aux forces aériennes d'abattre l'appareil au cas où il devrait quitter l'aéroport de Marseille ! Les révélations faites par la suite, aussi bien par Omar Chikhi que par d'autres terroristes repentis, ont confirmé que bien avant l'affaire du détournement de l'Airbus d'Air France, des contacts avaient été établis avec Oussama Ben Laden et que ce dernier apportera appui et aide financière bien plus tard, notamment avec Al Qaîda en Afghanistan. Des membres du GIA ont même été entraînés dans les bases des Talibans. Mais toujours est-il que l'affaire de l'Airbus ne semble pas avoir été prise au sérieux et que la seule mesure prise juste après a été d'instaurer un embargo sur l'escale d'Alger pour les compagnies européennes. Jusqu'au 11 septembre 2001, les services occidentaux ne pensaient pas que de telles opérations suicides pouvaient être montées à partir de leur propre sol. Et pourtant quelques mois auparavant, l'arrestation de Mohamed Ressam à la frontière américano-canadienne à la veille des festivités du Millenium en possession de plusieurs kilos d'explosifs dévoilera l'existence d'un plan comportant plusieurs attentats contre les intérêts occidentaux, notamment ceux qui « soutiennent le gouvernement des généraux en Algérie ». Des attentats à l'explosif, des prises d'otages et même l'utilisation d'avions de ligne comme « bombes volantes » au-dessus de villes afin de marquer les esprits. On ne saura jamais peut-être si les autorités et les services de renseignements américains ont pris en considération les « révélations » de Ressam ou tout simplement classé ces informations pensant sans doute que de telles opérations-suicide relevaient plus de l'intox et de la propagande islamiste que d'autre chose. La suite des événements, notamment les attentats du 11 septembre 2001, prouvera le contraire.