Les problèmes de gestion et de conservation du patrimoine génétique d'animaux d'élevage – marquage et enregistrement des bêtes (animaux) suivi des performances par machine, (collecte de l'information, évaluation des performances économiques de l'élevage) sélection et amélioration génétiques des animaux… – sont à l'origine des entraves au développement bovin laitier en Algérie, selon une étude publiée dans la revue n'°3 éditée par l'Agence nationale pour le développement de la recherche universitaire. Les auteurs ont centré leurs travaux sur la race montbéliarde dans la région de Sétif, car, cette contrée des hautes plaines semi-arides regroupe la majeure partie du cheptel bovin laitier du pays. « Les estimations les plus fiables tablent aujourd'hui sur un effectif de 150 000 et à 200 000 têtes rien que dans la région de Sétif, dont 70 à 80 000 produisent du lait », précise Toufik Madani, agronome spécialiste en systèmes de production animale à l'université de Sétif et co-auteur de l'étude. Dans cette région, la proportion des races européennes de haut potentiel sélectionnées pour la production laitière et importées a fortement augmenté suite à la demande soutenue sur le lait consécutive au développement démographique, à l'amélioration du niveau de vie et à la croissance urbaine qu'a connus l'Algérie après l'indépendance. Parmi les races qui ont été adoptées et appréciées par les éleveurs, la Montbéliarde, introduite depuis 1970 de l'est de la France. Son orientation mixte (lait et viande), mais aussi sa bonne résistante aux parasites et à la chaleur (c'est une race de montagne) ont aidé son adoption par les éleveurs. « Toutefois, peu d'études ont été faites sur ses capacités d'adaptation aux régions semi-arides et aux systèmes d'élevage mis en œuvre par les éleveurs », nous explique Toufik Madani. « Alors que l'une des contraintes qui limitent encore le développement de l'élevage laitier dans nos régions est l'adaptation du matériel animal utilisé. » En effet, les effets du stress environnemental, les faibles ressources alimentaires ou encore les conditions d'hygiène empêchent les races améliorées des régions tempérées transférées au sud de la Méditerranée d'exprimer leur potentiel de production. Alors qu'une vache produit en moyenne entre 7 000 et 7 500 kilos par lactation dans son pays d'origine, elle n'en donne qu'entre 2 000 et 3 500 kilos une fois en Algérie. « La problématique de la production laitière en Algérie se pose donc en termes de stratégie, poursuit l'agronome. En investissant dans des vaches améliorées, comme la Montbéliarde, mais dans une région et dans un environnement auxquels elle n'est pas habituée, peut-on constituer une pépinière d'animaux adaptés à nos conditions et nos systèmes d'élevage et augmenter la production laitière ? En d'autres termes, est-ce que ce modèle est fiable ou pas ? Est-ce que l'on peut produire une souche adaptée aux conditions de la région ? » Si les performances de production et de reproduction se maintiennent à travers les générations successives d'animaux nés en Algérie, la réponse est oui. « Or, de génération en génération, on s'aperçoit que la production laitière de la Montbéliarde baisse. Cela signifie que nous n'avons ni les compétences ni les structures qui conviennent », note le chercheur. « La faute n'est pas imputable à l'exploitant, dont les problèmes de gestion du matériel animal à l'échelle nationale dépassent largement sa responsabilité. C'est le rôle de l'Etat de mettre au point des systèmes de gestion et de conservation de la race qui, pour l'instant, n'existent pas. »